« J'aime lire comme lit une concierge : m'identifier à l'auteur et au livre. Toute autre attitude me fait penser au dépeceur de cadavres », écrit Cioran dans De l'inconvénient d'être né (1988). Vous commenterez cette réflexion en vous appuyant sur des exemples tirés de votre propre expérience de la lecture.
Publié le 20/12/2021
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Ci-dessous un extrait traitant le sujet : « J'aime lire comme lit une concierge : m'identifier à l'auteur et au livre. Toute autre attitude me fait penser au dépeceur de cadavres », écrit Cioran dans De l'inconvénient d'être né (1988). Vous commenterez cette réflexion en vous appuyant sur des exemples tirés de votre propre expérience de la lecture.. Ce document contient 1135 mots soit 3 pages. Pour le télécharger en entier, envoyez-nous un de vos documents grâce à notre système gratuit d’échange de ressources numériques. Cette aide totalement rédigée en format PDF sera utile aux lycéens ou étudiants ayant un devoir à réaliser ou une leçon à approfondir en: Français / Littérature.
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« J'aime lire comme lit une concierge : m'identifier à l'auteur et au livre.
Toute
autre attitude me fait penser au dépeceur de cadavres », écrit Cioran dans De
l'inconvénient d'être né (1988).
Vous commenterez cette réflexion en vous
appuyant sur des exemples tirés de votre propre expérience de la lecture.
I Lecture récréative ou lecture savante
_ En se réclamant de l’attitude de la « concierge », Emil Cioran cède à l’une de ses
habitudes d’écriture les plus caractéristiques, qui consiste à dévaluer le travail de
l’intellectuel ou du critique littéraire, au profit d’un rapport au texte plus naïf, et débarrassé
de toute exigence, de toute utopie rationaliste.
Pourtant, un parcours même rapide de
l’œuvre de Cioran fait apparaître le caractère problématique d’un tel propos : c’est un
philosophe et un herméneute qui manifeste ici sa défiance envers le principe d’écriture
discursive.
Ce terme de « concierge » est une ironie de l’auteur vis-à-vis de lui-même, et
exige donc du lecteur une transformation de son rapport au livre quel qu’il soit, dont aucune
des deux attitudes envisagées ne doit sortir indemne.
_ En opposant ainsi l’attitude récréative à l’attitude herméneutique, Cioran sous-entend
une incompatibilité de leurs attributs : le travail (la souffrance) sur le texte et le plaisir du
texte s’excluent l’un et l’autre, quand bien même un traité de métaphysique se soucierait
de qualité littéraire, ou un roman manipulerait des concepts arides.
Dans son ???, Sénèque
compare ainsi la qualité d’écriture d’un traité au miel dont la mère enduit la coupe remplie
d’un breuvage amer pour encourager son enfant à la boire.
Dès lors, analyser l’affirmation
de Cioran revient à déterminer s’il ne serait pas possible de découvrir une valeur cognitive
de la simple satisfaction du plaisir de lire et, à l’inverse, si la froide analyse du critique ne
dissimule pas un joie qui lui serait spécifique.
II La vertu du concierge
_ Au delà de sa valeur d’ironie, la référence à la concierge sous-entend une attitude de
lecture particulière.
En effet, la concierge est dans l’imagerie populaire celle qui aime à
vivre la vie des autres.
Le plaisir de la lecture serait ainsi réduit à un principe de jouissance
par procuration : vivre dans le texte une expérience d’une intensité que la réalité prosaïque
interdit.
Au cours du roman autobiographique Enfances , Nathalie Sarraute avoue ainsi
l’enthousiasme qui la saisissait invariablement à la lecture de Rocambole , un récit écrit par
Ponson du Terrail, rempli d’aventures invraisemblables, d’enlèvements de la femme
aimée, de déchirements et de retrouvailles passionnées.
De la même manière, un large
pan de la pensée littéraire s’attache à réhabiliter le goût pour la « mauvaise littérature »,
le roman de gare, le texte qui n’a d’autre objet que de distraire ou de transporter.
_ Toutefois, que ce soit pour la défendre (comme le fait Montaigne à propos des
Métamorphoses d’Ovide) où pour en révéler le danger (ainsi Flaubert dans Madame
Bovary ), quiconque envisage l’activité littéraire comme la découverte d’un plaisir ne peut
en faire une expérience anodine.
L’essai de Roland Barthes intitulé Le plaisir du texte
explore ainsi les mécanisme de l’écriture, pour en conclure à un fonctionnement d’ordre
érotique : le texte se dévoile au lecteur sans jamais laisser voir la réalité de ce qu’il décrit,
très exactement à la manière d’un strip-tease.
La concierge-lectrice ne satisfait pas une
simple manie, elle accomplit un parcours psychique qui la conduit de son immédiateté
quotidienne et angoissante à l’objet même de son désir.
Le texte plaisant est donc un
vecteur pour l’individu, puisqu’il lui donne à voir une situation qui lui est étrangère à priori,
mais dans laquelle il lui est possible de se reconnaître lui-même.
S’identifier à un
personnage revient à déplacer sa propre identité, à se faire autre..
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