Introduction au droit et vocabulaire juridique
Publié le 17/10/2022
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«
INTRODUCTION AU DROIT
ET AU VOCABULAIRE JURIDIQUE
*** Cours 1 et 2 ***
Ce cours d’Introduction au droit et au vocabulaire juridique est le deuxième acte
de l’Introduction au droit qui vous est proposée en première année.
Lors du premier semestre, et donc du premier acte, une spécialiste de droit
public (« publiciste », par opposition aux « privatistes ») vous a déjà présenté
une partie des bases permettant la compréhension de ce qu’est le droit et, plus
spécifiquement, la compréhension du fonctionnement du droit français.
Ce deuxième acte s’inscrit dans le prolongement de ce premier cours, mais il
vous est cette fois-ci présenté par un privatiste.
Il est destiné à vous préparer à la
connaissance et à la pratique du droit et à vous accompagner lors de cette
première année d’apprentissage du droit.
Une telle introduction est indispensable à l’étude d’un domaine aussi vaste et
spécifique que le droit.
Elle poursuit trois objectifs principaux :
- Elle doit vous permettre de consolider certaines connaissances essentielles
et de vous familiariser avec le vocabulaire employé dans le domaine
juridique.
- Elle doit également vous permettre de faire le lien entre les différentes
disciplines du droit que vous allez étudier en détail lors de votre cursus (et
que vous avez déjà commencé à découvrir lors du premier semestre).
- Elle doit enfin vous permettre de comprendre la logique du droit et les
spécificités du raisonnement juridique, qu’il s’agisse du raisonnement à
conduire en droit pour déterminer ce que prévoit le droit pour une
situation de fait précise (par exemple, si vous êtes marié(e) et que vous
souhaitez divorcer) ou du raisonnement à suivre en cas de doute sur la
solution donnée par le droit à une situation de fait concrète, mais aussi du
raisonnement à suivre, lorsqu’un tel doute se présente, pour argumenter en
faveur d’une solution plutôt qu’une autre.
En d’autres mots, il s’agit de comprendre et d’apprendre à maîtriser le savoirfaire du juriste, ce que les juristes appellent généralement la « technique
juridique » ou la « méthodologie juridique ».
Ce cours d’Introduction au droit aura essentiellement pour objectif de vous
présenter les premiers aspects de ce savoir-faire, tout en poursuivant votre
apprentissage du vocabulaire juridique et de la logique du droit.
Il constituera
une Introduction à l’analyse et au raisonnement en droit.
Mais, avant d’entamer cette étude du savoir-faire des juristes, il peut être
intéressant de revenir sur quelques notions et distinctions fondamentales qui ont
dû vous être exposées au premier semestre, ne serait-ce que pour vous les
remettre en mémoire (Section I).
Une fois ces éléments passés en revue, nous présenterons les objectifs de ce
cours et le plan que nous suivrons pour les atteindre (Section II).
Section I – Retour sur quelques notions et distinctions fondamentales
Section II – Objectifs poursuivis et plan du cours
Section I – Retour sur quelques notions et distinctions fondamentales
Nous allons revenir, dans cette section, sur la division fondamentale du droit
français entre droit privé et droit public (§ 1), puis sur les ordres de juridictions
(§ 2), avant de rappeler très brièvement la distinction entre droit objectif et droits
subjectifs (§ 3) et l’importance de la personnalité juridique (§ 4).
§ 1.
La summa divisio entre le droit privé et le droit public
Il vous a sans doute été expliqué que le droit français repose sur une distinction
majeure : celle entre droit privé et droit public.
Ainsi, le droit public concerne l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs
publics, mais aussi les rapports des pouvoirs publics avec les particuliers, tandis
que le droit privé régit les rapports des particuliers entre eux.
Concrètement, le droit public comprend principalement le droit constitutionnel,
le droit administratif, le droit des finances publiques et le droit international
public.
Il comprend aussi, bien entendu, les règles de procédure relatives aux
voies de recours ouvertes dans ces différents domaines.
Le droit constitutionnel organise le fonctionnement de l’Etat et des pouvoirs
publics, mais il concerne également la protection des droits et libertés
fondamentaux garantis par la Constitution et même, plus largement, par le « bloc
de constitutionnalité ».
Le droit administratif régit, quant à lui, le rôle et l’organisation des
administrations et des services publics, mais aussi les rapports entre les
particuliers et l’administration.
Le droit des finances publiques concerne l’élaboration du budget de l’Etat et les
règles relatives au calcul et à la perception de l’impôt (droit fiscal).
Le droit international public régit, lui, les relations entre Etats et le
fonctionnement des organisations internationales.
Il repose sur des traités et des
conventions diplomatiques, parmi lesquelles la Charte des Nations Unies.
Il
s’agit d’une branche du droit très particulière car son application dépend du bon
vouloir des Etats et des moyens de pression diplomatiques ou commerciaux qui
peuvent être utilisées dans le cadre des relations internationales entre Etats.
Le droit privé comprend, quant à lui, principalement le droit civil, le droit
commercial et le droit international privé, mais aussi le droit de la
consommation.
Il comprend aussi, bien entendu, les règles de procédure
relatives aux voies de recours ouvertes dans ces différents domaines.
Le droit privé comprend, en premier lieu, le droit civil.
En effet, le droit civil n’est pas qu’une simple branche du droit privé, mais son
socle fondamental.
« Plus qu’une branche, il en est le tronc » écrit une auteure1.
Le droit civil est, en effet, le droit commun de l’ensemble du droit privé : celui
auquel il convient de se référer à défaut de dispositions spéciales.
1
p.
60.
Brusorio Aillaud (M.), Cours d’introduction générale au droit, 2ème éd., Paris, Lextenso, Gualino, 2020,
Ainsi, les dispositions générales relatives aux sociétés que l’on trouve aux
articles 1832 à 1844-17 du Code civil s’appliquent également aux sociétés
commerciales sous réserve des dispositions spéciales prévues dans le Code de
commerce ou de textes spéciaux propres à une forme de société commerciale.
Il en est de même pour les dispositions relatives aux obligations contractuelles,
mais aussi pour celle relatives à certains contrats en particulier.
Enoncées dans
le Code civil, ces dispositions rayonnent au-delà du droit civil.
Le droit commercial ou droit des affaires est, quant à lui, relatif à l’activité des
commerçants et des sociétés commerciales.
Les règles qui le régissent sont
essentiellement issues du Code de commerce et du Code de la consommation.
Le droit international privé concerne, lui, les rapports entre personnes juridiques
de droit privée lorsque ces rapports présentent un élément d’extranéité.
Par
exemple, lorsqu’un accident de la circulation impliquant un conducteur français
et un conducteur italien se produit en Italie.
Il permet notamment de déterminer
dans ce type de situations la loi applicable et la juridiction compétente.
Le droit de la consommation concerne, quant à lui, la catégorie des contrats dits
« de consommation », c’est-à-dire ceux passés entre un professionnel et un
consommateur, qu’il s’agisse d’une vente, d’une location, d’un prêt (ou
« crédit ») ou d’une prestation de services.
Ces contrats appartiennent
généralement à la catégorie des contrats d'adhésion, ce qui signifie qu'ils ne font
l'objet d'aucune négociation visant à déterminer leur contenu : le consommateur
doit accepter en bloc le contrat ou refuser de contracter.
Les règles applicables en matière de droit de la consommation sont, en principe,
contenues dans le Code de la consommation.
Les autres branches du droit sont généralement considérées comme relevant à la
fois du droit privé et du droit public.
On parle parfois de « droits mixtes ».
Ainsi, le droit pénal comprend les règles définissant et sanctionnant les
infractions (qu’il s’agisse de crimes, de délits ou de contraventions) et, avant
cela, les principes régissant cette matière si particulière.
La procédure pénale concerne, elle, la mise en œuvre du droit pénal, de la
recherche de l’auteur d’une infraction à son jugement.
En France, droit pénal et procédure pénale semblent relever du droit public car
le procès pénal ne met en jeu que deux parties : d’une part, le ministère public,
représenté par un procureur ou un avocat général, qui incarne la défense de la
société, et, d’autre part, l’accusé (en matière criminelle) ou le prévenu (en
matière de délit ou de contravention).
La victime n’est pas partie au procès
pénal, mais elle peut demander réparation de son préjudice en se constituant
partie civile.
Malgré ces éléments, le droit pénal est, en France, principalement rattaché au
droit privé, car les juridictions chargées de l’appliquer (à commencer par les
tribunaux de police pour les contraventions, les tribunaux correctionnels pour les
délits, les cours d’assises pour les crimes ou encore les juridictions d’instruction
(juge d’instruction et juge des libertés et de la détention) ne relèvent pas de
l’ordre administratif, mais de l’ordre judiciaire.
L’appel contre une décision rendue par une telle juridiction est de la compétence
de la Cour d’appel territorialement compétente (il y a actuellement 36 cours
d’appel en France) ou de la Cour d’assises d’appel pour une décision rendue par
une cour d’assises.
Le droit social comprend, quant à lui, deux branches du droit : le droit du travail
et le droit de la sécurité sociale.
Le droit du travail régit les rapports entre employeurs privés et salariés
(notamment pour ce qui concerne le contrat de travail ou le licenciement).
Les
règles applicables en la matière sont issues du Code du travail, mais aussi des
accords de branches et des conventions collectives.
Les litiges relèvent du
Conseil de prud’hommes.
Le droit de la sécurité sociale régit, lui, les rapports entre assurés et organismes
de sécurité sociale.
Les règles applicables en la matière sont issues du Code de
la sécurité sociale et les litiges relèvent généralement des tribunaux judiciaires.
A l’instar du droit social, d’autres branches du droit intéressent à la fois le droit
public et le droit privé, mais semblent clairement pencher vers le droit privé car
leur litiges sont soumis aux juridictions de l’ordre judiciaire : c’est le cas du
droit des assurances, du droit de la propriété intellectuelle ou du droit des
transports, respectivement régis par le Code des assurances, le Code de la
propriété intellectuelle et le Code des transports (ces différents domaines sont
également soumis à certaines dispositions du Code civil, notamment celles
relatives au droit commun des contrats).
Il convient pour conclure ces brefs développements sur la division entre droit
privé et droit public de dire quelques mots sur le droit européen, plus exactement
sur le droit de l’Union européenne.
Celui-ci est composé, d’une part, d’un droit
institutionnel qui régit les institutions de l’Union européenne et leur
fonctionnement et, d’autre part, d’un droit matériel : le droit élaboré par ces
institutions lorsque l’Union européenne dispose de la compétence pour le faire.
Ce droit matériel est destiné à intégrer le droit interne des Etats membres.
Ainsi,
les articles 1245 et suivants du Code civil, consacrés à la responsabilité des
produits défectueux, sont issus d’une loi du 19 mai 1998 qui n’est que la
transposition d’une directive européenne (celle du 25 juillet 1985 relative à la
responsabilité du fait des produits défectueux).
§ 2.
Les ordres de juridictions
La summa divisio entre droit public et droit privé se traduit concrètement dans
l’organisation juridictionnelle de notre droit.
Les juridictions françaises sont, en
effet, réparties en deux ordres : l’ordre judiciaire et l’ordre administratif.
Il existe dans chacun de ces ordres de juridictions des juridictions de premier
degré.
Il s’agit des tribunaux administratifs (TA) pour l’ordre administratif et, dans
certains cas, le Conseil d’Etat lui-même (par exemple pour les recours contre les
actes réglementaires des ministres).
Pour l’ordre judiciaire, il s’agit des tribunaux judiciaires (TJ), mais aussi des
tribunaux de commerce, des conseils de prud’hommes, des tribunaux paritaires
des baux ruraux ou encore des juridictions pénales de premier degré (juge
d’instruction, juge des libertés et de la détention, tribunaux de police, tribunaux
correctionnels, cours d’assises, juge des enfants, tribunal pour enfants, cours
d’assises pour mineurs) et des juridictions spécialisées comme le tribunal
maritime.
Les cours d’appel sont les juridictions du second degré de l’ordre judiciaire avec
les cours d’assises d’appel, qui sont compétentes en matière criminelle.
Les cours d’appel administratives sont les juridictions du second degré de
l’ordre administratif.
Toutefois, dans quelques domaines, tel le contentieux des
élections municipales et cantonales ou en matière de référé-liberté, c’est le
Conseil d’Etat qui est juge d’appel.
Ces cours vont confirmer ou infirmer le jugement ou l’ordonnance rendu en
première instance.
Les recours contre les décisions rendues par ces juridictions du second degré et
contre celles rendues par les juridictions de première instance mais qui ne sont
pas susceptibles d’appel relèvent de la Cour de cassation en matière judiciaire et
du Conseil d’Etat en matière administrative.
Ces recours en cassation (qu’ils relèvent de la Cour de cassation ou du Conseil
d’Etat) ne peuvent concerner que des questions de droit et non de fait.
C’est la
raison pour laquelle la Cour de cassation et le Conseil d’Etat ne constituent pas
un troisième degré de juridiction.
Ces juridictions jugent uniquement du droit et
non du fait.
Elles peuvent notamment sanctionner la violation de la loi par les
juges du fond.
Elles le fond en prononçant la cassation de la décision attaquée
devant elles.
La Cour de cassation est divisée en six chambres :
- trois chambres civiles (la première, la deuxième et la troisième chambre
civile (Civ.
1ère, Civ.
2ème, Civ.
3ème) ;
- la chambre commerciale, financière et économique (généralement appelée
« chambre commerciale » (Com.) ;
- la chambre sociale (Soc.) ;
- et, enfin, la chambre criminelle (Crim.).
Deux formations solennelles peuvent également être réunies pour trancher
certains litiges :
- la chambre mixte.
Elle est réunie pour les affaires relevant de plusieurs
domaines du droit privé ou pour des litiges susceptibles de recevoir des
solutions différentes devant les diverses chambres.
Elle est composée de
magistrats appartenant aux diverses chambres concernées.
- L’Assemblée plénière (dite formation en « chambres réunies » jusqu’en
1967).
L’assemblée plénière de la Cour de cassation est obligatoirement
saisie lorsqu’après une cassation, la juridiction de renvoi (une cour
d’appel) ne suit pas la solution rendue par la chambre ayant prononcé la
cassation et qu’un nouveau pourvoi est formé.
Elle peut aussi être réunie
lorsqu’il existe des divergences de jurisprudence sur une question et que
celle-ci est enfin ou à nouveau posée à la Cour de cassation à l’occasion
d’un pourvoi.
L’assemblée plénière est composée du Premier président de la Cour de
cassation, des six présidents et des six doyens de chambre, ainsi que d'un
conseiller de chacune des six chambres, soit dix-neuf membres au total.
Pour boucler ce panorama de l’organisation juridictionnelle française, il
convient d’évoquer le Tribunal des conflits et le Conseil constitutionnel.
Le Tribunal des conflits est chargé de régler les conflits de compétence entre les
deux ordres de juridiction.
Le Conseil constitutionnel a, lui, pour mission de vérifier la constitutionnalité
des lois.
Ce contrôle est obligatoire pour les lois organiques et les modifications
des règlements des assemblées parlementaires.
Il n’est que facultatif pour les
lois ordinaires et les engagements internationaux.
Pour ce qui regarde les lois ordinaires, le Conseil constitutionnel doit être saisi
après le vote de la loi par le Parlement, mais avant la promulgation par le
Président de la République.
Pour ce qui regarde la constitutionnalité des traités,
le Conseil est saisi après la signature du traité, mais avant la ratification de celuici.
Cette saisine peut être réalisée par le Président de la République, le Premier
ministre ou le président de l'Assemblée nationale ou celui du Sénat.
Le Conseil
constitutionnel peut également être saisi par soixante sénateurs ou soixante
députés (article 61 de la Constitution).
Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui a introduit l’article
61-1 de la Constitution, un justiciable peut, à l'occasion d'une instance en cours
devant une juridiction, saisir le Conseil constitutionnel sur une disposition
législative « qui porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution
garantit ».
Cette saisine doit d’abord passer par le filtre du Conseil d'État ou de
la Cour de cassation.
Cette procédure est appelée « question prioritaire de
constitutionnalité », elle est encadrée par une loi organique dont les dispositions
sont entrées en vigueur le 1er mars 2010.
Le Conseil constitutionnel est également le juge du contentieux électoral en
matière d’élections présidentielles, d’élections parlementaires et de consultations
des citoyens par référendum.
A ces juridictions internes, il convient d’ajouter deux juridictions européennes
dont la jurisprudence a une grande importance en droit français :
- La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui siège à
Strasbourg et qui a pour vocation la protection des droits et libertés
fondamentales des personnes vivant dans un des 47 pays signataires de la
Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentale ;
- La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dont vous étudierez les
compétences et la jurisprudence lorsque vous étudierez le droit de l’union
européenne.
Il....
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