« Il n'y a qu'un pas du fanatisme à la barbarie. » Diderot, Essai sur le mérite et la vertu. Commentez cette citation ?
Publié le 16/05/2020
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« Il n'y a qu'un pas du fanatisme à la barbarie.
» Diderot, Essai sur le mérite et la vertu.
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Pour Diderot, l'extrémisme dans les idées conduit souvent à l'extrémisme dans les actes...
On sait que l'histoire n'estpas avare d'exemples d'un fanatisme religieux ou politique amenant vers la barbarie des guerres de religion ou descamps d'extermination.
Mais pour mieux comprendre la citation de Diderot tentons de mieux définir ce qu'est le fanatisme.
Originellement le fanatisme est un délire sacré, une sorte de transe extatique particulière aux cérémonies decertaines divinités.
De ce sens premier dérivent deux aspects qu'on retrouve dans toute attitude qu'on appellemétaphoriquement de ce nom.
Il y a d'une part cet aspect pathologiquement passionnel, cette absence dejugement et d'esprit critique qui fait proprement penser à la folie.
Et d'autre part l'étymologie du mot rappellel'indéniable côté mystique du fanatique qui est absolument convaincu de la valeur incomparable de sa foi.Commençons par une étude en quelque sorte extérieure du fanatisme qui le décrit dans son comportement.Considéré ainsi du dehors, il semble que le propre du fanatisme soit de ne pas savoir qu'il est fanatisme.
Il seprésente non pas comme une perspective possible parmi d'autres possibles sur le monde et sur les hommes, car ceserait s'avouer relatif et nier par là son essence même, il se donne comme certitude absolue.
Le fanatique est unhomme « engagé » au sens plein du mot, c'est-à-dire qu'il s'est enrôlé au service d'une cause qu'on ne sauraitdiscuter.
En d'autres termes, le fanatique se voue et se dévoue à une cause qui le dépasse.
Au point de départ dufanatisme, il y a toujours l'affirmation exclusive et impérieuse d'une transcendance par laquelle l'homme pose quelquechose au-delà de soi, idéal moral, politique ou social, mystique ou religieux.
La vertu du fanatique est le don de soi,l'oubli de soi au profit de cette cause qu'il entend servir.
Aussi la vie du fanatique compte-t-elle peu, ni non pluscelle de ses semblables au regard de la loi à laquelle il se soumet.
Son existence et celle des autres n'ont guère deprix, ou plutôt elles n'en ont pas par elles-mêmes, mais seulement par voie de conséquence, dans la mesure où ellespermettent ou non à l'Idée qui les anime de s'incarner dans le réel.Sans doute est-ce là aussi un des attraits qu'exerce sur autrui le comportement fanatique.
L'existence du fanatiquese fait remarquer par sa cohésion et son unité.
Le fanatique est l'homme d'une religion, d'un parti, plus généralementd'un groupe, et c'est par référence aux valeurs et aux normes reconnues par ce groupe auquel il a une fois pourtoutes adhéré qu'il organise sa vie.
D'où cette belle continuité et cette fidélité à soi-même sans défaillance qu'onobserve dans son existence.
Et logiquement, puisqu'il a érigé ces valeurs collectives en valeurs absolues, il se doitpar là même de soumettre l'humanité à sa propre idéologie.
Il se jette donc dans l'action.
Il faut aussi soulignercomment le fanatique associe à sa foi ardente, à son intransigeante idéologie, à son système de valeursimmuablement établi, un sens pratique, une opportunité vigilante pour saisir les conjonctures propices à la réalisationpartielle ou totale de ses fins, une obstination farouche pour surmonter les difficultés et les obstacles.
Cette volontéd'aboutir trahit l'impatience d'un être pour qui l'urgence de l'action est essentielle et qui ne consent à des « pauses» à court terme que pour en accroître l'efficacité à moyen ou long terme.
En ce sens, le fanatisme peut facilement sombre dans la barbarie, cad l'inhumanité au nom d'une véritédogmatiquement affirmée..
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