Honeste vivere

« Honeste vivere Vivre honorablement Il ne s'agit pas d'un simple principe moral, mais plutôt de l'expression d'un idéal plus éthique que juridique, qui faisait partie avec Alterum 110n laedere (n.

939) et Suum cuique tribuere (n.

940) des trois prin- cipes fondamentaux du droit romain (désignés par antonomase par iuris praecepta).

Ces principes sont attribués à Ulpien (Digeste, I, l, 1) et réaffi111,~s notamment par Gilbert Foliot (Ep ..

Pl I 90, 792c) ; Bonaventure ( Collationes in Hexaemeron, l, 2, 21) et Raymond Lulle (Ars brevis, 6, 280), mais les chercheurs ignorent si l'origine de cette fo1111ule est antique, ou s'il s'agit d'une glose plus tardive datant de l'époque médiévale et byzantine.

Si c'est avec la culture chrétienne que l'adjectif honeslus prit le sens d'honnête et non d'honorable (le deco­ rum, principalement économique, est par contre prévalent dans certains passages des Controversiae de Sénèque le Rhéteur (7, 1, 6]), il faut rap­ peler que pour Cicéron (De flnibus, 4, 11, 26) l'honesle vivere était synonyme de souverain bient car c'était vivre e virtute vel naturae congruenter ( cf.

encore De fini bus, 4, 16, 43 ).

L'insistance sur cet aspect, interprété dans un sens chrétien, est notamment sensible chez plusieurs auteurs : cf.

saint Augustin, De libero arbitrio, l, 13, 29; Ena"ationes in Psalmos, PL 39, 888 ; Contra philosophos, 3 ; Alcuin, Ep., Pl 100, 168ab; 403b; Pierre Damien, Ep., PL 144, 394b; Hildegarde de Bingen, libri divinorum operum, 3, 5, 26 ; Albertano de Brescia, De amore et dilectione, 4, 1 ; le traité anonyme De vitiis et vir­ tutibus, 1 ; et surtout saint Augustin, Confessions, 1, 19, 30, où l"auteur, faisant son auto-critique; constatait que, lorsqu'il était jeune, > revenait pour lui à plaire aux autres (plus tard, bien sûr, Augustin comprit qu'il fallait vivre en obéissant à une honestas tout intérieure et plus morale) ; une définition de Raymond Lulle (Liber de universalibus, 604 ), qui précisait qu 'Honeste vivere était le principe qui commandait de suivre la vertu et d'éviter les péchés, principium ad utendum virtulibus et vilia vitanda ; et une sentence citée par Pelbart de Temesvar (Pomerium de Sanctis.

Pars aestivalis,, 54, 3) qui proclame que la loi c'est l'art de vivre honnêtemen~ en écoutant sa conscience, est ars honeste vivendi.

ligans hominem ad sui ohservantiam.

Mais honeste vivere peut aussi prendre le sens de vivre honorablement en respectant certains usages, notamment chez Grégoire VII, PL 148, 422b; Guillaume le Conquérant, Leges, PL 149.

1342c; Innocent III, Regesta, 376 (Pl 214, 356c).

Ce principe est repris dans la Confessio Augustana (33), où il devient une caractéristique des philosophes, qui ne sont cependant pas parvenus à vivre sans commettre d'ignobles délits.

L'adage est utilisé en héraldique et on le retrouve sur le blason de la famille des Addison : Addecet honeste vivere.

Pour une bibliogra­ phie juridique sur les trois principes d'Ulpien, cf.

Liebs J 177.. »