Hans Hartung

« Né à Leipzig en 1904, Hans Hartung étudia à Dresde et à Munich, s'intéressant non seulement à l'art, mais aussi à la musique.

A u cours de ses années deformation, il subit l'influence des maîtres allemands de l'expressionnisme, tandis qu'à partir de 1922 il commença à peindre des aquarelles à sujet abstrait,sous l'influence des premières expérimentations de Kandinsky.

Entre 1926 et 1932, il séjourna à Paris où il eut l'occasion d'entrer en contact avec lesreprésentants de l'abstraction et de l'avant-garde.

Parmi ses oeuvres abstraites exécutées au cours de ces mêmes années, signalons le tableau T .

1935-1,au Musée National d'Art Moderne de P aris.

Ses conditions économiques précaires obligeaient Hartung à se consacrer surtout aux dessins à l'encre surpapier, car il ne pouvait pas se permettre de travailler sur toile.

Il aboutit progressivement à un langage personnel, basé sur la liberté expressive des gestesd'où jaillissent signes et formes en évolution constante.

Ces expériences, basées sur l'improvisation et sur l'automatisme des gestes, se révélèrentfondamentales pour l'essor de l'"action painting".Les tableaux exécutés après la Deuxième Guerre mondiale sont caractérisés par des formes plus statiques et des tonalités plus sereines.

Parmi sesnombreuses oeuvres, qui comprennent également des gravures et des lithographies, rappelons Painting (Museum of Modern A rt, New York) et T.

1963-R6(1963, Tate Gallery, Londres).Hans Hartung Né à Leipzig, A llemagne, Hans Hartung fit d'abord une singulière aventure.

Sur ses feuilles de cahier de lycéen, depuis l'âge de seize ans, il s'exerçait àinterpréter les Rembrandt du musée de Dresde, les Hals, les Greco.

P uis la découverte de Kokoschka, Nolde et Franz Marc, lui apprit à déformer les figurespour en renforcer l'expression.

Pour ces interprétations, il procédait par taches.

C es taches devinrent de moins en moins figuratives et, en 1921-1922, ilexécuta ses premières aquarelles abstraites, aquarelles que l'on appellerait aujourd'hui tachistes.

En 1924, l'année de son bachot, il réalisa pendant lestrois jours de congé de Noël une suite de dessins à la craie noire où le dynamisme était régi par la vitesse d'exécution.

L'année suivante, il devait faire unerencontre qui marqua la fin de cette enthousiasmante aventure solitaire. "En 1925, dit-il, j'avais vingt et un ans.

J'ai entendu une conférence à Leipzig du professeur Kandinsky, homme très intelligent et important, qui parlait avecbeaucoup de compétence et de sérieux de l'art abstrait.

Ma première impression, alors, fut à la fois une violente déception et un sentiment rassurant.

Jem'explique : j'étais d'un côté très vexé de ne pas être seul à m'exprimer par des moyens purement abstraits, comme je l'avais cru ; d'un autre côté j'étaisheureux de trouver une sorte de confirmation à mes recherches et ceci bien que j'aie immédiatement éprouvé le sentiment que la voie artistique indiquée parKandinsky, le constructivisme déjà, n'était pas du tout celle que je suivrais moi-même, alors que je m'étais senti très proche des grandes improvisationslyriques de sa période abstraite qu'il nous avait montrées à l'aide de projections au début de sa conférence." En 1925-1927, Hartung avait déjà presque défini l'archétype de son graphisme.

Mais son père l'ayant obligé à suivre des cours à l'A cadémie de Leipzig, deDresde et de Munich, il dut revenir à une période figurative.

Ensuite, au contact de Paris, il connut une période cubiste qu'il abandonna vite, répugnant austatique.

Lorsque, de 1932 à 1934, il alla vivre et travailler à Minorque, en compagnie de sa jeune femme, il lui suffit de se souvenir de ses dessins delycéen pour que la maturité artistique soit déjà chez lui éclatante.

Une toile de 1934, qui se présente comme une surface bleue unie sur laquelle une largetache et un graphisme "en gribouillis" viennent s'opposer dans un contrepoint dynamique, marque l'essentiel de l'art "classique" de Hartung. Pourtant, et même lorsqu'il abandonna définitivement l'A llemagne en 1935, pour se fixer à Paris, Hartung demeura inconnu.

C 'est que son oeuvre, pourtantparfaitement définie, est absolument inattendue, même pour les milieux d'avant-garde.

L'art abstrait était alors avant tout un art de contrainte.

Il tendaitdepuis le Bauhaus à bifurquer vers le social (arts appliqués, architecture, spectacle).

L'oeuvre de Hartung, par contre, se présentait comme parfaitement"inutile", gratuite et d'une absolue liberté d'exécution.

Elle montrait cette singularité alors inouïe, de n'être ni représentative, ni abstraite géométrique.

Sonabstraction, toute nouvelle, et que l'on qualifiera plus tard d'abstraction lyrique, tenait avant tout dans le rythme, dans la ligne développée dans un espaceabstrait, dans une poétique dynamique née par la seule vertu de la tache et du signe. Sans doute un art aussi fort et aussi singulier serait-il venu plus tôt à la connaissance du public si la guerre de 1939-1945 n'avait pas été pour HansHartung six années mortes pour la peinture.

Sujet allemand, il s'engage en 1939 dans la Légion étrangère. Démobilisé en 1940, il passe en Espagne, est emprisonné pendant sept mois, puis réengagé dans la Légion au M aroc.

Il participe au débarquement enMéditerranée et est blessé grièvement devant Belfort.

Amputé d'une jambe, il obtient la nationalité française en 1946. Revenu à Paris, il participe alors à ce que l'on pourrait appeler les années héroïques de la nouvelle aventure de l'art abstrait.

Et tout de suite, dans le petitmilieu de connaisseurs, il apparut comme un maître.

Mais il fallut encore attendre dix ans pour que cette renommée franchisse les limites d'un petit cercled'admirateurs.

L'exposition de dessins de 1921 à 1938, Galerie Graven en 1956, les expositions de peintures et de pastels à la Galerie de France en 1956,1959, 1961 et 1963, le grand prix de la Biennale de V enise en 1960, autant d'étapes qui menèrent Hartung vers la gloire internationale.

En 1980, unerétrospective sur son oeuvre de 1922 à 1939 a été organisée au Musée d'Art moderne de la ville de Paris. On a comparé la linuosité de Hartung à la calligraphie sino-japonaise.

M ais l'art de Hartung diffère radicalement de la calligraphie extrême-orientale en ceque son trait est plus appuyé, gravé même parfois dans la pâte.

S'il est léger, aérien, en d'autres cas il n'en reste pas moins assez dur et ne tombe jamaisdans le décoratif des idéogrammes.

C'est un trait qui, parfois, "fait mal", comme une blessure. L'une des caractéristiques de l'oeuvre de Hartung est l'opposition des formes-signes à des fonds unis.

Du moins depuis qu'il a renoncé au tachisme de sesdébuts.

Dans le cycle de sa période peinte allant de 1955 à 1959, il a poussé au maximum le rythme dynamique des lignes, devenues plutôt des sortes de"touffes" ou de "gerbes", sur une surface volontairement amorphe.

P uis il est resté deux ans sans peindre, dessinant par contre beaucoup.

Les pastels decette période forment même un véritable inventaire anthologique de ses formes de prédilection.

Sa manière plus récente se distingue par une très grandepart donnée à l'improvisation.

La peinture n'y est plus posée, mais grattée dans la pâte fraîche.

La couleur joue un rôle important, souvent voisin duchromatisme de l'époque de Minorque. Tachiste, linéaire, peintre d'action, lyrique, dynamique, Hartung, qui a beaucoup exploré dans ce monde des signes où l'inconscient et le réfléchi seconjuguent, n'a jamais été séduit par la matière et l'empâtement.

Il a toujours eu un goût de la propreté, ne se laissant jamais aller aux éclaboussures etaux coulées de peinture, comme le feront la plupart de ses émules.

Ses couleurs de prédilection sont les verts clairs, les bruns, les jaunes citron, le bleu, lenoir. Est-il utile de souligner que Hans Hartung a été l'un des plus grands dessinateurs contemporains ? Ses pastels, à eux seuls, constituent une oeuvreexemplaire.

Quant à son oeuvre gravée, elle comprend une quarantaine de pointes sèches et d'eaux-fortes.

Ses lithographies, au nombre de quatre-vingts,ont été exécutées en 1946-1947, puis en 1952-1953, enfin en 1957-1958.

Dans les années 60 et plus, il a également pratiqué la photo, souvent enpréparation de ses peintures ; ces photographies ont été exposées pour la première fois en 1977, à A rras. Du temps où il travaillait dans l'atelier du sculpteur Gonzalès, pour lequel il conserve une grande admiration, il a réalisé une sculpture qui est une sorte decurieuse projection spatiale, à trois dimensions, de ses peintures.

Une autre sculpture est restée inachevée. Devenue l'un des phares de l'art contemporain, l'oeuvre de Hartung a été d'une importance capitale.

Q u'il ait exercé une influence est trop peu dire.

Sonimportance tient en fait en ce qu'il a ouvert un nouveau chemin à la peinture et que ses disciples sont légion.. »