Guillaume le Taciturne1533-1584Guillaume de Nassau, le Taiseux ou le Taciturne, fut le produit très pur d'une grandetradition politique et du meilleur humanisme.
Publié le 23/05/2020
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Guillaume le Taciturne
1533-1584
Guillaume de Nassau, le Taiseux ou le Taciturne, fut le produit très pur d'une grande
tradition politique et du meilleur humanisme.
Au XVIe siècle et dans les Pays-Bas.
Sur les plaines basses de l'Europe médiane, entre Escaut et Rhin, des habitudes de liberté
s'étaient prises très tôt.
Là, l'Empire romain avait jadis assigné à ses légions la protection
des frontières face aux Germains.
Là, un peu plus tard, la civilisation bourguignonne s'était
épanouie, unissant la clarté latine aux pénombres germaniques.
Le théâtre des
affrontements était devenu celui des échanges.
La prospérité des villes avait été source de
liberté.
Et de siècle en siècle les puissances urbaines avaient arraché à leurs seigneurs des
franchises citadines et des privilèges provinciaux : la charte de Cortenberg en 1312, la
Joyeuse Entrée de Brabant en 1316, tant d'autres encore.
C'est sur ce terroir des libertés que Guillaume, dès l'âge de onze ans, fut élevé sur les
instructions attentives de Charles Quint.
L'enfant pourtant était né allemand, sur la rive
droite du Rhin, dans le comté de Nassau, à Dillenbourg, en 1533.
Or l'usage voulait, dans
cette famille, que fussent laissés à la branche cadette les domaines de la souche
germanique, tandis que l'aînée jouait de prestige dans l'État bourguignon, en Hollande et
au Brabant.
Guillaume pour sa part aurait été voué à la gestion du domaine de
Dillenbourg, si la branche aînée ne s'était pas prématurément éteinte.
Héritier de son oncle
Henri de Nassau-Bréda et de sa tante de Chalon-Orange, tous deux de fortune
bourguignonne, Guillaume de Nassau, désormais comte de Nassau et prince d'Orange,
était devenu pour Charles Quint un personnage de première importance.
De cet enfant
élevé par ses parents avec simplicité dans la religion de Mélanchthon, l'empereur entendait
faire un catholique et un parfait Bourguignon.
Il fallait qu'il fût aimé des peuples,
frondeurs mais sensibles, de par-decà et qu'il fût capable lui-même de comprendre chez
ceux-ci les susceptibilités politiques autant que les aptitudes affectives.
Le jeune homme, qui débordait d'intelligence et de générosité, combla les espérances de
son protecteur.
Par son aménité, sa distinction, l'égalité de son humain comportement à
l'égard “ des puissants et des non-puissants ”, des pauvres et des riches, il fut
d'enthousiasme adopté par le commun peuple.
Charles Quint et sa s œ ur Marie de Hongrie
en firent à vingt-deux ans le général en chef de l'armée bourguignonne, jusqu'au jour
solennel de l'abdication, où l'empereur lui témoigna sa faveur avec éclat en prenant appui
sur son épaule pour traverser la salle des États généraux.
Philippe II ménagea ce fils spirituel de son père, ne l'aima pas et s'en méfia.
Jalousie,
incompatibilité d'humeur, sans doute.
Mais plutôt divergences radicales de conceptions.
Le duel de ces deux hommes, qui allait dominer la politique européenne au milieu du
XVIe siècle, ne fut pas inspiré par de mesquines considérations.
Ce fut un impressionnant
affrontement sur un thème éternel : celui des rapports de la personne humaine et de l'État
public.
Comme il arrive souvent, la question ne se trouva pas d'emblée posée en termes
aussi directs, mais dans le tumulte d'événements confus.
Et sans doute l'historien aurait-il
eu du mal à déceler ce dessein, si le génie de l'homme d'État n'avait pas consisté
précisément à faire saillir les principes de l'ivraie..
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