Grand ORAL HGGSP UNE SOCIÉTÉ MÉRITOCRATIQUE EST -ELLE JUSTE ET ÉGALITAIRE ?
Publié le 03/06/2024
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idée 2
UNE SOCIÉTÉ MÉRITOCRATIQUE EST -ELLE JUSTE ET ÉGALITAIRE ?
INTRODUCTION
sociétés démocratiques contemporaines =marquée de référence au mérite.
—>« mérite » place particulière après l’effondrement du bloc soviétique et la victoire du capitalisme libéral sur son
adversaire = déclarait faire de l’égalité réelle son objectif politique :
—> « à chacun selon ses besoins », proclamaient Marx et Engel dans Le Manifeste du Parti communiste (1848).
plupart des pays développés=l’économie de marché, —>la notion de mérite place particulière car =un lien entre
idéologie du mérite et fonctionnement du marché.
Un marché concurrentiel agents =« price-takers » : les consommateurs ne fixent pas le prix des produits et les
entreprises non plus.
Dès lors une entreprise —> vend un produit identique à un prix > à ses concurrents = si elle vend à un prix identique
mais en incorporant moins de technologie que ses concurrents
= éliminée du marché.
—>entreprises les plus efficaces, autrement dit les plus méritantes qui survivent.
Ce qui est vrai des entreprises est
vrai des travailleurs —> les plus qualifiés (les plus « méritants ») obtiennent de meilleurs salaires
—>moins qualifiés sont relégués aux emplois moins prestigieux, moins bien rémunérés et plus susceptibles d’être
licenciés.
On voit bien que le mérite sous-tend tout le fonctionnement des lois de l’offre et de la demande.
la définition de la notion de mérite =complexe.
—>dépend d’un système de valeurs historiquement et socialement situées.
=jugé méritoire diffère d’une société à l’autre, d’un groupe social à l’autre.
EX :ici, c’est le courage ; là, l’intégrité, l’intellect ou encore la résilience.
« méritocratie » littéralement = « le pouvoir aux plus méritants » = être questionné.
2 types de questions peuvent être posées : quel(s) critère(s) doit-on adopter pour juger, dans une société
contemporaine, de ce qui est méritoire ? On voit bien le caractère normatif de la question
D’autre part, une société reposant sur le mérite serait-elle juste ?
Nous verrons dans une première partie que les sociétés démocratiques capitalistes —> la productivité comme critère
de mérite déterminant (I a) ; cependant, ce critère pose des problèmes (I b) ; de fait, certaines sociétés, et en
particulier la société française, ont intégré d’autres critères (I c).
Dans une seconde partie nous verrons que si la méritocratie = nécessaire à la justice sociale (II a), —>=pas suffisante
(II b)—>= poussée à l’extrême, se révéler nuisible (II c).
I.
Quel critère pour juger méritoire une situation ?
A.
Le rôle prépondérant de la productivité, un critère économique
En économie, la productivité = l’efficacité d’un facteur de production.
On peut l’employer pour tout agent ou entité économique, mesure souvent par un rapport : la richesse obtenue (la
valeur ajoutée) rapportée aux moyens mis en œuvre (quantité monétaire de facteurs).
Les sociétés à économie de marché = grande place à la concurrence et ainsi récompensent fortement les agents les
plus efficaces, c’est-à-dire les plus productifs.
EX: Ainsi, les stars du football ou de la chanson peuvent toucher des revenus exponentiels car la demande pour leurs
productions est très forte ;
—>la montée des réseaux sociaux et des moyens de communication rapide renforce fortement la potentielle demande
.
—>90 minutes de temps, vingt-deux footballeurs =des millions d’euros de valeur ajoutée
—> salaire sera bien plus élevé que celui d’un boulanger, par exemple, qui en 90 minutes de temps ne peut pas
atteindre un tel chiffre d’affaires.
Dans le secteur proprement économique, la financiarisation de l’économie accroit aussi les perspectives de gains car
un entrepreneur (au sens schumpetérien du terme) qui a une bonne idée —>facilement la financer + empocher
ensuite un surprofit considérable via la croissance de la valeur boursière de son entreprise
=une mauvaise idée ne sera pas financée et si elle l’est la valeur de l’action finira par baisser : ainsi le marché
récompense les plus méritants et punit les moins méritants.
EX: l’entreprise chimique Thiokol qui avait fabriqué le joint défectueux (« O-ring ») ayant conduit à l’explosion de la
navette Challenger en 1986 : le cours de son action en bourse avait chuté de 15% le jour même.
B.
La productivité n’explique pas tout
Le critère de productivité, = pas suffisant.
En effet la productivité —> se mesure mal = le secteur non marchand, qui occupe
cependant une part significative de la production dans la plupart des pays développés
(entre 15 et 40%).
On peut prendre de nombreux exemples, allant des juges aux
policiers en passant par les infirmières ou les enseignants.
Comment mesurer la
productivité de ces emplois ? Comment mesurer le mérite de ces employés ?
Généralement, une combinaison de critères est mise en œuvre : évaluation par la
hiérarchie et/ou par une autorité indépendante comme l’inspecteur dans le cas des
enseignants, indicateurs statistiques (taux d’élucidation des enquêtes pour les
policiers par exemple).
Cependant, ces indicateurs composites ne peuvent pas être
résumés en une formule simple, ce qui a conduit les comptables nationaux à mesurer
la valeur de la production non marchande au prix où elle est fabriquée.
La productivité
d’un enseignant est donc par défaut évaluée à son salaire : comme le salaire repose
sur le concours obtenu et l’ancienneté, une telle mesure fait dès lors l’hypothèse
(relativement raisonnable ?) qu’un agrégé avec 30 ans d’expérience est meilleur
professeur qu’un vacataire débutant, qu’il est plus « méritant ».
Ce qui est vrai des emplois non marchands est vrai de certains emplois marchands qui
ne se prêtent pas tous à une évaluation simple de leur productivité : autant la
productivité d’un agriculteur est très simple à mesurer, autant celle d’un agent
d’entretien est plus complexe.
De plus, la production se fait dans des organisations
collectives, ce qui rend d’autant plus délicat l’attribution d’une productivité
individuelle.
Alors que les salaires sont individuels et les primes au mérite sont
individualisés, c’est pourtant l’effort collectif, et la synergie permise par cette
agrégation qui rend possible la productivité, particulièrement dans les industries
modernes où la division du travail est extrême, autorisant d’importantes économies
d’échelles.
Dès le XIXème siècle l’anarchiste Bakounine contestait déjà les
rémunérations individuelles, estimant que si les chefs d’entreprise payaient bien la
part individuelle de chaque salarié, ils ne rémunéraient pas la synergie collective,
pourtant au cœur de l’efficacité de l’entreprise.
Pour reprendre l’exemple des stars de
la chanson ou du football, leur productivité exceptionnelle ne se réalise qu’à la
condition d’avoir des réseaux de communication performants, à commence par un
réseau de transport pour se rendre au stade, des agents de sécurité, une production
d’énergie efficace, une formation qui leur permet d’atteindre ce niveau de
compétences, etc.
Tout cela nécessite un concours de compétences variées : des
organisations publiques et privées, un système de règles efficace, des infrastructures
de qualité, etc.
Cette interdépendance très forte des individus dans les sociétés
modernes avait été particulièrement remarquée par Emile Durkheim (De la division du
travail social, 1893) au tournant du siècle : il appelait « organique » cette solidarité
qui résulte de la complémentarité, par analogie avec les organes du corps.
Une telle
solidarité indispensable au fonctionnement des sociétés complexes interdit de tirer des
conclusions trop simples sur les productivités individuelles.
C’est par commodité que
les rémunérations sont individualisées mais cela ne signifie pas forcément que les
productivités le sont, ni qu’elles sont en rapport direct et immédiat avec les
rémunérations.
C.
Des critères sociopolitiques ou moraux sont aussi mis en œuvre
pour évaluer le mérite
La France est un pays capitaliste qui fait une large part au marché.
Cependant, le
poids de son secteur non marchand (30% du PIB) a développé, en particulier depuis
les Trente Glorieuses, d’autres logiques que celle de la productivité.
En France, l’accès
à de nombreux postes à responsabilités dans la fonction publique nécessite de passer
et de réussir un concours.
On peut parler d’une « méritocratie républicaine », le
pouvoir n’étant pas ici économique (comme dans le cas de la productivité) mais plutôt
socio-politique.
Ainsi, des écoles comme l’ENA permettent à des individus d’accéder
aux plus hautes fonctions publiques après un concours très sélectif.
Le critère qui juge
ici le mérite n’est pas la productivité (efficacité économique) mais plutôt la quantité
d’efforts ou de connaissances accumulés par le candidat.
On considère que tous les
candidats sont placés à égalité (ils passent le concours dans les mêmes conditions et
sont jugés sur les mêmes critères) ce qui signifie dès lors que les plus méritants (ceux
qui ont le plus ou le mieux travaillé) l’emportent.
On retrouve cette méritocratie
républicaine dans des institutions telles que le baccalauréat, créé en 1808 par
Napoléon précisément pour sélectionner les élites de l’Empire, donc donner, au sens
quasiment littéral du terme, « le pouvoir aux plus méritants ».
D’autre part, on peut être méritant selon des ordres très différents de ceux de
l’économie ou des concours républicains.
Que dire d’un jeune malien qui sauve un
enfant suspendu à un balcon ? Nul ne contestera son mérite, qui cependant n’est pas
dans l’ordre des revenus ou du diplôme.
Le mérite de M.
Gassama est d’avoir réagi de
façon exemplaire à une situation de....
»
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