Giraudoux, Suzanne et le Pacifique. Commentaire
Publié le 19/12/2021
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«
Giraudoux, Suzanne et le Pacifique .
Nouveau Robinson, Suzanne se retrouve, après un naufrage, sur une île déserte,
elle y découvre des objets abandonnés par un marin allemand échoué là avant elle : parmi
ceux ci, un exemplaire de Robinson Crusoé, dans la lecture duquel elle se plonge aussitôt .
Ce puritain accablé de raison, avec la certitude qu'il était l'unique jouet de la
Providence, ne se confiait pas à elle une seule minute.
À chaque instant pendant dix-huit
années, comme s'il était toujours sur son radeau, il attachait des ficelles, il sciait des pieux,
il clouait des planches.
Cet homme hardi frissonnait de peur sans arrêt, et n'osa qu'au bout
de treize ans reconnaître toute son île.
Ce marin qui voyait de son promontoire à l' œil nu
les brumes d'un continent, alors que j'avais nagé au bout de quelques mois dans tout
l'archipel, jamais n'eut l'idée de partir vers lui.
Maladroit, creusant des bateaux au centre
de l'île, marchant toujours sur l'équateur avec des ombrelles comme un fil de fer.
Méticuleux, connaissant le nom de tous les plus inutiles objets d'Europe, et n'ayant de
cesse qu'il n'eût appris tous les métiers.
Il lui fallait une table pour manger, une chaise
pour écrire, des brouettes, dix espèces de paniers (et il désespéra de ne pouvoir réussir la
onzième), plus de filets à provisions que n'en veut une ménagère les jours de marché, trois
genres de faucilles et faux, et un crible, et des roues à repasser, et une herse, et un
mortier, et un tamis.
Et des jarres, carrées, ovales et rondes, et des écuelles et un miroir,
et toutes les casseroles.
Encombrant déjà sa pauvre île, comme sa nation plus tard allait
faire le monde, de pacotille et de fer-blanc.
Le livre était plein de gravures, pas une qui me
le montrât au repos : c'était Robinson bêchant, ou cousant, ou préparant onze fusils dans
un mur à meurtrières, disposant un mannequin pour effrayer les oiseaux.
Toujours agité,
non comme s'il était séparé des humains, mais comme s'il était brouillé avec eux, et ne
connaissant aucun des deux périls de la solitude, le suicide et la folie.
Le seul homme peut-
être, tant je le trouvais tatillon et superstitieux, que je n'aurais pas aimé rencontrer dans
une île.
Suzanne et le Pacifique : robinsonnade.
Robinson Crusoe de Defoe a beaucoup inspiré : au XIXe => la robinsonnade est un genre
très prolifique et chaque auteur aime à placer son ou ses héros dans une situation proche
de celle de leur ancêtre Robinson.
Ex : Le Robinson Suisse du pasteur Wyss, un Robinson russe, une Robinsonnette par
Granström ou par Giraudoux cf.
Suzanne dans Suzanne et le Pacifique , des Robinsons
italiens par Emilio Salgari, une École des Robinsons de Jules Verne etc.
Cf.
aussi Vendredi.
»
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