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Genet, Jean.

Publié le 06/12/2021

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Genet, Jean.
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PRÉSENTATION

Genet, Jean (1910-1986), écrivain français qui, dans son oeuvre romanesque et théâtrale, met en scène sa fascination provocante pour le mal et pour la mort.

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L'ENFANT CRIMINEL

Né à Paris, Jean Genet voit ses premières années marquées du sceau de l'abandon et de l'abjection. Enfant de l'Assistance publique, abandonné par sa mère, ignorant l'identité de son père, il est placé chez des paysans du Morvan. À dix ans, accusé
de vol, il est envoyé en maison de correction : c'est le début d'une existence marquée par la délinquance, où alternent les périodes de liberté, de vagabondages (Marseille, Barcelone, Tanger, la Yougoslavie, la Pologne...), de vols et de prostitution, et
les périodes d'emprisonnement. Il commence à écrire en prison, avec un poème en alexandrins, le Condamné à mort (1942), chant d'amour destiné à son ami Maurice Pilorge, guillotiné en 1939.

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VOLEUR ET ÉCRIVAIN

Genet écrit beaucoup dans les années qui suivent, notamment des romans, qui lui valent la reconnaissance des milieux littéraires : en 1948, c'est la protection de personnalités importantes, parmi lesquelles Cocteau et Sartre, qui lui évite la relégation
perpétuelle. Jean Genet ne cesse pas pour autant de se considérer comme criminel, comme paria ; au contraire, il fait de ce renversement des normes sociales et morales le sens de son inscription dans la littérature, comme dans le monde. En 1949,
le Journal d'un voleur évoque et continue de provoquer cette assomption du jeune voyou en écrivain. Genet, entré dans le champ dramatique, avec Haute surveillance (publié et représenté en 1949) et les Bonnes, se consacre essentiellement au
théâtre jusqu'en 1966 (Lettres à Roger Blin). Par la suite, il se détourne de la littérature et du monde occidental, et prend parti pour les mouvements de révolte des peuples marginaux, fiers et opprimés : celui des Black Panthers aux États-Unis, ou
celui des Palestiniens, qu'il évoque dans Quatre heures à Chatila (1982). Il meurt à Paris en avril 1986.

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DES ROMANS COMME DES ABÎMES

L'oeuvre romanesque de Genet se nourrit de son expérience, qu'il poétise et amplifie, pour faire du mal une royauté secrète et inaliénable. La prison, le crime, la trahison y apparaissent comme les stigmates de cette gloire revendiquée des criminels,
liés les uns aux autres par une fraternité violente, par une érotique méprisant les codes moraux. Notre-Dame-des-Fleurs (écrit à la prison de Fresnes, publié en 1944), Miracle de la Rose (1946), Pompes funèbres (1947) tiennent ainsi à la fois du récit
autobiographique et du roman poétique : écrits dans une langue extrêmement raffinée, qui mêle à des accents précieux une brutalité triviale, ils imposent la gloire de l'abjection en réponse à l'inhumanité du monde. Querelle de Brest (1947), où le
port de guerre brestois sert de cadre à la représentation de la fascination érotique pour les criminels, a été adapté au cinéma par Fassbinder en 1981 (Querelle).

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DRAMATURGIE DE LA SACRALITÉ

Le théâtre de Genet, surtout, s'est imposé comme une décisive mise en cause des conventions dramaturgiques occidentales, renversant la hiérarchie des rapports de l'art et du monde. Il s'appuie sur l'évocation de marginalités sociales, politiques ou
sexuelles. Les Bonnes (1947) s'apparente à une représentation de la domesticité ; Haute Surveillance (1949) témoigne de la condition des prisonniers de droit commun ; le Balcon a pour cadre un bordel ; les Nègres (publié et représenté en 1959) et
les Paravents (1961) semblent une protestation contre le racisme et le colonialisme. Mais il s'agit surtout d'une dramaturgie de la provocation, dans tous les sens du terme : volonté de heurter les conventions esthétiques et morales, en se faisant
l'apologiste du crime, en sanctifiant le mal, en sublimant les personnages de putains et d'assassins, mais surtout, au-delà, appel du monde à comparaître devant le tribunal d'une conscience blessée, d'une solitude féroce, en une célébration presque
liturgique du sang et de la chair.

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« ET QU'UN MORT DANSE SUR LE FIL «

Très loin de toute mimésis, ce théâtre se veut une fête outrancière des masques et de l'illusion, qui manifeste la réversibilité des codes d'appréhension du réel, et devienne la transfiguration allégorique des mensonges du monde. L'espace scénique
devient le lieu d'une formidable messe noire, où se travestissent et s'inversent les liens du bien et du mal, de la vie et de la mort. C'est un théâtre paroxystique, qui sacrifie au monde des morts. L'oeuvre critique de Sartre ( Saint Genet, comédien et
martyr, 1952), et les mises en scène de Louis Jouvet, de Roger Blin, de Patrice Chéreau, ont manifesté le caractère blasphématoire de cette écriture, et célébré l'importance de cette oeuvre étrange et marginale.
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