Franz Schubert
Publié le 16/05/2020
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Franz Schubert
"Que faire après Beethoven ?" Ces mots, si souvent soupirés par Schubert, résument tout le problème qu'il eut àrésoudre dans son Oeuvre.
Après les premiers tâtonnements, son activité tout entière se trouva placée sous cesigne apparemment funeste.
Mais cette terrible hypothèque, qui pesa sur Schubert sa vie durant, s'avéra par lasuite particulièrement heureuse : elle le contraignit en effet à se consacrer avec le maximum d'intensité à undomaine auquel Beethoven n'avait prêté que peu d'attention, celui du lied.
Et c'est là que Schubert donna sesOeuvres les plus profondes et les plus originales, si remarquable que soit par ailleurs ce qu'il a fait dans la plupartdes autres genres.
C'est avant tout comme le créateur privilégié du lied que Schubert demeure immortel.
Le début de la vie de Schubert coïncide avec une période politiquement fort troublée.
Il naquit dans un faubourg deVienne, le 31 janvier 1797, douzième enfant d'un pauvre maître d'école primaire ; c'était l'époque où la monarchiebicéphale austro-hongroise se débattait au milieu de guerres malheureuses contre la France de la Révolution.
Lejeune garçon vécut deux occupations de Vienne par les armées napoléoniennes, sans parler des bombardements,des contributions et de la famine.
Adolescent, il vit la chute du grand Corse et les journées brillantes du Congrès deVienne.
Lorsqu'il mourut, le 19 novembre 1828, âgé de trente et un ans, l'Europe jouissait de la paix dictée par laSainte Alliance, paix factice brusquement interrompue un an et demi plus tard à Paris par la Révolution de Juillet.
Tous ces événements historiques n'eurent cependant aucune répercussion sur l'Oeuvre ni sur la vie de Schubert.
Ilne fut jamais un enfant prodige.
Ce n'est qu'à huit ans que son père lui enseigna les premiers éléments du violon ;puis son frère aîné Ignace entreprit de lui donner des leçons de piano, mais le jeune garçon déclara au bout dequelques mois qu'il en savait assez pour continuer seul l'étude de cet instrument.
Son père l'envoya alors chez sonami Michel Holzer, directeur de chapelle et compositeur, afin qu'il développât sa jolie voix de soprano.
Il y apprit lesolfège comme en se jouant et montra en outre de telles aptitudes dans l'art d'improviser sur le piano et sur l'orgueque son maître, ravi, s'écria un jour : "Il a le sens inné de l'harmonie".
Ce fut aussi l'opinion du professeur deSchubert au "séminaire", lorsqu'il déclara, dès la seconde leçon : "Que pourrais-je encore enseigner à qui a reçu lesdons du ciel !"
"Le séminaire" était une institution impériale, un internat où de pauvres étudiants et des jeunes gens doués pour lechant recevaient, outre l'enseignement des "humanités", une excellente instruction musicale.
Ils avaient par contrel'obligation de chanter à la chapelle de la Cour et lors de certaines manifestations musicales.
Les cinq années que Schubert passa au séminaire, de 1808 à 1813, ont été pour lui de la plus haute importance.
Laculture générale qu'il y acquit lui permit d'atteindre plus tard à ce degré de spiritualité si profondément émouvantequi émane de ses lieder, et que l'on retrouve jusque dans sa vie privée, tout empreinte d'un idéal élevé.
Il lui devaitaussi ses inspirations musicales si tendrement élégiaques ; car on ne se contentait pas au séminaire de donner àl'enseignement musical la première place, mais un orchestre, formé par les élèves, procédait chaque soir à desrépétitions et des concerts.
Schubert y prit part d'abord comme violoniste, puis comme chef d'orchestre, ce qui luipermit d'acquérir une grande expérience dans le répertoire alors en honneur.
On jouait surtout les symphonies deHaydn et de Mozart, mais Schubert eut aussi l'occasion d'étudier à fond les premières symphonies de Beethoven.
En 1813, Schubert, qui avait perdu sa mère l'année précédente, quitta le séminaire et retourna chez son père qui,entre temps, s'était remarié.
Obéissant au désir paternel, le jeune homme se prépara sérieusement à l'enseignementet, un an plus tard, il était déjà "assistant" de son père.
Mais tout son intérêt le portait vers la "poésie de lamusique", comme il aimait à dire, et il en arrivait à composer durant les heures d'école.
Rien d'étonnant à ce que sonenseignement s'en ressentît ! Lui-même racontait plus tard : "Cette petite bande d'écoliers m'énervait tellementpendant que je composais qu'elle me faisait sortir des gonds, et naturellement, je les battais." A l'encontre de seséchecs pédagogiques, son inspiration musicale atteignit un premier sommet.
Toutefois, l'impulsion la plus puissantelui fut donnée par son premier et vraisemblablement dernier amour.
C'était la fille d'un voisin, une fraîche etcharmante Viennoise du nom de Thérèse Grob, qui possédait une voix magnifique à laquelle il n'était que tropsensible.
On se rend compte combien cet amour était profondément ancré chez Schubert par le rapport de son amiHüttenbrenner en l'année 1821 :
"Pendant les trois années qu'il dut consacrer à l'enseignement, Schubert, de 1814 à 1817, inspiré par son amour,connut une période de fécondité extraordinaire ; ainsi naquirent de nombreuses Oeuvres religieuses, puis quelques-uns des plus beaux quatuors, qu'il jouait avec son père et ses frères, cinq symphonies parmi lesquelles la quatrièmeen ut mineur qu'il dénommait lui-même la "tragique", de petites compositions pour chOeur et instruments, desopéras, des lieder.
Le génie lyrique de Schubert se manifeste pour la première fois dans son lied Marguerite au rouet,composé le 19 octobre 1814 d'après un texte du Faust de Goethe.
C'est avec raison qu'on a dit de cette journéequ'elle était celle de la "naissance du lied moderne allemand".
Schubert composa à ce moment de préférence sur destextes de Goethe et du poète Johannes Mayerhofer, son nouvel ami.
On lit dans son journal, en date du 17 juin1816, cette notice touchante : "J'ai composé aujourd'hui pour la première fois pour de l'argent" ; c'était une cantated'anniversaire pour laquelle il toucha 100 gulden.
Certains jours de cette incroyable veine créatrice, Schubertcomposa jusqu'à dix lieder et chOeurs.
C'est alors que se forme autour de l'artiste ce cercle d'amis dévoués qui, s'il changeait parfois de personnes, restaitcependant toujours le même quant à l'esprit et qui, éclairant toute la vie de Schubert, lui fut une précieusecompensation pour sa renonciation à l'amour de la femme aimée, et pour l'absence de toute sécurité matérielle..
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