FICHE TRAVAIL ET TECHNIQUE (cours)
Publié le 07/02/2024
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FICHE TRAVAIL ET TECHNIQUE
En guise d’introduction
Le travail apparaît comme un moyen de libération vis-à-vis de la nature.
Le travail met en
effet en œuvre la ruse technique par laquelle je retourne mon rapport de dépendance à la
nature et par laquelle je m'en libère.
La fin de ce moyen paraît devoir être la satisfaction de
besoins et de désirs matériels.
D'un autre côté, on travaille aussi pour ne plus travailler :
j'endure ma semaine en vue du week-end, et ma carrière en vue de La retraite.
Le travail vise
donc non seulement à permettre ma Liberté, mais aussi à contribuer à augmenter une liberté
qui se présente toujours comme future.
Mais d'un autre côté, plus je travaille et moins je suis
libre, puisque ta réduction du temps de travail correspond à l'augmentation du temps libre.
La
contradiction qui apparaît ici tient à ce que je suis apparemment prisonnier de ce qui est
en même temps mon moyen de libération : comment conquérir sa liberté en la perdant ?
Le travail est-il ce qui me libère ou ce qui m'emprisonne ?
De son côté, la technique a partie liée avec cette question de la liberté, en tant qu'elle se
présente comme un ensemble de moyens : la technique est moins une classe d'objets qu'une
disposition et une conduite.
En employant un branchage ou un stylo pour tenir une fenêtre
entrebâillée, je détourne un objet naturel ou technique vers une fin décidée par moi.
Telle est
la technique : l'instrumentalisation de moyens en vue de fins décidées par nous.
Tant que nous
décidons des fins, la technique est libératrice et nous restons libres.
Mais la relation à l'objet
technique est réversible : est-ce que je fais de mon ordinateur ce que je veux ou est-ce lui qui
me donne l'idée de son usage, l'idée d'exploiter ce qu'il sait faire ? Restons-nous libres
devant la technique, ou a-t-elle tendance à quitter son statut de moyen pour devenir une
fin en soi ?
Au fond, pourquoi travailler I On l'a dit, parce qu'il faut bien vivre, et pour être libre après.
D'un autre côté, certains loisirs se présentent aussi comme des travaux : je peux travailler mon
violoncelle ou mes abdominaux.
S'il en est ainsi, cela voudrait dire que la notion de travail ne
se restreint pas à la sphère de l'échange économique, mais devenait un mode de toute activité
humaine.
Le travail ne serait plus alors simplement un moyen, mais pourrait devenir une fin
en soi, un mode d'être et de comportement.
L'extension de la logique du travail vers les
loisirs relève-t-elle du déplacement de sens, ou bien au contraire nous éclaire-t-elle de
façon décisive sur le concept de travail ? Le travail est-il un moyen ou une fin en soi ?
****
I - Les ambiguïtés de la technique
La mise en relation du travail et de la technique n’épuise assurément pas les multiples
manières d’approcher le phénomène humain qui correspond au travail, mais elle fournit sur le
travail un angle d’approche qui s’impose tout autant qu’il fait question.
Aborder le phénomène du travail sous l’angle de sa mise en relation avec ce que nous
appelons la technique s’impose tout particulièrement aujourd’hui, parce que, dans les sociétés
modernes, la façon dont les êtres humains produisent par leur travail de quoi satisfaire leur
besoin s’est trouvée profondément transformée à la faveur des bouleversements de la
technique.
La technique, entendue comme savoir-faire productif, exploite la connaissance
scientifique du monde pour réaliser les objectifs de l’espèce humaine.
Elle a procuré ainsi aux
sociétés contemporaines de nouvelles modalités de mise à disposition du réel et de ses
ressources qui ont fait apparaître de nouvelles manières de travailler.
Ces nouveaux visages
du travail, qui ont correspondu à l’essor des sociétés industrielles, se sont caractérisés avant
tout par une démultiplication des forces de travail, notamment à la faveur de la mécanisation
des opérations de production.
En ce sens, nous ne pouvons plus guère envisager aujourd’hui
la réalité est le devenir du travail sans considérer en même temps un autre élément : le savoirfaire en renouvellement constant auxquelles donne lieu l’application technique du savoir.
D’un autre côté pourtant, cette relation entre travail et technique fait question, et ce, pour le
moins, à double égard.
Force est de tenir compte du fait que tout travail n’est pas, en principe, engagé dans ce
processus de transformation technologique de l’action humaine sur le monde.
Ainsi, le travail
de la pensée, le travail de l’artiste, voir celui de l’artisan, peuvent certes être affecté par
l’apparition de certaines technologies nouvelles.
Par exemple, celles qui procèdent de
l’informatique.
Mais ces différents types de travaux gardent leur spécificité et demeurent
irréductibles à tout savoir-faire de type technologique.
Ni le philosophe travaillant a élaboré
un concept ou bien à l’appliquer un ensemble de phénomènes, ni le peintre devant sa toile, ni
le luthier fabriquant un violon ne sont simplement des techniciens, si du moins ce qu’il
produise est conforme aux objectifs les plus élevés qui sont visés par leurs activités.
La
question est alors de savoir si dans cette irréductibilité de certaine manière de travailler à la
technique, ne se dissimulent pas, concernant l’essence même du travail, toute une série de
difficultés.
Il est pour le moins probable aussi que ces difficultés nous invitent à rechercher
une conceptualisation plus forte de ce que signifie proprement « travailler ».
Au demeurant, il
faudrait encore se demander si c’est à toute technique (à tout savoir-faire) que le travail ne
doit pas être réduit, ou seulement à la forme très particulière qu’a prise le savoir-faire
technique quand il a consisté à exploiter les conquêtes de la science moderne pour mieux
mettre à la disposition de l’homme les ressources de la nature.
Pour expliciter l’interrogation,
nous pouvons nous demander si nous devons penser toute technique (tout savoir-faire) sur le
modèle de cette « technoscience » qu’est devenue, à l’époque moderne et plus encore à l’âge
contemporain, l’exploitation technologique des découvertes scientifiques.
Ou bien n’existe-til pas, comme par exemple dans ce que les Grecs appelaient la technê, une autre manière de se
rapporter au monde, induisant par-là, une autre représentation du travail ?
En second lieu et plus profondément peut-être, il faudrait aussi déterminer si la
technologisation moderne du travail (c’est-à-dire la nouvelle configuration prise par le travail
à l’âge de la technoscience) a réellement, en le rendant plus efficace (plus productif),
accompli l’essence même du travail.
Peut-être a-t-elle au contraire mis en péril ; voire
défiguré ce qui faisait du travail une activité spécifiquement humaine.
C’est ici le vaste
dossier des ambiguïtés de la technique qu’invite à instruire la mise en relation du travail et de
la technique.
Pour n’évoquer que dans son principe la teneur d’un tel dossier, on accordera en effet que, par
la maîtrise qu’il procure sur la nature, le travail lié à la technologie, a produit une libération
plus grande.
Il a assuré une émancipation plus vaste de l’être humain vis-à-vis d’un certain
nombre de sujétions qui pesaient sur son existence individuelle et collective.
Nous consacrons
désormais moins de temps, ou d’efforts, a produit a les moyens de notre subsistance, à
prévenir ou guérir un nombre de plus en plus grand de maladies, à faire circuler les
informations et les connaissances de plus en plus efficacement d’un bout à l’autre de la
planète.
Autant de progrès qui sont issus de formes de travail ou les prouesses de la technique
joue un rôle important, et qui rendent incontestablement l’humanité moins dépendante de
contraintes naturelles devant lesquelles elle s’était trouvée si longtemps impuissante.
En
somme, la technoscience ouvre sur cette maîtrise et possession de la nature dont Descartes
avait rêvé sans la concevoir encore comme intégralement possible : une telle maîtrise apparaît
désormais comme ce à quoi quotidiennement le travailleur apporte sa contribution.
Il n’en demeure pas moins que certaines dérives contemporaines de la maîtrise technologique
du monde nous ont appris aussi, et là réside toute la complexité du dossier des ambiguïtés de
la technique, à nous méfier d’un travail toujours plus technicisé.
A un premier niveau, cette
méfiance s’exerce aujourd’hui à l’égard des effets de la maîtrise technologique de la nature
sur tel ou tel secteur du monde naturel : la disparition d’un grand nombre d’espèces, les
pollutions répétées, les déséquilibres divers introduits dans l’écosystème constituent autant de
menaces sur la planète et sur la vie qui s’y est déployée.
Mais la méfiance envers la technique s’applique aussi aux effets du travail technicisé sur le
travailleur lui-même.
Si l’on considère qu’il n’y a de travail cumin donc que le travail
exprime quelque chose de l’humanité de l’homme, la question se pose de savoir ce que
devient le travail à l’âge de sa technologisation.
Travailler reste-t-il un signe d’humanité ou
bien au contraire le travailleur, à l’ère de la technique, ne se trouve-t-il pas exposé par les
formes nouvelles de son travail à perdre ce qu’il y a de plus humain on lui ? En ce sens, c’est
sur le rapport entre le travail et l’humanité couvre,....
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