EXPLICATION texte de Kant Le devoir moral
Publié le 23/05/2020
Extrait du document
«
Explication d'un extrait de Fondements de la métaphysique des mœurs, Kant
“Être bienfaisant, si on le peut, est un devoir […] sa valeur morale véritable »
On s'accorde à dire qu'une personne qui fait son devoir est un individu moral.
Aussi le texte de Kant
peut paraître paradoxal lorsqu'il annonce qu'il ne suffit pas d'agir conformément au devoir pour être
moral.
C'est que Kant soutient que nos actions, pour être morales, doivent être guidées par le devoir,
c'est-à-dire “en dehors de toute inclination” personnelle, en renonçant à ses propres désirs ou
besoins .
Nous verrons donc dans un premier temps comment Kant expose cette thèse et sur quels
exemples il s'appuie pour affirmer ce point de vue.
Et dans une seconde partie nous nous
interrogerons sur les limites de la pensée de Kant sur ce sujet en examinant dans quelle mesure le
fait de n'agir qu'au nom d'un devoir universel pose le problème d'une certaine renonciation de sa
propre singularité.
Des la première ligne de ce texte Kant annonce que faire le bien est un devoir, c'est-à-dire un
commandement de la morale, la morale étant un système de valeurs qui différencie le bien du mal et
prescrit de choisir et de faire le bien.
Il y a donc un lien de réciprocité entre devoir et morale : faire
notre devoir est moral, et être moral est un devoir.
Mais cela implique-t-il que tout individu qui "fait
son devoir" soit moral ? C'est ce que Kant tente d'expliquer dans cet extrait.
Il soutient que nous
pouvons agir conformément au devoir mais être motivés par un intérêt personnel qui ôte toute
moralité à notre action.
Si par exemple nous agissons en étant bienfaisant mais que notre action est
guidée par « la vanité ou l’intérêt » (ligne 3), nous ne pouvons affirmer que notre action comporte
une valeur morale.
Prenons un exemple.
La morale me commande de venir au secours des plus
démunis.
Un politicien en période électorale invite des journalistes à assister à une cérémonie
durant laquelle il lègue une partie de sa fortune à quelques SDF sélectionnés pour l'occasion.
Au
sens strict, cette action est conforme au devoir (le politicien vient en aide financièrement à des
individus démunis) ; mais peut-on pour autant qualifier cette démarche de morale ? Dans cet
exemple, c'est évident que le politicien semble agir, non dans l'intérêt d'autrui, mais pour son intérêt
à lui.
S'il vient en aide aux plus démunis, ce n'est ni par solidarité, ni par générosité, ni par
bienveillance, mais par intérêt.
Ce qui détruit totalement la dimension "morale" de son geste.
Pour
être moral, il ne faut pas seulement agir conformément à notre devoir ; il faut que notre action soit
accomplie, non par intérêt, mais par devoir ; c'est-à-dire qu'elle doit être accomplie parce que le
devoir le commande, et rien d'autre.
Puis Kant explique (ligne 3-4) que certaines personnes
« trouvent une satisfaction intérieure à répandre la joie autour d'elles et qu'elles peuvent se réjouir
du contentement d'autrui ».
Mais là encore prenons un autre exemple.
Supposons un individu qui,
d'un naturel généreux, prend plaisir à donner de la joie autour de lui ; rien ne lui fait plus plaisir que
de lire la joie dans les yeux de ceux auxquels il vient en aide.
Il est vertueux et il pourrait dire, à
chaque fois que quelqu'un le remercie pour ses dons et son aide : "ne me remerciez pas, cela me fait
plaisir." Le problème avec ce vertueux, c'est que si ce qu'il dit est vrai...
alors il n'est pas plus moral
que notre précédent politicien ! Parce que cet individu vient au secours de son prochain par plaisir.
Cela lui fait plaisir d'agir conformément au devoir.
Dans ce cas, il n'est pas moral puisqu'il n'agit
pas par devoir , mais par plaisir .
La raison pour laquelle il vient en aide aux autres, ce n'est pas que
"le devoir le lui commande", mais parce que cela le rend heureux.
Or il n'y a rien de
proprement moral dans le fait de faire ce qui nous rend heureux.
Rien ne différencie véritablement
le politicien du vertueux : tous deux agissent conformément au devoir ; tous deux agissent par
convenance personnelle.
Aucun des deux n'agit "par devoir" : aucun des deux n'est donc moral..
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