États-Unis 1990-1991: Le "syndrome du Vietnam" exorcisé
Publié le 15/09/2020
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États-Unis 1990-1991
Le "syndrome du Vietnam" exorcisé
Géant aux pieds d'argile, les États-Unis auront d'abord prouvé
qu'ils étaient un géant.
En mobilisant près
de 450 000 hommes et femmes pour combattre dans le Golfe, dans le confli
t qui a suivi l'invasion du
Koweït par l'Irak (2 août 1990); en réussissant à réuni
r vingt-huit pays - dont l'Égypte, la Syrie et les
États du Conseil de coopération du Golfe - dans la plus grande coa
lition jamais réalisée; en démontrant la
supériorité de leur logistique et de leur haute technologie milita
ire - illustrée par les missiles anti-missiles
Patriot; en écrasant en quelques centaines d'heures de combats terres
tres, en février 1991, une armée
supposée être la "quatrième" du monde, l'Amérique démontr
ait qu'elle était bien une grande puissance, la
seule superpuissance des années quatre-vingt-dix.
L'Amérique victo
rieuse exorcisait une fois pour toutes
le "syndrome du Vietnam".
Elle effaçait aussi dix ans d'humiliation s
ubie au Moyen-Orient et marqués
successivement par l'exil de son plus fidèle allié, le chah d'Iran
(1979); l'échec de l'opération militaire
aéroportée Desert One montée par l'ancien président Jimmy Ca
rter pour libérer le personnel diplomatique
de son ambassade pris en otage à Téhéran (1980); et le fiasco
libanais des années 1982-1983, soldé par
le départ précipité des marines de la "force multinationale", d
evenus la cible privilégiée d'attaques
terroristes.
Caspar Weinberger, le ministre de la Défense de Ronald Reagan, avait
lancé un avertissement dès
novembre 1984, dans un discours au National Press Club: si les États-
Unis doivent intervenir à l'étranger,
il faudra que leur intérêt vital et celui de leurs alliés soien
t directement menacés, que les objectifs
recherchés soient clairement définis, le soutien de l'opinion publ
ique assuré, et les moyens mis en oeuvre
proportionnés aux fins recherchées.
En d'autres termes, concluait
C.
Weinberger, l'intervention militaire
devra être massive, brutale et rapide.
Dix ans de fructueuses relations avec l'Irak
L'invasion du Koweït par l'Irak menaçait-elle directement l'"inté
rêt vital" des États-Unis? Il est difficile de
répondre puisque la définition de cet intérêt est sujette à
variations.
Pendant la guerre Iran-Irak (1980-
1988), l'Irak - bien qu'agresseur - était un allié objectif des É
tats-Unis, soucieux de faire barrage aux
menées révolutionnaires de Téhéran.
Les tentatives du Congrè
s d'imposer des sanctions contre l'Irak au
moment du gazage de populations kurdes à Halabja, en 1988, se perdron
t dans les méandres de la
procédure législative, R.
Reagan et ses conseillers ne souhaitant
pas remettre en cause leur alliance avec
Bagdad.
En mars 1990, lorsque Saddam Hussein prétendit vouloir "brûler la
moitié d'Israël", Dennis Ross, l'un des
proches conseillers du secrétaire d'État James Baker, proposa d'im
poser des sanctions économiques à
l'Irak.
Mais il se heurta à la réticence du Conseil national de sé
curité et à l'opposition du département du
Commerce, fortement influencé par le lobby agricole pro-irakien.
Une
semaine avant l'invasion, le 25
juillet, April Glaspie, l'ambassadeur des États-Unis à Bagdad, ren
contra personnellement Saddam Hussein.
Ne disposant pas d'instruction ferme du département d'État, elle d
éclara que les États-Unis "n'ont pas
d'opinion à émettre sur des conflits interarabes comme le conflit
frontalier opposant l'Irak au Koweït".
Pour sa défense, A.
Glas pie affirmera ensuite avoir dénoncé to
ute velléité irakienne d'imposer une
solution par la violence.
Le 31 juillet 1990, un haut fonctionnaire du d
épartement d'État, John Kelly,
affirmait encore devant l'une des sous-commissions de la Chambre des rep
résentants: "Historiquement,
nous avons toujours évité de prendre position sur les questions fr
ontalières."
Le fait est que Saddam Hussein ne fut pas mis en garde et que sa curieus
e conception d'une Amérique
faible, "enjuivée" et manipulée par un soi-disant "complot anglo-i
sraélien" fut encouragée par dix ans de
politique d'apaisement et le maintien de fructueuses relations commercia
les avec les États-Unis.
Ainsi, en
1989-1990, une agence du gouvernement fédéral, la Commodity Credit
Corporation, accorda 1,5 milliard
de dollars de garanties de crédit à l'Irak pour l'achat de produit
s agricoles américains.
Pour les fabricants
d'ordinateurs américains et les sociétés d'ingénierie, l'Ira
k constituait, jusqu'au jour de l'invasion du
Koweït, l'un des meilleurs marchés du Moyen-Orient.
En juillet, lo
rsque Saddam Hussein déplaça 100 000
soldats vers la frontière du Koweït, personne ne crut à la guer
re.
Le Koweït, après tout, semblait sur le.
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