Enosis

« 1 / 2 23 juin 1965 Série N• 49 Fiche N• 580 Enosis 1.

La population de l'ile de Chypre, qui fut pendant trois siècles sous la domination turque avant l'occupation anglaise, comprend 80 Dfo de Grecs (que rien, sinon certain particularisme local, ne distingue des Grecs du continent) et 20 Ofo de Turcs.

Aussi les premiers mouvements de libération, en 1931, étaient-ils dirigés par des Grecs et demandaient-ils I'Enosis (mot qui signifie union) c'est-à-dire le rattachement à la Grèce.

Le même mouvement reprit avec une violence accrue après la dernière guerre, appuyé par les nationalistes grecs du continent.

2.

Le plébiscite organisé par Mgr Makarios, alors évêque de Kition, auprès des Chypriotes grecs, le 15 janvier 1950, donna 95,7 Dfo de voix en faveur de I'Enosis.

La lutte pour la libération de l'ile, et le terrorisme, à partir de 1955, furent menés par les seuls Chypriotes grecs sous le signe de I'Enosis, désir quasi unanime de la population grecque de l'ile (« L'Enosis ou la mort., était leur slogan).

Cependant les accords de Londres et de Zurich (1959) établissent pour Chypre un statut d'indépen­ dance, non I'Enosis.

3.

Ce statut était un compromis entre la position grecque et la position turque (les Turcs réclamaient la partition avec autant de vigueur que les Grecs I'Enosis).

L'archevêque Makarios, naguère champion acharné de I'Enosis, semblait être converti (d'aucuns prétendent que ce choix servait l'ambition du nouveau chef de l'Etat chy­ priote) au statut de l'indépendance.

Cependant, pour l'opinion grecque, il s'agit d'une acceptation provisoire, I'Enosis demeurant le but final auquel personne ne doit renoncer.

L'exercice du droit à l'autodétermination que réclame Makarios (et qu'Athè­ nes reconnaît) ne peut conduire, en suivant la règle de la majorité, qu'à I'Enosis.

4.

Mais ce renoncement provisoire à I'Enosis n'est pas du goOt de tous les Chy­ priotes grecs.

Les partisans du général Grivas (ancien chef du mouvement terroriste EOKA), gens de droite violemment anticommunistes, exigent I'Enosis, même au prix d'un conflit avec les Turcs.

Ainsi les données de politique intérieure interviennent pour modifier l'attitude chypriote et grecque à l'égard de I'Enosis.

Le Parti commu­ niste de Chypre (AKEL), qui a obtenu le tiers des suffrages aux dernières élections législatives, est en faveur d'une ile totalement indépendante, démilitarisée et neutra­ liste, position qui est également celle du Parti démocratique (EDA) à Athènes, ce QUI, avec l'hostilité turque, exclut la réalisation de I'Enosis par la force.

5.

A l'extérieur, la solution de la stricte indépendance est appuyée par l'URSS (dont les rapports avec la Turquie s'améliorent) et les pays non engagés.

La Turquie et la Grèce étant membres de l'OTAN, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne s'efforcent de trouver une solution acceptable pour leurs deux alliés; I'Enosis à terme assorti de compensations (cession d'une grande base militaire) à la Turquie (plan Acheson de 1964) parait être la solution qu'ils ont retenue.

Mais le gouvernement turc ne prendra pas d'engagements importants avant les élections législatives qui auront lieu cette année en Turquie.

Ainsi I'Enosis ne peut être atteint actuellement sans danger intérieur et extérieur pour la Grèce. 2 / 2. »