En vous appuyant sur des exemples, vous apprécierez cette formule par laquelle Lanson définit « en son essence » le lyrisme : « l'expression individuelle d'une inquiétude métaphysique ».
Publié le 09/12/2021
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.. Il se retrouve dans les Odes d'Horace ou les poésies anacréontiques imitées par les poètes de la Pléiade. Pour s'en tenir à quelques pages qui demeurent dans toutes les mémoires, il inspire L'Aubespin à Ronsard, l'émouvante conclusion que La Fontaine donne aux Deux Pigeons, Après trois ans de Verlaine A la Santé d'Apollinaire. Tout ce qu'il y a de frais et de spontané dans de tels poèmes semble méconnu et écrasé par la formule de Lanson. II. TOUTE oeUVRE LYRIQUE EST, A QUELQUE DEGRÉ, A LA FOIS MÉTAPHYSIQUE ET INDIVIDUELLE Il convient toutefois d'y regarder de plus près. Si l'on appelle «-métaphysique » non plus la « connaissance des causes premières et des premiers principes», mais selon l'expression de Jean-Paul Sartre « un effort vivant pour embrasser du dedans la condition humaine », la formule de Lanson cesse de choquer. La métaphysique et la vie, le général et l'immédiat ne s'opposent plus. Et l'on conçoit qu'ils puissent entrer ensemble dans la composition de toute oeuvre lyrique. 1° Les poèmes qui ne font que s'attacher aux peines et aux joies de la vie ne seraient pas lyriques s'ils ne sous-entendaient quelque inquiétude métaphysique. Ainsi, dans L'Aubespin de Ronsard, dans Après trois ans de Verlaine, c'est la fragilité secrète des choses qui pousse le poète à les consacrer par le chant.
«
INTRODUCTION : Pour atteindre « l'essence » du lyrisme, Lanson semble négliger les caractères par lesquels on la définit ordinairement (le chant, l'effusion sentimentale).
On peut se demander si la formule à laquelle il s'arrête («.expression individuelle d'une inquiétude métaphysique »), n'est pas contraire, par sa sécheresse intellectuelle, àl'esprit même du genre poétique dont il s'agit.
I.
A PREMIÈRE VUE, ON PEUT DISTINGUER DANS LE LYRISME DEUX DOMAINES, DONT UN SEUL CORRESPONDA LA FORMULE DE LANSON
1° Le lyrisme à résonance métaphysique.
Il se manifeste notamment à trois époques :
a) Dans l'Antiquité où les Psaumes bibliques, les Choeurs de la Tragédie grecque chantent la fragilité de l'homme, lacrainte ou l'espoir qu'il place dans la divinité.
b) A l'époque romantique, notamment sous l'influence germanique A ce titre une phrase de Mme de Staël estsignificative : « l'énigme de la destinée humaine n'est de rien pour la plupart des hommes.
Le poète l'a sans cesseprésente à l'imagination ».
Les Méditations de Lamartine, les Contemplations de Victor Hugo en offrent letémoignage.
c) Depuis le Romantisme, avec la tentative de Rimbaud qui veut que le poète s'applique à devenir un « Voyant » etles efforts de Baudelaire et de Mallarmé pour faire de la poésie un instrument de la « Connaissance », capable depercer le mystère du monde.
2° Le lyrisme sans résonance métaphysique.
Détaché de toute prétention philosophique, il exprime la tendresse,l'amour de la vie, le regret de vieillir...
Il se retrouve dans les Odes d'Horace ou les poésies anacréontiques imitéespar les poètes de la Pléiade.
Pour s'en tenir à quelques pages qui demeurent dans toutes les mémoires, il inspireL'Aubespin à Ronsard, l'émouvante conclusion que La Fontaine donne aux Deux Pigeons, Après trois ans de VerlaineA la Santé d'Apollinaire.
Tout ce qu'il y a de frais et de spontané dans de tels poèmes semble méconnu et écrasépar la formule de Lanson.
II.
TOUTE oeUVRE LYRIQUE EST, A QUELQUE DEGRÉ, A LA FOIS MÉTAPHYSIQUE ET INDIVIDUELLE
Il convient toutefois d'y regarder de plus près.
Si l'on appelle «-métaphysique » non plus la « connaissance descauses premières et des premiers principes», mais selon l'expression de Jean-Paul Sartre « un effort vivant pourembrasser du dedans la condition humaine », la formule de Lanson cesse de choquer.
La métaphysique et la vie, legénéral et l'immédiat ne s'opposent plus.
Et l'on conçoit qu'ils puissent entrer ensemble dans la composition de touteoeuvre lyrique.
1° Les poèmes qui ne font que s'attacher aux peines et aux joies de la vie ne seraient pas lyriques s'ils ne sous-entendaient quelque inquiétude métaphysique.
Ainsi, dans L'Aubespin de Ronsard, dans Après trois ans de Verlaine,c'est la fragilité secrète des choses qui pousse le poète à les consacrer par le chant.
Hante par la « condition del'homme », il apparaît comme une victime, jamais résignée, des efforts destructeurs du temps.
Dans quelques autrespoésies de Ronsard, comme Mignonne allons voir si la rosé...
ou J'ai l'esprit tout étourdi, sous l'insoucianceapparente se révèle l'obsession de la mort.
A l'origine de la Ballade des Pendus ou de Le Ciel est par-dessus le toit, ily a deux situations cruelles dont la biographie de Villon et celle de Verlaine attestent l'authenticité.
Mais nil'événement ni même l'état d'âme ne suffisent pour fonder le lyrisme.
Sous le choc des circonstances, Villon etVerlaine, chacun à sa façon, « embrassent de l'intérieur » ce qui est, dans une perspective chrétienne, la misèreessentielle du pécheur : la solitude et le vide spirituels que laisse après soi le gaspillage sacrilège des dons de la vie.
2° Les poèmes d'inspiration métaphysique ne seraient pas lyriques s'ils étaient impersonnels.
Pour être lyrique, uneméditation doit être située dans un certain climat fait de sensations ou de sentiments.
Elle sera toujours animée parun souffle qu'expriment le rythme et le ton de la voix.
a) Le climat.
La seconde partie du poème de Victor Hugo A Villequier serait purement oratoire si la première et ladernière parties ne faisaient reconnaître en elle la pensée d'un homme en face d'une situation particulière, devant unpaysage particulier.
Ainsi s'éclaire l'importance que revêtent chez Lamartine, Vigny, Baudelaire, Verlaine, les «paysages intérieurs ».
a) Le souffle.
Le lyrisme, « développement d'une exclamation », selon le mot de Valéry, évoque, par des effetsphysiques de langage, les mouvements intimes de la sensibilité.
Le poème A Villequier comporte entre les strophesd'alexandrins, dont le déroulement équilibré évoque l'image de la sérénité philosophique désirée, des strophes de versinégaux qui suggèrent l'image d'une pensée encore tendue contre elle-même.
Dans un autre poème, l'Irrémédiable,de Baudelaire, la netteté impitoyable de la syntaxe et du rythme est à l'unisson du désespoir lucide qu'il exprime.Enfin dans le Bateau ivre, à travers la griserie verbale, le ton hâbleur, provocant, les cris du coeur, se fait entendrela voix du « gamin » Rimbaud.
CONCLUSION : Aimer un poète lyrique, c'est reconnaître les inflexions particulières de sa voix et y saisir l'essentiel de son être, comme on le fait devant la physionomie d'un être vivant.
C'est aussi entendre dans ses paroles, nonpas la confidence de ses petits secrets, mais la façon dont il éprouvait, au fond de lui-même, sa condition d'homme.Tel est bien, à tout prendre, le sens de la formule de Lanson..
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