Émile Zola (La Débâcle): Partie 3/Chapitre VIII
Publié le 15/05/2020
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Émile Zola (La Débâcle): Partie 3/Chapitre VIII
La Débâcle raconte l'effondrement du Second Empire au terme de la guerre franco-prussienne (1870-1871).
Leroman s'achève sur la répression sanglante qui a mis fin à la Commune de Paris (28 mai 1871).
Jean Macquart,bouleversé par la mort d'un ami, contemple, dans les dernières pages du roman, la capitale incendiée par lesCommunards désespérés.
Jean, plein d'angoisse, se retourna vers Paris.
A cette fin si claire d'un beau dimanche, le soleil oblique, au ras del'horizon, éclairait la ville immense d'une ardente lueur rouge.
On aurait dit un soleil de sang, sur une mer sans borne.Les vitres des milliers de fenêtres braisillaient, comme attisées sous des soufflets invisibles; les toituress'embrasaient, telles que des lits de charbons; les pans de murailles jaunes, les hauts monuments, couleur de rouille,flambaient avec les pétillements de brusques feux de fagots, dans l'air du soir.
Et n'était-ce pas la gerbe finale, legigantesque bouquet de pourpre, Paris entier brûlant ainsi qu'une fascine géante, une antique forêt sèche,s'envolant au ciel d'un coup, en un vol de flammèches et d'étincelles? Les incendies continuaient, de grosses fuméesrousses montaient toujours, on entendait une rumeur énorme, peut-être les derniers râles des fusillés, à la caserneLobau', peut-être la joie des femmes et le rire des enfants, dînant dehors après l'heureuse promenade, assis auxportes des marchands de vin.
Des maisons et des édifices saccagés, des rues éventrées, de tant de ruines et detant de souffrances, la vie grondait encore, au milieu du flamboiement de ce royal coucher d'astre, dans lequel Parisachevait de se consumer en braise.Alors, Jean eut une sensation extraordinaire.
Il lui sembla, dans cette lente tombée du jour, au-dessus de cette citéen flammes, qu'une aurore déjà se levait.
Vous ferez de ce texte un commentaire composé.
Vous pourrez, par exemple, étudier comment l'écrivain donne vieet signification au spectacle tragique de Paris incendié.
1.
Braisillaient : brillaient d'une lueur rougeâtre.2.
Fascine : fagot de bois sec.3.
La caserne Lobau : lieu où étaient fusillés les Communards condamnés par la cour martiale.
• Émile Zola (1840-1902), journaliste et romancier, écrivit L'Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le SecondEmpire, les Rougon-Macquart.
Cette suite de vingt volumes retrace les drames d'une famille que l'on suit danstoutes les couches de la société et dont il peint les qualités et les défauts, déterminés par le milieu et l'hérédité.
LaDébâcle est l'avant-dernier roman de cette série.
Dans La Débâcle, Émile Zola évoque un épisode sombre de l'histoire de France : le conflit de la Commune, qui opposadans la capitale et plusieurs villes de province les révolutionnaires hostiles à la capitulation devant les Prussiens, etle gouvernement plus conservateur réfugié à Versailles.L'un des passages du roman peint un épisode spectaculaire et tragique de cette guerre civile : l'incendie de Parispar les révoltés avant leur défaite.La description d'une ville incendiée à la fois par le coucher de soleil et par les Communards devient un tableau où lamort omniprésente est tempérée par l'espoir d'un avenir plus calme.
***
Cette description de Paris se situe à un moment particulier : la conjonction, le 28 mai 1871, du coucher de soleil etd'incendies allumés par les Communards lors de la répression de leur révolte.
La capitale est à la fois illuminée parl'astre et les flammes.
Ces deux événements, l'un habituel, l'autre exceptionnel, se renforcent en un spectaclegrandiose.Le spectateur, Jean, assiste en effet à la fusion des flammes métaphoriques* du soleil et des vraies flammes, parceque les deux éléments s'attaquent à la ville.
Les reflets du premier sur les toitures ou les vitres s'ajoutent aux lueursdes secondes, car le soleil est symbole de feu et de chaleur.
Trois champs lexicaux, celui de la cité, du soleil et dufeu, se mêlent dans le texte comme dans le spectacle et l'événement.Le champ lexical* du feu est riche et omniprésent : « ardente» (l.
3), « braisillaient » (l.
5), « attisées» (l.
5), «s'embrasaient » (l.
6), « flambaient » (l.
8), « feux » (l.
9), « brûlant » (l.
11), «un vol de flammèches etd'étincelles» (l.
12-13), « incendies » (l.
13), « fumées » (l.
14), «flamboiement » (l.
21), « se consumer en braise»(l.
22), « en flammes » (l.
24-25).
S'y ajoute la mention d'objets ou d'images liés au feu et à la cheminée : «soufflets» (l.
6), « fagots » (l.
9), « fascine » (l.
11).
Les couleurs rouges dominent avec la «lueur rouge» (l.
3), leverbe « braisillaient » (l.
5), les adjectifs « pourpre » (l.
11) et « rousses» (l.
14), et la « rouille» (l.
8).
Le bleu,parfois présent dans les flammes, apparaît aussi avec l'éclat des toitures, de la teinte des chardons, fleurs d'unbleu-gris comme
elles et que la lumière fait miroiter.
L'image du « soleil de sang sur une mer sans borne » (l.
4) réunit également le.
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