Édouard III
Publié le 16/05/2020
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Édouard III1312-1377
En 1327, Édouard II, prince sans énergie ni habileté, en lutte perpétuelle avec les grands et le Parlement, fut contraint d'abdiquer en faveur de son fils,Édouard III.
Le règne de ce jeune roi, alors âgé de quinze ans, commençait dans une atmosphère de troubles et de révoltes : l'instigatrice en était sa mère,Isabelle, fille du roi de France, Philippe le Bel, femme sans scrupules qui, avec son amant, le comte de Mortimer, venait de détrôner son mari et l'avaitenfermé au château de Berkeley ; Édouard II n'allait pas tarder à y finir ses jours, très probablement assassiné par son ordre.
P endant quatre ans, sous lenom d'Édouard III, c'est elle et Mortimer qui gouvernèrent : le jeune roi n'avait aucun pouvoir et devait borner son activité à prendre part à quelquesexpéditions militaires, telle une campagne malheureuse contre les Écossais.
Pour se procurer les fonds nécessaires à son coup d'État, Isabelle avait mariéson fils à Philippa de Hainaut, princesse dont la dignité et la bonté devaient charmer le chroniqueur Froissart qui l'a célébrée en termes fervents.
Édouard III, cependant, rongeait son frein dans la situation humiliante qui lui était faite.
Il était valeureux et plein d'ambition.
En 1328, son oncle, le roi deFrance Charles IV, était mort sans héritier mâle et les grands du royaume avaient dû désigner un roi.
Les femmes ne pouvaient hériter de la couronne (laquestion avait été tranchée déjà deux fois, lors de la mort de Louis X et de Philippe V ), mais pouvaient-elles la transmettre ? Si ce point était admis, lesgrands auraient eu à choisir entre deux petits-fils de Philippe le Bel : Édouard III, fils d'Isabelle, et C harles le Mauvais, petit-fils de Louis X.
Les pairsdécidèrent que la couronne ne se transmettait pas par les femmes et désignèrent Philippe VI, autre petit-fils de Philippe le Bel.
Mais Édouard III, bien queses droits fussent certainement primés par ceux de Charles le Mauvais, devait contester cette décision et tenter de se proclamer roi de France.
En 1328, ilne put que faire une réclamation de principe pour affirmer ses droits, car, à cette époque, son but immédiat était de recouvrer son autorité en Angleterre.Dirigeant un véritable coup de main, il s'empara de Mortimer, le fit pendre et écarta sa mère du pouvoir.
Désormais, il régnait et il put donner libre cours àson ambition et à ses talents.
Deux problèmes se posaient à l'extérieur : assurer sa domination sur l'Écosse et abattre la puissance de la France, avec laquelle l'A ngleterre vivait depuisla fin du XIIIe siècle en état d'hostilité permanente.
La question d'Écosse fut assez rapidement résolue.
À la suite de sa victoire de 1327, le roi RobertBruce avait imposé aux Anglais le traité de Northampton qui consacrait l'indépendance de son royaume.
Mais il mourut en 1329, laissant pour successeurun enfant.
Une forte opposition chez les barons écossais permit à Édouard d'envahir le pays en 1332 et de placer sur le trône Édouard Balliol, mais il dutintervenir de nouveau en 1333 et, cette fois, il écrasa les Écossais à Halidon Hill.
Bien que son protégé, méprisé par ses compatriotes, fût écarté en 1341,la domination anglaise ne fut plus contestée et le roi David II dut se reconnaître le vassal d'Édouard.
Lorsque, de nouveau, il voulut reconquérir sonindépendance, il fut vaincu à Nevill's Cross.
À l'égard de la France, la tâche d'Édouard III était plus difficile et le conflit qu'il déclencha est le début de la Guerre de Cent ans.
C'est la dominationanglaise en Guyenne qui fut l'origine du conflit.
Lorsque Philippe Auguste avait détruit l'empire continental des Plantagenêt, il avait laissé la Gascogne àJean sans Terre.
Saint Louis, pour s'assurer l'hommage d'Henri III, lui avait rendu certains fiefs de l'Agenais et du Périgord.
Le roi d'Angleterre était doncmaître d'un important territoire qu'il tenait du roi de France et dont les habitants lui étaient très attachés : les bourgeois de Bordeaux, par exemple, étaientpleins de loyalisme à son égard et ce serait une erreur de croire que ces populations aient éprouvé un sentiment patriotique français ou que l'administrationdu roi d'Angleterre les aient moins bien traités que les sujets anglais.
Mais depuis Édouard Ier et Philippe le Bel, les officiers du roi de France ne cessaientde saisir toutes les occasions pour intervenir dans les terres anglaises.
D'autre part, la Flandre, autre fief français, était économiquement tributaire des ÎlesBritanniques et le roi d'Angleterre ne manquait pas d'y contrecarrer la politique française.
A près son avènement, Philippe VI avait voulu réaffirmer sesdroits et exigeait l'hommage de son vassal Édouard III pour la Guyenne, tandis qu'Édouard retardait indéfiniment cette cérémonie.
En 1337, le roid'Angleterre, profitant de troubles en Flandre, conclut une alliance avec les cités flamandes ; Philippe V I déclara que les fiefs d'Édouard étaient confisqués :c'était la guerre.
Alors commence une période au cours de laquelle l'Angleterre connaît des triomphes militaires.
Édouard se proclame roi de France et prépare la guerre surun plan si gigantesque que les finances anglaises sont rapidement ruinées.
La bataille de l'Écluse (1340), la campagne de Bretagne (1342), la prise deCaen, l'invasion du nord de la France, la victoire de Crécy (1346), la prise de C alais (1347), la bataille navale de Winchelsea contre les Espagnols (1350)sont de brillantes opérations qui montrent en Édouard III un chef de guerre de haute valeur, mais, malgré faits d'armes et victoires, il ne peut imposer ladécision ; à court d'argent, il doit interrompre les hostilités, tandis que la Grande Peste, à partir de 1348, désole son royaume.
L'année 1356 marque l'apogée de son règne.
Il soumet une fois de plus l'Écosse, tandis que son fils, le Prince Noir, bat Jean le Bon près de Poitiers et le faitprisonnier : le roi de France consent, trois ans plus tard, à un traité désastreux que repousse le Dauphin, le futur Charles V.
Après une campagneinfructueuse en Champagne et en Bourgogne, Édouard III doit conclure le traité de Brétigny, par lequel Charles V sauve l'indépendance de son royaume.Pendant dix ans, ses fils, le Prince Noir et Jean de Gand, duc de Lancastre, conduisent en France et en Espagne des guerres où s'affaiblit peu à peu l'arméeanglaise.
La fin du règne est marquée par le déclin : le roi, qui a perdu en 1369 la reine Philippa, tombe sous l'influence d'Alice Perrers et abandonne de plus en plusle gouvernement à ses fils.
La rivalité de ces deux frères menace le royaume d'une crise.
Le Prince Noir meurt en 1376.
L'héritier du trône est son filsmineur, le futur Richard II.
Édouard III s'éteint l'année suivante, laissant à cet enfant un royaume menacé, divisé, en pleine transformation.
Au cours de ces cinquante ans de règne, on remarque un singulier contraste entre la personnalité d'Édouard III, ses ambitions, ses projets, le luxe et lefaste dont il s'entoure, les triomphes apparents d'une cause à laquelle il vouait ses efforts et qui représentait un idéal déjà périmé, et la faiblesse desressources et de l'autorité dont il disposait réellement.
Fêtes, tournois, esprit chevaleresque, victoires, construction de résidences royales masquent ladétresse financière qui entraîne la mainmise étrangère sur le commerce et les finances, les appels adressés aux marchands anglais, la part de plus en plusgrande prise par le Parlement dans la gestion du royaume, les factions qui se créent, les concessions et les abandons, les expédients.
Après une tentativepour s'approprier le monopole de la laine exportée de son royaume, Édouard III est amené à affermer ce monopole aux banquiers italiens et doit enfins'orienter vers un système de taxes qu'il faut négocier avec les associations de marchands, puis avec le Parlement.
La haute noblesse arrache au roi desconcessions de “ franchises ” qui la rendent pratiquement indépendante.
C'est désormais par l'intermédiaire des magnats qu'il faut passer pour recruter destroupes.
Le désir d'émancipation et de bien-être des classes inférieures de la société, décimées par la Grande Peste, se heurte à l'opposition du Parlementqui édicte un statut draconien pour assurer le travail à bas prix.
Rivalités des ducs, naissance des clans armés, révolte latente du peuple, prédication des Lollards qui dénoncent les abus et les injustices, c'est dans ceclimat que mûrit la Révolte des Travailleurs de 1380 et que se forme la société qui aboutira cent ans plus tard à la Guerre des Deux Roses.
Inconscient deces dangers, Édouard III n'a donné à l'Angleterre que la gloire militaire et le spectacle d'un roi imbu de l'idéal chevaleresque, brave, fastueux, homme deguerre habile, prince à la vaste ambition, plutôt que politique avisé et réaliste..
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