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Du symbolisme au surréalisme

Publié le 09/12/2021

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Poetry is a divine instinct and unnatural rage passing the reach of common reason. (Spencer) Depuis le milieu du XIXe siècle se poursuit et se consolide sous nos yeux une révolution poétique dont le caractère radical, soupçonné, n'a peut-être pas été assez vigoureusement mis en évidence : avec Baudelaire et après lui, ce n'est pas seulement la " diction " poétique qui change, les thèmes communs, tropes ou versification ; subtilement, l'idée même qu'on se fait de la poésie, de ses pouvoirs et de ses fins, de son apport à la prose, de l'usage spécifique du langage qui la constitue, se transforme du tout au tout, pour une rupture sans doute définitive avec la tradition de quatre siècles. Ce n'est pas pur hasard si la poésie " moderne " déconcerte, voire scandalise le lecteur naïf ou cultivé. Le contraire serait étonnant. Les romantiques français, malgré leurs parades, continuaient les écrivains pré-révolutionnaires, par l'intention de leur art et leur rhétorique ; comme, idéologiquement par leur déisme, Lamartine et Vigny prolongent Parny et Chénier. Musset est bien un enfant du Grand Siècle (je veux dire le XVIIIe) Hugo ne deviendra le visionnaire de la Bouche d'Ombre qu'après l'exil de Guernesey. Au contraire, avec les Fleurs du Mal, la rupture avec une poésie gnomique, didactique, de vocation (fût-ce sous le masque du lyrisme), est implicitement consommée. On comprend que Faguet ait méprisé Baudelaire de n'avoir aucune idée neuve ­ lui pour qui il fallait " de Vigny attendre jusqu'à Sully Prudhomme pour trouver des idées nouvelles dans les poètes français ". (Mallarmé lui aurait sans doute répondu en souriant, comme il fit un jour à Degas, qu'un sonnet n'était pas fait d'idées mais de mots. Mais ceci n'épuise pas la question.) Avec Baudelaire, se réclamant plus ou moins consciemment des romantiques anglais (par l'intermédiaire de Poe), la poésie change de rôle : elle n'a plus pour fin de raconter une histoire, de décrire un spectacle, de communiquer un état d'âme. On va vers un art qu'on pourrait dire " non-figuratif " ­ où la figuration est passée au second plan, le contenu objectif devenu accessoire, là même où il paraît subsister. Verlaine, Mallarmé, Rimbaud, les symbolistes de langue française, par-delà leurs différences, auront en commun cette conception novatrice, subversive de l'activité poétique ­ qui vite ira influencer au-delà des frontières W.-B. Yeats, Alexandre Blok, Rilke, et la génération suivante : García Lorca, T.-S. Eliot, Boris Pasternak, Maïakovski, Rafaël Alberti, et qui chez nous guidera diversement Apollinaire, les surréalistes, Raymond Queneau et Henri Michaux.

« Du symbolisme au surréalisme Poetry is a divine instinctand unnatural rage passingthe reach of common reason.(Spencer) Depuis le milieu du XIXe siècle se poursuit et se consolide sous nos yeux une révolution poétique dont le caractèreradical, soupçonné, n'a peut-être pas été assez vigoureusement mis en évidence : avec Baudelaire et après lui, cen'est pas seulement la " diction " poétique qui change, les thèmes communs, tropes ou versification ; subtilement,l'idée même qu'on se fait de la poésie, de ses pouvoirs et de ses fins, de son apport à la prose, de l'usage spécifiquedu langage qui la constitue, se transforme du tout au tout, pour une rupture sans doute définitive avec la traditionde quatre siècles.

Ce n'est pas pur hasard si la poésie " moderne " déconcerte, voire scandalise le lecteur naïf oucultivé.

Le contraire serait étonnant.

Les romantiques français, malgré leurs parades, continuaient les écrivains pré-révolutionnaires, par l'intention de leur art et leur rhétorique ; comme, idéologiquement par leur déisme, Lamartine etVigny prolongent Parny et Chénier.

Musset est bien un enfant du Grand Siècle (je veux dire le XVIIIe) Hugo nedeviendra le visionnaire de la Bouche d'Ombre qu'après l'exil de Guernesey.

Au contraire, avec les Fleurs du Mal, larupture avec une poésie gnomique, didactique, de vocation (fût-ce sous le masque du lyrisme), est implicitementconsommée.

On comprend que Faguet ait méprisé Baudelaire de n'avoir aucune idée neuve lui pour qui il fallait " deVigny attendre jusqu'à Sully Prudhomme pour trouver des idées nouvelles dans les poètes français ".

(Mallarmé luiaurait sans doute répondu en souriant, comme il fit un jour à Degas, qu'un sonnet n'était pas fait d'idées mais demots.

Mais ceci n'épuise pas la question.) Avec Baudelaire, se réclamant plus ou moins consciemment desromantiques anglais (par l'intermédiaire de Poe), la poésie change de rôle : elle n'a plus pour fin de raconter unehistoire, de décrire un spectacle, de communiquer un état d'âme.

On va vers un art qu'on pourrait dire " non-figuratif " où la figuration est passée au second plan, le contenu objectif devenu accessoire, là même où il paraîtsubsister.

Verlaine, Mallarmé, Rimbaud, les symbolistes de langue française, par-delà leurs différences, auront encommun cette conception novatrice, subversive de l'activité poétique qui vite ira influencer au-delà des frontièresW.-B.

Yeats, Alexandre Blok, Rilke, et la génération suivante : García Lorca, T.-S.

Eliot, Boris Pasternak, Maïakovski,Rafaël Alberti, et qui chez nous guidera diversement Apollinaire, les surréalistes, Raymond Queneau et Henri Michaux. Déjà chez les romantiques français, spécialement Hugo et Vigny, s'esquissent les attitudes qui obligent à cettetransformation radicale : la jalousie à l'égard du Dieu créateur ; l'impossibilité pour un moi orgueilleux de tolérer lamasse énorme qui l'accable de toute part ; le refus, en conséquence, de " servir " la gloire divine en y ajoutantencore louanges ou reflets.

La poésie ne pourra plus, dès lors, être qu'à des fins destructrices, à tout le moinsnégatives.

" La nature a eu lieu, on n'y ajoutera pas ", dit Mallarmé.

Phrase en apparence anodine, simpleconstatation de bon sens : à cause d'elle, pourtant, un écrivain ne pourra plus vouloir se poser en rival (ambitieuxou timide) de l'Être Suprême, espérer faire concurrence à ce qui est.

La conscience humaine se trouve rejetée surelle-même ; nulle tendresse perdue entre elle et le reste du monde ; les premières illusions romantiques sur la naturesont loin, avec Hugo, Vigny ; Baudelaire, lui, préférera ostensiblement le Minéral.

" Qui oserait assigner à l'art lafonction stérile d'imiter la nature ? " dit-il dans L'Éloge du Maquillage, et, pour Mallarmé, les fleurs, l'azur, leprintemps sont aussi insultants, écoeurants dans leur vaine prolifération, inquiétants aussi, que pour l'AntoineRoquentin de Sartre. Aussi la poésie ne pourra-t-elle plus avoir pour objet de dire quelque chose de positif, de chanter les amours dupoète ou les idylles du roi, décrire un paysage de neige ou un jaguar (comme firent Gautier, Leconte de Lisle), ouraconter quelque histoire qui élève l'âme, la Mort du Loup, Hypatie, Enoch Arden.

Elle devra au contraire alléger lemonde de son trop de substance, le délester de sa massivité, tel sera désormais l'objet de la poésie, employer lelangage et la rhétorique à creuser des vides à l'intérieur de l'Être, non à l'accroître en y ajoutant d'autres objets.

Legrand instrument de cette excavation du monde sera le Symbole qui, même sous ses formes les plus simples,apparaît d'emblée comme un moyen de spiritualiser le sensible, donc de lui retirer sa lourdeur, son opacité, pour lefaire exister sur le même mode que la conscience.

Le caractère athée, impie, voire satanique de l'entreprise,n'affleure pas toujours à la conscience de ceux qui s'y appliquent.

Chez Baudelaire, la doctrine des "correspondances " demeure prudemment ambiguë, quant à ses intentions dernières.

Mais les poèmes inquiétantsabondent, ailleurs que dans la section intitulée " Révolte ".

Se confiant à Jules Huret, la plupart des symbolistes "officiels ", de Maeterlinck à Saint-Pol-Roux, affectent de tenir la métaphore pour un simple instrument d'explorationdu réel, qui nous révèle d'emblée une vérité concrète, singulière, mais absolue, cachée derrière les apparences, quidonc éclaire pour nous la " vraie " nature des choses.

Tel est à peu près l'usage qu'en fera Claudel.

Mais vitel'exploration glisse à l'appropriation : les métaphores de Giraudoux, par exemple (j'élargis, on le voit, la notion depoète), sont dès les premiers livres un effort pour humaniser la nature, pétrir de conscience le monde extérieur, brefcréer les choses à l'image muable de l'homme.

Je glane au hasard, dans les Provinciales, ces tendres exemples : "Attachés les uns aux autres par une corde à étendre le linge, avec les précautions d'alpinistes à l'approche d'unecrevasse, des chênes se hasardaient jusqu'au ruisseau...

" " Une tourterelle roucoula et avança sa tête hors du nid,pour montrer son anneau conjugal...

" Même la fantaisie n'est pas ici, on le voit, sans intention corrosive : il s'agit de dépouiller le non-moi, l'extra-humain,de son arrogante altérité par rapport à nous.

Qu'est-ce que c'est que ce monde qui se permet d'exister. »

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