Dissertation sur la polyphonie dans les Lettres Persanes
Publié le 27/02/2022
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Léonore Girardet
108
DM : Dissertation
Sur les Lettres persanes de Montesquieu
« Le régime de l'ouvrage est celui de la pluralité des consciences et de la diversité des points de
vue.
» affirme Jean Starobinsky dans sa critique des Lettres persanes (1721).
Comme le souligne
l’historien des idées et théoricien de la littérature, la narration de ce roman est faite par plusieurs
personnages bien différents les uns des autres, qui vivent la découverte du nouveau, chacun à leur
manière et avec leur propre point de vue.
L’intrigue du roman de Montesquieu, philosophe des
Lumières, repose en effet sur une écriture à plusieurs voix dite polyphonique.
Mais dans Quelques
réflexions sur les Lettres persanes , l’auteur masqué par l’anonymat écrit aussi s’être donné
« l’avantage de pouvoir joindre de la philosophie, de la politique à son roman ».
Il semble donc
légitime dans le contexte du courant des Lumières -marqué par la réflexion philosophique mais aussi
par la critique du pouvoir politique, religieux et des mœurs- de s’interroger sur le recours à la
polyphonie dans le roman comme moyen pour éveiller la conscience des lecteurs sur la société dans
laquelle ils vivent.
Les lettres persanes apparaissent comme un roman épistolaire rassemblant
principalement la correspondance fictive échangé entre deux voyageurs persans, Usbek et Rica, et
leurs amis et femmes restés en Perse.
Le livre reste complexe puisqu’il compte jusqu'à 161 lettres qui
s'étalent sur plus de neuf ans.
Alors, comment Montesquieu peut-il dans ce roman mettre en scène la
rencontre de différentes consciences tout en incitant le lecteur à se questionner sur les mécanismes
et les ressorts de la société française ? Nous verrons d’abord que le recours à la polyphonie est une
richesse pour le roman et permet une critique de la société française, puis on étudiera quels sont les
limites et inconvénients de ce dispositif narratif pour la réflexion du lecteur.
Les Lettres persanes , présentent effectivement des visions qui nourrissent la réflexion du lecteur
et le poussent à se questionner sur la société dans laquelle il vit grâce au recours à la polyphonie.
Cette dernière est caractérisée par une multiplication des regards qui permet une confrontation
des points de vue.
En effet, sont présents dans l'œuvre une douzaine de narrateurs.
Tous ces
personnages qui expriment leurs pensées à travers les lettres, présentent des différences bien
marquées.
Ils sont géographiquement éloignés, les uns en France (comme Usbek et Rica) et les autres
en Perse (au sérail) ou dans d'autres villes européennes (Rhédi à Venise).
Ils peuvent avoir des places
distinctes dans la hiérarchie sociale persane comme Usbek qui est le chef du sérail d’Ispahan et
maitre des eunuques qui lui sont alors soumis.
La diversité des sexes des narrateurs est bien
représentée, avec une majorité d’hommes mais les femmes du sérail comme Roxane s’expriment
aussi, de même que les eunuques qui n’ont pas de sexe défini.
A travers ce jeu de regards croisés, les
personnages persans et plus particulièrement Usbek critiquent la société française notamment
l’absolutisme royal.
Usbek s’interroge sur les différentes formes de gouvernement : « j’ai longtemps
recherché quel était le gouvernement le plus conforme à la raison ».
Il est intéressant de noter une
multiplication des réflexions politiques après la lettre 92 évoquant la mort de Louis XIV (auparavant
comparé à un « grand magicien » dans la lettre 24).
Par cela, Montesquieu cherche à interpeller ses
lecteurs par une prise de conscience politique.
Cette polyphonie, par la multiplicité de ses points de
vue, parfois sur une même réalité, donne à l'œuvre une grande dimension.
Ainsi le sérail a une triple
apparence : celle d’Usbek, celle des eunuques, celle des épouses et amène à une réflexion sur le
pouvoir.
La diversité des voix, de par leur origine et leur ton enrichissent le contenu des lettres.
De plus, Montesquieu élabore son roman polyphonique en faisant parler des persans qui
représentent un regard éloigné.
Soigneusement caché sous le masque de ces personnages persans.
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