Dissertation Shakespeare: Comment Antoine parvient-il à retourner la foule des citoyens contre Brutus ?
Publié le 26/05/2021
Extrait du document
«
Shakespeare, Jules César , III, 2 (1599) :
Brutus et Antoine devant le peuple.
Comment Antoine parvient-il à retourner la foule des citoyens contre Brutus ?
Jules César est une tragédie en cinq actes de William Shakespeare, incontournable dramaturge
anglais, probablement écrite en 1599 et publiée pour la première fois en 1623.
Montée pour l'ouverture
du Globe Theatre à Londres, elle relate la conspiration contre Jules César, son assassinat et ses
conséquences.
Nous étudierons ici la scène 2 de l'ac te III, dans laquelle Brutus, que César aimait
comme son propre fils, explique les raisons profondes de son geste à la foule des Romains rassemblés
au Forum, la place publique de la ville.
Mais si ceux-ci semblent d'abord être convaincus par son
discours, Antoine, qui prend la parole peu après Brutus, leur fait changer d'avis rapidement.
Aussi, nous
nous demanderons comment Antoine parvient-il à retourner la foule des citoyens contre Brutus ? Nous
répondrons à cette question en nous appuyant notamment sur l'utilisation des notions d'ethos, de logos
et de pathos, ainsi que sur la progression du discours.
Nous commencerons notre réflexion par une comparaison directe des deux discours, qui au premier
abord paraissent semblables.
On remarquera en effet la présence commune chez les deux orateurs d'un
exorde assez puissant qui est introduit chez Brutus comme chez Antoine par une apostrophe de la foule,
« Romains, compatriotes et amis ! » et « Amis, Romains, compatriotes ».
Brutus fait l'usage dans celle-
ci d'une gradation ascendante qui cherche à créer un lien proche et presque amical et à diminuer la
distance entre son auditoire et lui-même.
Antoine, quant à lui, utilisera les mêmes termes sans paraître
les ranger dans un ordre particulier, mettant toutefois « Amis » en premier mot de son discours.
De la même manière, on pourra observer un certain lien de continuité qui renforce la volonté de
rapprochement avec l'auditoire citée précédemment.
En effet, elle s'illustre à travers les nombreuses
questions et exclamations rhétoriques que déclameront à la suite Brutus et Antoine : « Qui dans cette
foule est assez bas pour vouloir être esclave ? » et « […] je lui ai présenté trois fois une couronne
royale, et que trois fois il l'a refusée : était-ce là de l'ambition ? », qui appuient leurs volontés
polémiques.
Enfin, on peut noter leur utilisation commune et nombreuse d'oppositions antithétiques marquées par
une abondance de connecteurs logiques « mais », « pourtant » et « cependant », qui délimitent les deux
discours afin de susciter l'indignation du public.
Nous poursuivons notre analyse en étudiant de plus près le discours délivré par Brutus.
Ce dernier
va majoritairement s'appuyer sur l'idéal Républicain et la collectivité.
Premièrement, on souligne qu'il est presque logique de s'attendre de la part de deux sénateurs romains à
ce qu'ils utilisent un genre délibératif, assez propre à la politique.
Effectivement, la justification de
l'assassinat aurait pu être effectuée à travers les fins de ce genre : le meurtre de Jules César est-il un fait
nuisible ou utile à la collectivité ? C'est ce que va faire en partie Brutus, mais pas uniquement.
En effet,
Brutus , républicain fervent et principal conspirateur de César, s'appuie sur différentes entités politiques
pour justifier son geste.
Il joue d'abord sur ce qu'on appelle en rhétorique le « logos », c'est-à-dire sa
capacité à convaincre le peuple par l'exposition de faits logiques menés par la raison, en déclarant
notamment qu'il « aimai[t] Rome davantage » face à un César « ambitieux », exposant donc sa
profonde loyauté à la République romaine.
Il justifie donc son geste par une défense logique de sa
raison, et non pas comme une attaque personnelle à la République de César : « Comme César m'aimait,
je le pleure ; comme il fut heureux, j'ai applaudi à sa fortune ; comme il était vaillant, je l'honore : mais
comme il était ambitieux, je l'ai tué .
».
Il se place ainsi en défenseur des valeurs de Rome..
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