dissertation la place du droit de l'union européenne dans le droit administratif français
Publié le 31/10/2024
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SÉANCE 4 : LA PLACE DU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE DANS LE DROIT
ADMINISTRATIF FRANÇAIS.
Le dualisme juridictionnel, qui est propre au système juridique français, se
compose de deux ordres de juridiction avec d’un côté le juge judiciaire et de l’autre
le juge administratif qui a souvent exprimé une certaine réticence à l'égard du droit
de l'Union européenne, considéré comme un droit « venu d'ailleurs », comme le
souligne le doyen Jean Carbonnier, en référence au système juridique issu de
l'organisation politique de l'Union européenne.
Le droit de l’Union européenne désigne toutes les normes juridiques
s’appliquant aux 27 États membres de l’Union européenne dont l’objectif est
principalement la coopération économique, monétaire et sociale.
Les normes
constituant le droit de l’Union européenne sont de deux ordres, il y a le droit primaire
ou originaire et le droit dérivé.
Le droit primaire ou originaire correspond aux règles
posées par les traités fondateurs de l’union européenne à l’instar du traité de Rome
de 1957, de l’acte unique européen de 1986, ou encore le traité de Maastricht de
1992.
Le droit dérivé quant à lui correspond au droit adopté par les institutions de
l’union européenne tel que le Parlement Européen, le conseil de l’union européenne,
la commission européenne ect..
Le droit de l'Union Européenne est donc le droit qui
résulte des traités de l'Union européenne et du droit élaboré dans le cadre des
institutions de l'Union Européenne.
Toutes ces normes doivent être applicables dans
les États membres, notamment par le juge administratif français.
Le droit
administratif est une branche du droit public qui régit l’organisation et le
fonctionnement de l’Administration et qui organise les relations entre l’Administration
et les particuliers.
Le droit administratif se développe notamment grâce à la
jurisprudence, qui, établie par le juge administratif, permet une évolution constante
du droit.
Cependant, ce dernier doit respecter la hiérarchie des normes, un concept
formulé par Hans Kelsen, illustré par sa célèbre "pyramide des normes".
Cela
implique une structure hiérarchique des normes juridiques, où chaque norme tire sa
validité de sa conformité avec la norme supérieure immédiate.
Dans le cadre du droit
interne français, cette hiérarchie est dominée par la Constitution, considérée comme
la norme suprême.
Toutefois, cet ordre juridique interne a été profondément modifié
par l'intégration d'une nouvelle source de droit : le droit international, en particulier
le droit de l’union européenne.
Le droit d'origine international a acquis une importance quantitative
significative au cours des dernières décennies, notamment en ce qui concerne les
sources du droit administratif.
Actuellement, la France est signataire d'environ 7 000
traités ou accords, parmi lesquels plus de 60 % relèvent du droit de l'Union
européenne, qui à lui seul génère plus de 15 000 normes, qu'elles soient originaires
ou dérivées.
En rapport avec l'ensemble de l'ordonnancement juridique, les normes
internationales représenteraient 17 % de l'ensemble des règles qui le composent.
Cette proportion connaît une augmentation régulière, car depuis 1992, l'Union
européenne introduit chaque année davantage de normes dans notre corpus
juridique que le gouvernement français.
La Constitution de 1958 réserve une place
particulière aux traités signés par la France, en précisant dans son article 55 « Les
traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de
son application par l'autre partie ».
Cet article consacre la primauté du droit
international sur les lois et confère aux normes internationales une force obligatoire
vis-à-vis des autorités administratives.
Néanmoins il faut souligner que l’article 55 ne
précise pas les rapports avec la Constitution.
Quelle est l’interprétation du principe de primauté du droit de l’union
européenne dans la pratique du droit administratif français ?
Nous allons d’abord voir comment le droit de l’Union européenne s’impose dans
le droit administratif français (I) puis voir les limites qui encadrent cette application
(II).
I) LA POSITION DOMINANTE DU DROIT DE L’UNION EUROPÉENNE DANS LE
CADRE DU DROIT ADMINISTRATIF FRANÇAIS
Après avoir analysé la primauté du droit de l'Union européenne dans le cadre de
la légalité administrative française ( A) il faut de se pencher sur les mécanismes qui
assurent une transposition efficace de ces normes communautaires dans le droit
national ( B).
A) La primauté du droit européen sur le bloc de légalité
Le droit de l'Union européenne représente une source fondamentale de la
légalité administrative en France, principalement en raison du principe de primauté.
Ce principe dispose que le juge doit écarter toute règle de droit national incompatible
avec une règle du droit de l'Union européenne, et il est inscrit à l'article 1er du Traité
sur l'Union européenne (TUE).
Ce principe a été confirmé par un arrêt majeur de la
Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE), « Costa contre Enel » en
1964, qui affirme la supériorité du droit européen sur le droit national, entraînant
des répercussions directes sur les actes administratifs français.
Cependant, les juges
français ont initialement eu des réticences à reconnaître cette primauté, la percevant
comme une atteinte à la souveraineté nationale.
La reconnaissance de cette
prééminence par le juge administratif a été le résultat d'une évolution
jurisprudentielle significative.
Au début, le juge a refusé de contrôler la conformité
des lois avec les normes internationales, illustré par l'arrêt « Syndicat général des
fabricants de semoules de France » (1er mars 1968), où le Conseil d'État a choisi de
ne pas écarter une loi nationale en raison de son incompatibilité avec un règlement
de l'Union européenne.
Selon le CE, la primauté des normes constitutionnelles et
internationales ne lui permettait pas de contester une loi, et la vérification de la
conformité à une norme internationale relevait du contrôle de constitutionnalité,
compétence exclusive du Conseil constitutionnel.
Cependant, ce dernier a également affirmé, dans sa décision du 15 janvier 1976
(IVG), qu’il n’était pas compétent pour juger de la conventionnalité des lois.
Cette
lacune a rendu difficile l'affirmation de la supériorité des normes internationales sur
le bloc de légalité.
Une évolution majeure a eu lieu avec l'arrêt « Nicolo » (20
octobre 1989), où le Conseil d'État a reconnu la supériorité des traités sur les lois,
s'appuyant sur l'article 55 de la Constitution.
Cette tendance s'est élargie aux règlements (CE, 24 septembre 1990, « Boisdet ») et
aux directives (CE, Assemblée, 28 février 1992, « Société Anonyme Rothmans
International France »), confirmant ainsi la prééminence des normes internationales
écrites sur les lois.
Toutefois, cette prééminence ne s'étend pas à la coutume
internationale, comme l’a précisé le Conseil d'État dans l'arrêt « Aquarone » (6 juin
1997), où il a statué que la coutume internationale ne s’impose pas aux lois, mais
peut s'appliquer aux actes administratifs.
Ainsi, après avoir examiné le statut du droit de l'Union européenne comme source de
légalité administrative, il est essentiel d'explorer les mécanismes qui garantissent
une transposition efficace de ces normes communautaires dans le droit national.
B) Les mécanismes garantissant la transposition des normes
communautaires dans le droit national
Dans le droit dérivé de l'Union européenne, on trouve principalement les
règlements, les directives et la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union
européenne.
Un règlement de l'Union européenne s'applique directement, ce qui
signifie qu'aucun organe national (comme le Parlement ou le Gouvernement) n'a
besoin de le transposer pour qu'il entre en vigueur dans le droit national.
En
revanche, les directives nécessitent une transposition.
Pour garantir l'efficacité du droit de l'Union, les directives doivent être intégrées dans
le droit national par les États membres, suivant des mécanismes précis et des
obligations strictes.
Selon l'article 288 du Traité sur le fonctionnement de l'Union
européenne (TFUE), les directives imposent aux États d'atteindre des objectifs
spécifiques tout en leur laissant le choix des moyens pour y parvenir.
Les États
doivent ainsi les intégrer dans leur législation nationale dans un délai déterminé,
généralement de deux à trois ans.
Cela nécessite l'adoption d'un acte de
transposition (loi ou décret) pour aligner la législation nationale sur les objectifs de la
directive.
Par exemple, une directive de l'Union européenne du 25 juillet 1985
relative à la responsabilité du fait des produits défectueux a contraint les États
membres à établir des réglementations sur cette question.
La France a mis en œuvre
cette directive par une loi du 19 mai 1998, instaurant ainsi une responsabilité pour
les dommages causés par des produits défectueux.
Aujourd'hui, les directives de
l'Union européenne constituent une source essentielle de légalité administrative,
ayant une valeur supérieure....
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