Dissert Manon Lescaut
Publié le 23/03/2025
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«
Dissertation sur œuvre
Au XVIIIème siècle, Antoine François Prévost, dit l’Abbé
Prevost, mène une vie singulière, oscillant entre carrière
ecclésiastique et carrière militaire.
Lorsqu’il publie en 1731, son
œuvre intitulée l’Histoire du Chevalier des Grieux et de Manon
Lescaut, Prévost quitte l'ordre des Bénédictins, voyage en
Angleterre et adopte le pseudonyme de l'abbé d'Exiles.
Il se
distingue notamment par son roman-mémoire, dont le style est
très en vogue dans le dernier quart du XVIIe siècle, en sept
tomes et intitulé Les Mémoires et aventures d’un homme de
qualité qui s’est retiré du monde, dont le dernier correspond au
récit de Manon Lescaut.
Bien plus qu'un simple prédicteur
bénédictin, il se positionne en fin observateur de la société et de
la variété des passions humaines.
Très mal considérée par les
critiques au départ, l’œuvre offre au lecteur les aventures de
deux libertins captivantes, authentiques et enrichies d'une
analyse psychologique subtile et chargée de sens.
Le plaisir de
lire Manon Lescaut, ne tient-il qu’au récit d’une passion
amoureuse ? Cet ouvrage se limite-t-il à une histoire
passionnée,
ou nous plonge-t-il dans une réflexion plus
profonde ? Certes, le récit d’une passion amoureuse constitue
une ressource plaisante pour le lecteur.
Cependant, l’attrait
littéraire réside dans d’autres aspects romanesques.
En fait, le
plaisir de cette lecture cache
une visée profonde voire
moralisatrice.
Certes, dans l’œuvre de L’abbé Prévost, la passion
amoureuse occupe une place centrale dans le récit et participe,
au plaisir du lecteur.
Dans Manon Lescaut, Prévost entraîne le lecteur dans un
tourbillon émotionnel à travers le récit d’une histoire d’amour
entre le personnage de des Grieux, un jeune aristocrate,
initialement bien intégré à la société, et le personnage de Manon
Lescaut, une femme de mauvaise condition.
Dès les premières
pages, l'ingéniosité de l'écrivain se révèle à travers sa volonté
d'insuffler un sentiment de vraisemblance dans son écrit.
En
créant l'illusion d’une expérience réelle, il fait adhérer le lecteur
au récit de cette passion amoureuse.
À travers le récit enchâssé,
le marquis de Renoncour cède la place au témoignage de des
Grieux avec une sincérité palpable : « J’écrivis cette histoire
presque aussitôt après l’avoir entendue » (Prévost, Manon
Lescaut, Première partie).
Le lecteur est plongé dans l'univers
émotionnel du protagoniste se positionnant comme témoin des
sentiments exaltés, aussi empreint de sincérité que de naïveté :
« Elle me parut si charmante que moi, qui n’avais jamais pensé
à la différence des sexes, ni regardé une fille avec un peu
d’attention, moi, dis-je, dont tout le monde admirait la sagesse et
la retenue, je me trouvai enflammé tout d’un coup jusqu’au
transport » (Prévost, Manon Lescaut, Première partie).
Les
sentiments du protagoniste, l’entraînent tout au long du roman
dans une série d'aventures, composante de l’intrigue et qui
captive le lecteur.
Ce dernier est témoin d’un personnage, épris
d'un amour qui l'aveugle et le confronte constamment aux
dangers extérieurs.
Un amour qui le contraint à faire des
sacrifices tels que celui de renoncer à sa carrière religieuse et
d’agir de manière répréhensible.
Paradoxalement, bien que ses
actions soient condamnables, le lecteur en vient à éprouver de
la sympathie, voire de la tendresse à son égard, qui s’explique
par la beauté de sa passion.
Dans la première partie du roman,
des Grieux trahi et emprisonné pendant six mois, reprend goût
aux études et s’apprête à devenir abbé.
Mais un
rebondissement brutal surgit, puisque Manon le retrouve au
parloir, lui exprimant ses regrets : « Je prétends mourir […] si
vous ne me rendez votre cœur, sans lequel il est impossible que
je vive ».
Des Grieux lui pardonne et cette scène pleine de
pathétique émeut le lecteur : « Ce qu’il y a de fort dans Manon
Lescaut, c’est le souffle sentimental, la naïveté de la passion qui
rend les deux héros si vrais si sympathiques, si honorables,
quoiqu’ils
soient
fripons.
»
(Gustave
Flaubert,
Correspondance,1861)
Mais, le plaisir du lecteur s'étend à d'autres aspects
romanesques.
En effet, l'écrivain entremêle différents genres,
registres et même classes sociales, créant ainsi une dynamique
narrative où une inversion des rôles se dessine.
Dans la
première partie du roman, des Grieux se fait passer pour le
jeune frère de Manon afin de se faire loger chez son ennemi.
La
révélation de son imposture, lors du souper contribue au plaisir
subversif du lecteur : « Cette tragédie ressemble constamment à
une comédie qui tourne mal » (Charles Mauron 1963).
De plus,
Prévost construit à l’effigie de Manon un personnage complexe
qui défie les conventions sociales établies.
Apparaissant comme
l’élément déclencheur de l'intrigue et comme celle qui insuffle ce
souffle sentimental, elle fascine par son caractère ambigu et
protéiforme....
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