Daniel Arasse, On n'y voit rien, fiche
Publié le 15/05/2024
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Daniel Arasse – On n’y voit rien
aniel Arasse est né en 1944 àAlgeret mort en 2003àParis, et est unhistorien de l’art
D
français, spécialiste de laRenaissanceet de l'artitalien.
Il est reçu premier à l'Ecole Normal
Supérieur puis fait sa thèse à l’Université de la Sorbonne.
Indépendamment de son parcours
professionnel, Daniel Arasse fut apprécié du grand public pour ses qualités de vulgarisation
et son partage de ses analyses d’œuvres dans lesquelles il se défend de « sur-interpréter »
le contenu : il met en valeur ce qui est visible par tous et incite à regarder par soi-mêmes et
à ne pas soumettre excessivement le figuratif à l'ordre du discours savant.
Dans son
ouvrageOn n’y voit rien,composé d’une série de courtesfictions narratives, il s'interroge de
la compréhension de la peinture et tente de répondre à ces questions.
1) Cara Giulia
es œuvres n’ont pas un seul sens, une seule interprétation possible.
Arasse et Giulia ont
L
des points de vue différents sur certaines œuvres, et Giulia se sert d'écrans pour les
interpréter.
Il prend l’exemple duMars et Vénus surprispar Vulcainde Tintoret.
Giulia y fait une lecture morale, où Tintoret exploite les pouvoirs de l’image pour canaliser le
désir féminin ( Mars ridicule, Vénus honteuse et Vulcain digne).
Arasse lui reproche de
rester trop sérieuse dans son approche et de refuser d’y voir un côté comique.
Tintoret a une approche inhabituelle de la scène, et selon Giulia, cette représentation
paradoxale est une allégorie et sert à exalter les mérites de la fidélité conjugale; elle
s’appuie sur des textes publiés à Venise a cette époque condamnant l'adultère et les images
érotiques.
Mais pour Arasse, cela ne constitue pas de preuves: il peut exister des points de
vue contradictoire dans une même société, ce n’est pas parce que ces textes existent au
même moment que le tableau qu’ils sont liés.
Et toute représentation paradoxale n’est pas
allégorique.
Giulia note la position comique de Mars, elle permettrait de mettre en valeur la dignité
mélancolique de Vulcain.
Arasse souligne que Vulcain est boiteux et sourd: il ne réagit pas
aux aboiements du chien avertissant de la présence de Mars.
C’est surtout qu’il est plus
préoccupé par la nudité de sa femme et son désir.
Le miroir qui les reflète est situé bas, position étrange, et servirait alors à refléter les “ébats
de Vénus”, ce qui éloigne d’une lecture moralisante.
Giulia le dit être le bouclier de Mars,
comme celui d'Enée qui montre le futur de Rome.
Un miroir caché se trouve dans la
réflection de ce dernier, qui permettrait à Vénus de voir Vulcain arriver par le fond même en
lui tournant le dos.
Giulia oppose celui-ci, instrument de tromperie, a l’autre révélateur de
vérité.
Mais quelle vérité? On voit le futur proche, Vulcain qui va monter sur le lit sur le grand
miroir.
Il vient interrompre Vénus et Mars, et est pris sous le charme du sexe de son épouse.
Pour Arasse, cela correspond àl'invenzionede Tintoret:il condense le nœud comique et la
moralité du tableau.
Ce tableau est en effet comique, seule Vénus n’est pas drôle, elle est dans une situation
inconfortable, mais elle ne se fait pas attraper.
La moralité (machiste) du tableau est que les femmes sont toutes des séductrices qui
aveuglent les hommes.
Arasse s’appuie sur des textes pour que son interprétation ne reste
pas seulement subjective, des textes hostiles au mariage sont nombreux à être publiés à
Venise à cette période.
Mais Arasse souligne que ce n’est pas les textes qui lui ont fait voir
e qui se passe dans le tableau, contrairement à Giulia qui donne l’impression de partir des
c
textes pour interpréter les tableaux.
Giulia trouve aussi le thème matrimonial dans le tableau, car il ya une femme nue, mais la
femme nue est banal a cette époque.
Arasse fait l'hypothèse que le tableau fut peint pour
une grande courtisane de Venise pour participer au “decorum”.
Il n’a pas de preuve, et Giulia
n’est pas d’accord, ce n’est pas historiquement sérieux, mais il y a eu des peintres
“incorrects”.
2) Le regard de l'escargot
'Annonciation, Francesco del Cossa
L
Un escargot se trouve au 1er plan, c’est surprenant, que fait-il là?
La solution: l’iconographie: l’escargot est une figure de la Vierge, on pensait en effet que
l’escargot était fertilisé par la rosée.
LeJournalof the Warburg and Courtauld Institutes, un
texte marial avec des escargots incrustés le prouve.
Mais cela ne convint pas Arasse, les escargots dans une scène d'Annonciation sont rares.
L’iconographie a écrasé l’escargot, a banalisé la rareté de cette figure.
La savante du
Journal of the Warburg and Courtauld Institutesnedit pas pourquoi l’escargot est là, mais a
trouvé une des conditions de son invention par Cossa: il fallait qu’il est un sens acceptable à
ses yeux et à ceux de ses commanditaires.
Pour répondre au pourquoi, il faut savoir ou se trouve dans le tableau le lieu de l’escargot.
l’escargot est au bord du tableau, le sens de la place de l’escargot dans tableau est
indissociable à la construction de perspective.
Cossa est original dans la construction de son
tableau: l’Ange et la Vierge sont représentés obliquements, et sont de part et d'autre de la
colonne centrale, presque cachés.
La colonne donne figure à la présence de la divinité dans
l’Annonciation.
Arasse fait d'abord une interprétation géométrique, avec l’axe escargot-
main de l’ange conduisait vers la représentation de Dieu, ce qui conduisait à l'idée que
l’escargot était sur terre l'équivalent de ce que Dieu était dans le ciel.
Mais il n’a trouvé
aucun texte décrivant Dieu comme un escargot.
Il ne croyait qu'à moitié à sa théorie, mais
ça montrait qu'on pouvait réfléchir quand on regarde un tableau.
L'escargot pourrait
cependant représenter selon un expert Dieu, et la longueur du délai qui sépare la chute
d’Adam et Eve de L'Annonciation, pourquoi Dieu a t’il était aussi lent, comme un l’escargot.
Cossa aurait donc utilisé l’escargot, image reconnue de la Vierge pour figurer Dieu, et aurait
donc opéré une condensation.
Mais Arasse n'était toujours pas convaincu de part le caractère exceptionnel de l'escargot.
L’escargot est gigantesque, disproportionné.
Et il est peint sur le tableau, mais pas dans le
tableau, seulement au bord, a la limite entre l'espace fictif et réel.
Ce n’est pas la seule
figure à être à la limite entre ces espaces: dans L'Annonciationde Filippo Lippi, un vase
transparent est posé au bord du tableau, il est le lieu d'entrée de notre regard sur le tableau.
Mais quel regard?
L'escargot ne ressemble visuellement en rien à la Vierge.
De même qu’un escargot n'est
pas comme la Vierge, l’Annonciation représentée n’a rien à voir avec l’Annonciation
advenue à Nazareth.
l’escargot insiste sur le fait que le tableau est une représentation, non
ressemblante, qui ne nous fera jamais voir l’objet providentiel de l’Annonciation, l'incarnation
du Dieu sauveur.
Cossa désigne la limite de la représentation en mettant l’escargot a la
limite de son tableau.
Serait-ce de la surinterprétation?
Cosme Tura a la même époque avait peint uneAnnonciationavec le même enjeu.
( Lorenzo Lotto a peint sur unSaint Jérôme pénitentune sauterelle sur le bord, presque posé sur son
cadre, qui nous dit comment regarder ce que nous voyons: fixant le lieu ou se joigne notre espace et
celui du tableau, elle invite à faire dans notre espace comme saint Jérôme dans le sien: fuire les
séductions terrestres et nous livrer à l'amour du Christ.)
’escargot n’a rien à faire dans le palais de Marie, l’invention de Cossa est donc
L
intellectuelle, théorique.
L’escargot est indissociable à la démonstration de la perspective.
Quand on est devant le tableau, l'escargot a l’air d’avoir une taille raisonnable, et la Vierge a
l’air petite.
Par sa disproportion, l'escargot fait échec à la profondeur fictive et restaure la
présence matérielle de la surface du tableau.
Le palais est rigoureusement inconstructible,
Cossa n’a donc pas cherché à construire une profondeur rigoureuse.
L'escargot nous
montre qu’il ne faut pas croire à l'illusion.
La perspective est une affaire de mesure qui
permet de faire voir la commensuration des choses Le monde n’est pas infini, seul Dieu
l’est.
L’Annonciation est le moment de l’Incarnation, donc le venue de l’incommensurable
dans la mesure.
La perspective réduit Dieu et la Colombe a une figure lointaine, Cossa fait
effleurer visuellement la présence invisible de ce qui échappe à toute mesure.
L'anomalie de
l’escargot nous fait signe: nous ne voyons rien dans ce que nous regardons.
De plus les
escargots y voient très mal, et sans le savoir, Cossa en a fait la figure d’un regard aveugle.
3) Un oeil noir
’Adoration des Mages(1564) de Bruegel, surnomméPierre le drôle, car donnait un
L
caractère trivial à ses peintures, présente dans celle-ci, bien plus que dans ses autres
peintures religieuses.
Cette peinture représente l’Epiphanie, la reconnaissance universelle
de l’Incarnation, et Brugel e, fait une représentation gauche et grossière: la soldatesque et
les lances, signes prémonitoires de la mort de Jésus, les rois qui n'ont pas de dignités, ils
ont l’air de vieillard gâteux et sals.
Josèphe....
»
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