Critiques de l'organisation scientifique traditionnelle du travail

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« Une autre preuve des tensions créées chez les ouvriers par l'organisation scientifique du travail traditionnelle est le désir de changement de travail, de promotion qu'ils manifestent et la manière dont ils l'expriment et le justifient. Ils se sentent liés, voire même rivés à ces tâches par la spécialisation, la division, la minceur, l'absence d'apprentissage qui les caractérisent. A travers leurs commentaires affleurent de la gêne, de l'amertume : ce sont des tâches qu'on n'a pas besoin d'apprendre, que n'importe qui, dressé en quelques jours, souvent en quelques heures, peut effectuer. Au contraire, dès qu'on les met à des travaux plus étoffés comportant un grand nombre d'opérations, des changements de tâches exigeant une plus longue durée d'initiation, leur complexe d'infériorité s'atténue, des signes de fierté au travail apparaissent, comme chez cet ouvrier spécialisé chargé de supprimer les bosses des capots : « Sur chaque voiture, les capots sont différents. J'ai pris six mois pour apprendre le « job ». Et, il faut des années pour y devenir vraiment bon. >> Aussi les ouvriers spécialisés aspirent-ils à être transférés vers des opérations pluri-spécialisées ou des opérations de contrôle, qui les unes et les autres, constituent à leurs yeux une véritable promotion. [...] II. Voici les conséquences globales de la super-spécialisation vues par l'Américain Worthy : << La taille de l'unité administrative devient trop grande; le travail perd toute signification pour l'opérateur spécialisé qui par suite tend à devenir peu responsable à l'égard de sa tâche élémentaire; face à l'apathie qui en résulte, la Direction alourdit la pression de sa surveillance, ce qui, en contrecoup, crée des tensions et des résistances passives ou actives dans le personnel et exige toute une cascade de contrôleurs, échelonnés et hiérarchisés; chaque unité fonctionnelle se replie sur elle-même, devient jalouse de ses prérogatives et, de l'une à l'autre, disparaît toute coopération spontanée; cette situation crée dans une entreprise ainsi organisée, parmi ses dirigeants du surmenage, un état d'esprit de crainte qui peut aller jusqu'à l'anxiété. [...] Nous ne pouvons avoir un organisme industriel en bonne santé, s'il est composé de groupes distincts de travailleurs et de penseurs. Nous ne pouvons compter sur un esprit d'équipe chez go % des membres du personnel si nous nous évertuons à leur répéter qu'ils ont pour fonction de travailler et nous de penser. » G. Friedmann : Déclin d'une orthodoxie Annales, économies, sociétés, civilisations 1955/3 A. Colin éd. ...»