Cour de cassation, 3ème Chambre civile, 17 novembre 2021
Publié le 19/01/2024
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TD 01 - Droits des sociétés : Commentaire d’arrêt
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 17 novembre 2021
« Affectio miserabilis », cette citation de L.
De Souza dénonce la notion d’affectio societatis
qui est de moins en moins appliqué et moins exigé par les sociétaires avec la facilitation de création
des sociétés de nos jours et leurs augmentation.
Dans cette optique, l’arrêt soumis à notre étude est
un arrêt qui émane de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 17 novembre
2021 traitant de la perte de cette affectio societatis et de ses conséquences, la Cour va casser et
annuler l’arrêt rendu le 28 novembre 2018 par la Cour d’appel de Toulouse.
En l'espèce, deux associés de la SCI Forêt Royale ont, à la suite de délibérations lors d'une
assemblée générale des associés, convenu de céder divers biens à une autre entité, en l'occurrence la
SCI Miami.
Il convient de noter que l'un de ces associés de la SCI cédante détient une proportion
majoritaire des parts et exerce la fonction de gérant de ladite société.
De manière signi cative, ce
même associé est également impliqué en tant qu'associé et gérant au sein de la SCI acquéreuse
Le second associé de la SCI cédante a initié une action en justice contre son confrère
associé.
Un appel a été interjeté.
Cette action vise à obtenir une indemnisation, tant à titre personnel
qu'au nom de la société, et à requérir la dissolution anticipée de ladite société, invoquant des
allégations d'abus de sa part en tant qu'associé majoritaire.
La Cour d'appel a statué en faveur de la
dissolution anticipée de la SCI cédante dans cette affaire.
Ce jugement a déclenché un pourvoi en
cassation déposé par l'associé gérant de la SCI ainsi que par la SCI Miami
Le requérant avance l'argument selon lequel la décision de dissolution anticipée de la société
ne repose pas sur des fondements légitimes.
Il argue que, conformément à la loi, la dissolution
anticipée pour "justes motifs" ne peut être prononcée que lorsque la société fait face à une paralysie
substantielle de son activité.
Il soutient que la Cour d'appel n'a pas été en mesure de déterminer si le
fonctionnement de la société était véritablement entravé en se fondant uniquement sur les
mésententes persistantes entre les associés.
De ce fait, il allègue que la décision de la Cour d'appel
enfreint les dispositions légales, plus précisément celles énoncées à l'article 1844-7 alinéa 5 du code
civil
La question soumise à l'appréciation de la Cour de cassation est la suivante : peut-on justi er
la dissolution anticipée d'une société en raison d'une mésentente entre deux associés, lorsque cette
mésentente n'entraîne pas une paralysie manifeste de l'activité de la société
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt au motif que la Cour d'appel n'avait pas
correctement pris en compte les éléments pertinents pour déterminer si l'activité de la société était
effectivement paralysée en raison de cette mésentente.
La Cour de cassation a jugé que les éléments
pris en compte par la Cour d'appel, tels que les con its lors des assemblées générales ou l'absence
de convocation de celles-ci, n'étaient pas suf sants pour établir une paralysie.
Par conséquent, elle a
conclu que la décision de dissolution anticipée était inappropriée, car aucune paralysie n'était
démontrée
Dans cette affaire, la Cour de cassation, de manière implicite, remet en question l'importance
de l'affectio societatis (I) en indiquant que la simple perte de cette affection ne suf t pas à entraîner
une dissolution anticipée.
Pour la dissolution anticipé, la Cour fait savoir qu’il est nécessaire de
démontrer également la paralysie du fonctionnement de la société (II).
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I.
La remise en cause implicite de l’importance de l’affectio societatis par la
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Indubitablement, l'on pourrait avancer qu'une remise en question de la primauté de l'affectio
societatis s'amorce en l’occurrence dans cette arrêt.
Toutefois, il convient de rappeler que cette
notion demeure indiscutablement l'un des trois piliers fondamentaux pour l'édi cation d'une société,
conjointement avec les apports et l'intention de partager les pro ts et les pertes.
Il est impératif de
souligner que l'appréciation de l'affectio societatis connaît des nuances signi catives entre le
moment de la constitution de la société (A) et son exercice ultérieur (B)
A.
L’affectio societatis, éléments nécessaire pour former une société
L'article 1832 du Code civil énumère les éléments fondamentaux pour la constitution d'une
société.
Cependant, à travers cette disposition, bien que la nécessité des apports et de l'intention de
partager les béné ces et les pertes soit clairement stipulée, le principe de l'affectio societatis ne s'y
trouve pas expressément énoncé.
Néanmoins, la jurisprudence (1) a depuis longtemps reconnu qu'il
s'agit d'un élément constitutif intrinsèque de la société.
L'affectio societatis se traduit par une
intention profonde de collaborer de manière concrète à l'exploitation d'un bien commun, dans un
esprit d'équité, où les associés s'engagent à partager les béné ces tout en acceptant de participer de
façon équitable aux pertes, tout en préservant l'intérêt commun.
Sans elle, la société ne pourrait, en
principe, fonctionner de manière harmonieuse dans ses opérations, c’est pourquoi elle est apprécié
au moment de la constitution.
La Cour de cassation, dans cet arrêt, souligne que la présence de
l'affectio societatis permet le bon fonctionnement en principe.
Ainsi, la nécessité de l'affectio
societatis se révèle incontestable
Bien que l'affectio societatis soit un élément essentiel de la formation du contrat, au même
titre que les deux autres conditions, il est compréhensible que les justiciables puissent penser qu'une
disparition de l'une de ces trois conditions entraîne automatiquement une dissolution anticipée de la
société.
Dans cet arrêt, le demandeur fait valoir que l'affectio societatis a effectivement disparu, ce
qui sous-entend qu'elle était présente initialement.
L'une de ses requêtes adressées à la Cour consiste
donc en la demande de dissolution anticipée de la société en raison de la disparition de l'affectio
societatis.
Toutefois, il est à noter que la Cour ne permet pas la dissolution anticipée en cas de
disparition
En cassant la décision de dissolution anticipée prise par la Cour d'appel de Toulouse, la Cour
de cassation met en lumière le fait que l'affectio societatis n'a pas la même importance au cours de
l'exercice de la société que lors de sa constitution initiale
B.
Une appréciation évolutive de l'affectio societatis au cours de l’exercice de la sociét
La Cour de cassation, en ne prenant pas en compte la disparition de l'affectio societatis, met
en lumière le fait que cette notion n'est pas appréhendée de la même manière lors de la formation du
contrat et lors de l'exercice de l'activité de la société.
En effet, l'affectio societatis représente
uniquement une condition prise en considération au moment de la création de la société, si elle
disparaît par la suite et que la société fonctionne bien cela ne dérange pas.....
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