Côte-d'Ivoire - 1988-1989: La Côte-d'Ivoire après la guerre du cacao
Publié le 14/09/2020
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Côte-d'Ivoire 1988-1989
La Côte-d'Ivoire après la guerre du cacao
A quatre-vingt-trois ans, le vieux président et leader du petit pré
-carré des anciennes colonies françaises,
Félix Houphouët-Boigny, a engagé un combat dont l'enjeu a large
ment dépassé les frontières de son
pays: cette bataille inédite dans l'histoire des matières premiè
res s'est livrée entre le 9 juillet 1987 et le 2
janvier 1989 à Abidjan.
Pendant ces dix-huit mois, la Côte-d'Ivoir
e a défié le marché international du
cacao au nom d'un "plus juste équilibre entre le Nord et le Sud".
En l'espace de trois campagnes, les cours du cacao se sont littéralem
ent effondrés.
Un état de fait que le
premier producteur mondial ne peut supporter: du cacao dépendent 40%
de ses ressources budgétaires
et 60% de ses recettes d'exportation.
Or, en ce mois de juillet 1987, al
ors que s'annonce pour la
campagne 1987-1988 une nouvelle récolte record de 690 000 tonnes, la
Côte-d'Ivoire perd entre 5 et 6
FF sur chaque kilo de fèves exporté.
Pour en finir avec la chute d
es cours, Félix Houphouët-Boigny
déclenche une grève sine die des ventes de cacao ivoirien.
Audace ou naïveté?
C'est la première fois qu'un pays producteur de cacao déclare ouve
rtement la guerre aux acteurs du
marché mondial.
Pour le vieux président ivoirien, il n'existe pas
de surproduction mondiale de cacao, les
seuls responsables de la crise que traverse son pays étant les courti
ers londoniens qui, sur les marchés à
terme, jouent avec du "cacao papier".
Autrement dit, "des spéculateur
s sans scrupules qui ne se soucient
pas des retombées de leurs actes pour les paysans ivoiriens".
Le mond
e du cacao va réagir avec force en
se liguant contre la Côte-d'Ivoire.
De commercial, le bras de fer dev
ient vite idéologique.
Présentée
depuis trois décennies, comme "vitrine de la France en Afrique", la C
ôte-d'Ivoire semble rompre le pacte
libéral qui la lie à l'Occident en remettant en cause les lois du
marché.
Au fil des mois, la tension ne cesse de monter, la "sainte alliance choc
olatière" jouant à plein.
En effet,
loin de s'affoler, les négociants, les courtiers, les industriels du
chocolat se sont organisés pour résister à
la privation subite d'un tiers du cacao mondial disponible.
Les chocolat
iers au cours de cette année 1988
ont réduit de moitié - de six à trois mois - leurs stocks garan
tis.
Les négociants se sont retournés vers
d'autres producteurs, heureux de saisir l'aubaine: le Brésil, la Mala
isie mais aussi le Ghana et le Cameroun
ont profité de l'embargo ivoirien pour augmenter leurs ventes.
Ainsi,
loin de remonter, les cours
mondiaux du cacao ont-ils poursuivi leur chute tout au long de l'anné
e 1988.
De 1410 livres sterling la
tonne, le 9 juillet 1987, ils sont tombés à 925 à la fin de 198
8.
Financièrement étranglée au moment de déclencher la grève
des ventes, la Côte-d'Ivoire a vécu toute
l'année 1988 au bord de la faillite.
En mai 1987, Abidjan avait une p
remière fois suspendu les
remboursements de sa dette évaluée à près de 10 milliards de
dollars.
Ce qui avait immédiatement
entraîné le blocage des nouveaux crédits que le FMI destinait à
Abidjan et la suspension, par la Banque
mondiale, des négociations sur le financement de nouveaux projets.
Au
ssi, pour ne pas se priver des
subsides internationaux - 2 milliards de francs promis en 1988 par la Fr
ance, la Banque mondiale et le
FMI - la Côte-d'Ivoire qui devait affronter pour 1988 un déficit d
e ses finances publiques de 200 milliards
de francs CFA (4 milliards de FF) avait repris langue avec ses créa
nciers au mois de décembre 1987.
Rééchelonnement de la dette
Le 29 avril 1988, un accord de rééchelonnement est conclu avec le
Club de Londres, reportant en 1993 le
remboursement du principal de la dette privée ivoirienne courant sur
les années 1985-1995 et son
étalement sur quinze ans.
Déjà, à la mi-décembre, la Cô
te-d'Ivoire avait obtenu du Club de Paris le
réaménagement de sa dette publique à partir de 1994 remboursabl
e sur dix ans.
Mais, moins d'un mois
plus tard, incapable d'honorer ses échéances, la Côte-d'Ivoire
ajourne à nouveau ses paiements.
Pour
épargner l'asphyxie à son "meilleur allié en Afrique", la Franc
e finit, à contrecoeur, par intervenir.
L'issue.
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