Cory Aquino
Publié le 16/05/2020
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Cory Aquino
Rien ne destinait Corazón Cojuanco à devenir présidente des Philippines.
Héritière d'une des plus riches familles del'archipel, les Cojuanco propriétaires d'immenses haciendas, dans la région de Tarlac au nord de l'archipel, elle a étéélevée chez les religieuses dans le très chic collège Saint-Vincent à New York.
Elle s'est mariée avec un brillantjuriste, avocat, Benigno Ninoy Aquino, lui aussi héritier d'une grande famille mais d'hommes politiques et d'hommesd'affaires.
Elle a connu la vie douillette d'une jeune femme très riche mais aussi l'agitation et l'angoisse d'être mariéeà un des leaders de l'opposition qui, arrêté, sous Marcos, a été détenu huit ans en prison avant de s'exiler auxÉtats-Unis.
C'est à son retour qu'il a été assassiné sur ordre, dès son arrivée à l'aéroport, le 21 août 1983.
Son milieu, son éducation, sa vie d'épouse avait familiarisé Cory Aquino avec l'exercice du pouvoir.
Lorsque lespartisans de son mari, les représentants de la hiérarchie catholique et même ceux de l'armée sont venus luidemander de se présenter elle a assez peu hésité : “ Je me présente pour la mémoire de Ninoy mais aussi pour moi.J'ai 52 ans, cinq enfants.
J'ai été heureuse, j'ai vécu des drames, ma vie est faite, je n'ai rien à prouver.
Mais je neserais jamais en paix avec moi-même si je refusais de faire campagne contre Marcos ”.
Ainsi s'imposera-t-elle : naturelle, naïve, innocente même, sincère, offrant le contraste de sa simple robe jaune, sesgrosses lunettes et sa bonne éducation aristocratique face aux tenues flamboyantes, aux maquillages outranciers etla vulgarité d'Imelda la roturière.
Comme le dira un diplomate en poste à Manille cette année là : “ Cory avait avecelle Dieu et tout un peuple assoiffé d'espoir dont 70 % vivait sous le seuil de la pauvreté.
Comment aurait-elle puéchouer ? ”.
Elle est donc élue le 25 février 1986 présidente alors que Marcos a déjà pris la fuite sans attendre lesrésultats.
Elle associe à son gouvernement deux généraux, ceux de la rébellion qui l'ont portée au pouvoir.
La tâche qui l'attend, les espoirs qu'elle fait naître sont nettement au-dessus de ses capacités mais elle a tout demême un programme et entend l'appliquer.
Elle rétablit la démocratie immédiatement : presse, justice, élections sontlibres.
Sa campagne a été celle de la non violence, celle des peuples et des pauvres.
Elle propose une nouvelle constitution acceptée avec 76 % des voix en mars 1987.
Mais déjà elle a dû faire face àla révolte d'une garnison et à la répression sanglante de plusieurs dizaines de milliers de paysans venus réclamer laréforme agraire.
Avant cela, il y a l'urgence de la réconciliation.
Elle pratique l'ouverture vers les communistes.Ceux-ci mènent dans les montagnes une guérilla qui trouve un vrai soutien chez les paysans.
Elle obtient un cessez-le feu qui est peu apprécié par l'armée qui le lui fait savoir...
Mais elle ne veut pas tenir compte de l'avertissement.La réforme agraire sera un de ses chevaux de bataille.
Une nouvelle répartition des terres est votée.
En 1990 soitquatre ans après son élection, seulement 7 % des terres ont été attribués.
Sa propre famille voulant éviter que laplus grande de ses haciendas, la Lusitas (leur fief sucrier), soit morcelée, ils ont attribués aux ouvriers un tiers desparts de l'affaire.
Mais il reste la pauvreté et les inégalités criantes qui ne se réduisent pas malgré une croissance enprogression.
Un économiste s'est penché sur le problème et explique : “ Cette croissance profite à environ soixantefamilles.
Pour le reste, les conditions de travail, les salaires sont identiques à tout le Sud-Est asiatique ”.
L'inflationen revanche atteint 16 % et touche plus généralement les salariés.
On s'aperçoit au fil du mandat que la Sainte à robe jaune n'est peut être pas une fée en matière de politique.
Ellen'a pu faire disparaître tous les politiciens véreux qui s'engraissaient sous Marcos et qui continuent plusdiscrètement ; elle n'a pas non plus éliminé la corruption qui règne partout jusque dans sa propre famille.
On dit eneffet volontiers que son frère “ Peiping ” Cojuanco aurait commis quelques indélicatesses sur lesquelles la Présidentea eu la faiblesse de fermer les yeux.
Et peu à peu ses soutiens s'effritent.
L'armée en particulier.
Six coups d'étatsen six ans de présidence, un record.
Qu'il s'agisse d'extrémistes de droite, anciens nostalgiques de Marcos ou desScout Rangers, ou du RAM (le mouvement de réforme des forces armées), des jeunes officiers d'élite qui veulent unpouvoir libérale fort favorisant une classe moyenne et craignant que la démocratie soit un élément déstabilisateur, lepouvoir d'Aquino est constamment fragilisé.
En fait, il est sous la dépendance de l'armée.
Reste qu'elle a l'appuiclairement affirmé de l'administration américaine.
Lors du dernier soulèvement, le Secrétariat d'État l'a fait savoir : “Renversez Cory et nous fermons la base de Clark et nous retirons toute aide ”.
Fermer la base militaire de Clark c'estpriver les Philippins d'un milliard de dollars par an environ.
La négociation porte sur un retrait partiel des troupesétalé sur plusieurs années et une privatisation...
Des solutions qui permettrait une réduction des recettes moinsbrutale.
En mai 1992, Cory Aquino n'a pas été réélue.
Elle a quitté le pouvoir, en douceur et sans regret.
Le général Ramos,son ministre de la défense lui a succédé..
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