Commentaire de Texte : Madame de La Carlière de Diderot
Publié le 17/05/2020
Extrait du document
«
Commentaire de Texte : Madame de La Carlière de Diderot
Le conte philosophique est un genre littéraire utilisé par les philosophes du siècle des Lumières, le 18ème siècle, pour instruire de façon plaisante les lecteurs.Diderot, qui fait partie de ces auteurs, a écrit le conte « Madame de La Carlière » en 1773 pour illustrer les dangers du jugement public sur les actions des hommes.Ce conte met en scène une jeune veuve qui fait jurer fidélité absolue à son second mari devant témoins comme condition du mariage, celui-ci ne tient pas sonengagement, elle le condamne sans appel et lui annonce publiquement sa séparation définitive.
L'opinion publique commencera par lui donner tort puis, devant sesmalheurs, lui donnera raison jusqu'à sa mort.
L'extrait étudié se situe au moment où l'opinion publique penche en faveur de Madame de La Carlière.
L'opinionpublique s'émeut des apparences et est prête à condamner et juger les individus mais a-t-elle vraiment tous les éléments pour juger de façon équitable ? Diderot nousmontre le point de vue de l'opinion publique sur Desroches, le mari infidèle, puis sur la femme trompée, Madame de La Carlière, et enfin nous donne le point de vueobjectif par l'intermédiaire du narrateur qui rétablit la vérité.
L'utilisation du dialogue par Diderot lui permet de montrer de façon vivante les échanges de point devue.
L'opinion publique juge les autres sur les apparences de façon subjective et légère :Les gens débattent le pour et le contre sur ces questions graves concernant Desroches et Madame de La Carlière tout en ayant des occupations de loisirs et en prenantplaisir à ragoter :« Tandis qu'on s'amusait...en faveur de Madame de La Carlière .
»Diderot montre bien ironiquement et avec dérision avec quel amusement l'opinion publique débat le pour et le contre.
L'opinion est en train de changer après avoir étécontre Madame de La Carlière, elle devient en sa faveur :« La balance penchait...
Madame de La Carlière.
»L'opinion est changeante car elle n'est ni rationnelle ni fondée sur la réalité mais elle est émotionnelle et dépend du regard porté sur les personnes jugées.On donne raison à Mme de La Carlière contre son mari et on la plaint de son malheur :« Cette pauvre Madame de La Carlière...on n'y tient pas ».Madame de La Carlière est considérée comme la victime, elle est devenue tellement faible et malheureuse qu'elle n'a plus de lait pour allaiter son enfant qui est enmeure.
On s'émeut de sa santé et on donne tous les torts à Desroches.
Diderot s'étend beaucoup moins à détailler l'opinion publique sur Madame de La Carlière quesur Desroches, comme pour montrer que le vice est plus intéressantà commenter que la vertu.
Au début du conte on jugeait sévèrement l'attitude intransigeante de Madame de La Carlière, on disait que l'infidélité est une fautepardonnable.
Mais au fur et à mesure et arrivé à ce moment du texte, les rôles sont inversés, tous les torts sont donnés à son mari.En apparence Desrosches se comporterait mal avec sa femme puisqu'il ne cherche pas par tous les moyens à se faire pardonner :« Si cette femme lui était un peu chère...meure ».l'opinion publique en rajoute encore en supposant que Desroches passe son temps à s'amuser avec de mauvaises fréquentations pendant que sa femme dépérit :« Le jour il court la forêt...avec des espèces comme lui .»l'opinion publique utilise un vocabulaire peu élogieux, presque injurieux à propos de Desroches :« Avec des espèces comme lui ».Diderot utilise une figure de style pour illustrer la sauvagerie et la cruauté de Desroches, la métaphore du tigre :« Ne me parles pas des hommes, ce sont des tigres.»Le champ lexical de la monstruosité est utilisé :« tigre..., monstre, ...crapuler...
»On le rend même responsable de tous les malheurs de sa femme comme si son infidélité avait entraîné une suite de drames, à commencer par la mort de leur enfant :« Madame de La Carlière fut obligée de remettre...l'enfant dépérit et mourut.
»Diderot emploie le terme « fut obligée » pour bien montrer qu'elle ne l'aurait pas fait volontairement si son mari ne l'avait pas rendu malade.
Les gens pensentd'ailleurs que cela vaut peut-être mieux car non seulement Desroches est un monstre mais il aurait pu engendrer un monstre :« Qui sait si...père? »Desroches est aussi rendu responsable du frère de Madame de La Carlière :« Le jeune homme fut tué à la première bataille...
ce Desroches.»Diderot en utilisant le démonstratif « ce » exprime bien le ton péjoratif qu'on emploie pour désigner cet homme.On voit par ailleurs que l'opinion publique est injuste puisque c'est Madame de La Carlière elle-même qui avait exigé cette situation :« Madame de La Carlière avait exigé...
frère cadet.
».Diderot utilise le pronom « on » qui ne désigne personne en particulier mais tout le monde en même temps, donc l'anonymat de la foule, de la rumeur publique,personne n'est responsable.« Tandis qu'on s'amusait », « on parlait donc », « ce fut alors qu'on dit ».L'extrait se termine par cette exclamation au présent qui montre qu'on est arrivé au point final, au summum de cette tragédie puisque jusqu'à présent il utilisaitl'imparfait :« on s'écrie de tous côté...
ce Desroches...
».Diderot utilise une allégorie pour dramatiser :« le malheur est entré dans cette maison ».
Le narrateur exprime quant à lui un point de vue plus objectif.Il rétablit la vérité car il a un regard omniscient sur les évènements et les comportements du mari et de la femme.
Le lecteur comprend que le narrateur n'entre pasdans le système de l'opinion publique et que son jugement est plus juste, du domaine de la raison et non de l'émotion..
Diderot utilise ce moyen pour nous fairecomprendre que les faits ne sont pas toujours ce qu'ils semblent être.« Desroches était tombé...
toutes les voies de la soumission.
»Comme Desroches s'était retiré à la campagne, on ne le voyait plus, on ne savait pas exactement ce qu'il faisait, on ne savait pas ce que sait le narrateur.Diderot montre que la décrépitude de Desroches est mentale aussi bien que physique :« dans un état déplorable d'esprit et de corps »Il utilise un champs lexical de la douleur physique et morale :« état déplorable, ...douleur...., faiblesse..., inconsolable..., chagrin ».Ceci va complètement à l'encontre du comportement que lui imagine l'opinion publique le voyant courir les bois en mauvaise compagnie, se moquant bien de lasituation.
L'ignorance de la vérité explique cette erreur de jugement de l'opinion publique:« mais on ne le voyait pas...
»De même le narrateur explique que Desroches a fait tout pour attendrir sa femme comme se trainer à sa porte mais les gens ne le savent pas, c'est pourquoi ils lejugent si mal :« C'est que Desroches n'avait omis aucune de ces choses et qu'on l'ignorait ».Les choses à faire pour attendrir sa femme sont montrées sous forme d'énumération et de gradation :« dans les rues, dans les églises, à sa porte...
» « c'est qu'on y reste, qu'on y couche, qu'on y meurt ».Diderot ironise sur la mauvaise tendance qu'ont les gens à ragoter au moyen de cette antiphrase :« car le point important n'est pas de savoir, mais de parler.
»
Diderot choisit le conte philosophique pour exprimer sa thèses et ses idées sur l'inconséquence de nos jugements publiques, c'est d'ailleurs le sous-titre de son conte.Ce sujet pourrait être traité de façon ardue comme un essai ou un traité mais le conte permet de mettre en scène des personnages dans un récit emboîté.
La forme dudialogue qui permet aux deux personnages du premier récit d'échanger des points de vue donne un forme très vivante un peu comme l'est une pièce de théâtre.
Lecôté tragique renforce le côté théâtral de ce genre de récit, comme une tragédie..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- oral bac: Commentaire du texte : DIDEROT Encyclopédie article « Raison »
- Commentaire de texte - De l'Allemagne, Madame de Staël Proposition de corrigé
- Commentaire de texte sur le Sonnet à Madame M N de Musset
- Le bal à la Vaubyessard (Flaubert - Madame Bovary) - Commentaire de texte
- Commentaire de texte madame Bovary : « elle songeait quelquefois… » à « … du bonheur même qu’elle lui donnait »