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Commentaire de texte Le dénouement de Dom Juan, Acte V scènes 5 et 6

Publié le 02/12/2021

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 I. Le châtiment de Dom Juan 

 Intervention du merveilleux, sous trois formes : spectre femme, mort, Statue. Le Châtiment est précédé d’une série d’avertissements. 

 A. Les multiples avertissements 

 1. L’apparition du spectre en femme voilée 

 Une seule phrase : « spectre « : fantôme, rapport avec la mort. Apparition du fantôme a pour but de faire peur (Idée de vengeance, remords, souvent lié à la culpabilité) 

      Symbole ?    Symbole de toutes les femmes que Dom Juan a déshonoré et qui réclament vengeance. 

 Voilée : symbole de la honte / anonymat (Groupe entier qui parle) / référence à Done Elvire 

      Fonction ?    Avertir Dom Juan, dernier avertissement : le spectre s’adresse indirectement à lui, sur un ton froid, solennel = gravité du moment. 

 Dom Juan encore placé devant une possibilité de pardon : « miséricorde « = pardon de dieu. Dom Juan n’est pas muni parce qu’il est pécheur, mais parce qu’il est un pécheur impénitent : il refuse de se repentir. 

 Fin de phrase : la menace, extrêmement précise, devient quelque chose d’imminent, le temps presse : « ici «, « n’a plus qu’un moment «. 

 Effets théâtraux = exige que sur le plan de la mise en scène, il y ait un travail 

      Symbole ?    Temps et mort : allégorie du temps et de la mort, allégorie païenne = elle s’inscrit dans la réflexion religieuse 

 Dom Juan est celui qui cultive le plaisir de l’instant, qui refuse d’avoir un passé. Il ne s’est jamais projeté dans l’avenir. Il refuse de considérer le temps autrement que par rapport au présent, et n’a jamais aucun remords à l’égard de ses actes passés => cette apparition lui signifie que son temps est désormais compté. 

 Dom Juan est celui qui s’improvise constamment. Désormais, il ne le pourra plus, il est obligé de choisir. 

      Fonction du spectre : Il annonce l’imminence de la mort, le temps se resserre    « Faux « : le temps passe, il n’y aura plus d’autre avertissement. 

 B. Le châtiment infligé par le commandeur 

 1. La statue, symbole du ciel 

 Statue : représentant concret de la puissance de dieu 

 Apparition soudaine, nous ne sommes pas préparés. 

 Face à face de Dom Juan et de la statue = scène qui symbolise le combat de Dom Juan contre le puissance divine. 

 2. L’intervention de la statue (scène 6) 

 Ton autoritaire => elle exerce un pouvoir sur Dom Juan. Elle le retient, l’empêche de fuir : impératif : Dom Juan, l’être toujours en mouvement, est ici obligé de s’ « arrêt[er] «. 

 Elle rappelle la promesse que Dom Juan lui a faite = lui rappeler qu’il n’a jamais été un homme d’honneur ? 

 Accepter souper avec la statue = transgresser un tabou (séparation des vivants et des morts). En effet, Commandeur = celui que Dom Juan a tué => proposer le repas = une offense. La statue le lui rappelle. 

 La statue propose une sentence : « l’endurcissement au péché… « 

 Intervention concrète, un verdict qui annonce la manière dont Dom Juan va être puni : « foudre « 

 Geste qui va permettre le châtiment : prendre sa main 

 = Contraste entre la civilité du geste et la forme terrible du châtiment. 

 3. La forme du châtiment 

 Ce châtiment prend forme traditionnelle  de l’imagerie de l’enfer ; punition par le feu (champ lexical) : éclair, foudre, brasier ardent, grand feux. 

 Réplique de Dom Juan qui exprime la souffrance : 

 La sensation étonne Dom Juan : feu surnaturel, souffrances extrêmes, inimaginables (emploi de l’hyperbole) = exclamation + interrogation pour suggérer le surnaturel : « feu invisible « + « tout (…) corps «. Progression de la punition : évocation des sensations. Un cri : souffrance de Dom Juan n’est plus supportable, gradation dans la douleur + effet effrayant : Dom Juan se consume. 

 Longue didascalie : espèce de climat d’apocalypse spectaculaire, terrifiant qui préfigure le châtiment éternel de Dom Juan. 

 Lumière et bruit = caractéristique d’un orage violent. La terre se creuse, s’ouvre : Dom Juan disparaît, les flammes de l’enfer surgissent sur Terre = impression de violence, de cataclysme. 

 Effet de catharsis : susciter terreur, purgation des passions au moyen de la pitié et de la terreur. 

 4. Le sens de ce châtiment (Scène 6) 

 Pourquoi Dom Juan est-il puni ? La réplique finale de Sganarelle apporte une réponse, commentaire de l’action : longue accumulation de personnes offensées par Dom Juan : 

 D’abord punition religieuse, 1er terme de l’énumération. La faute majeure de Dom Juan : avoir défié dieu, avoir contrevenu à la morale religieuse, et persévéré dans le péché = punition normale pour le contexte, attendue = avertissement aux libertins. 

 Revanche, réparation pour ses victimes : un soulagement social : « Tout…satisfait « : bonheur des gens à voir Dom Juan puni. 

 Le pronom « un chacun « et « tout le monde « renvoient à l’ensemble de la société = soulagement général 

   Lois voilées : mariage, lois morales, religieuses, sociales,   honneur, dettes 

      Filles : Mathurine, Charlotte = le séducteur est puni 

      Familles : celle d’Elvire et Dom Juan hypocrite à l’égard de   son père 

      Femmes mariées : Elvire et les autres évoquées mais pas nommées 

         Au delà de la famille, c’est toute la société qui a été bafouée 

      Mais aussi des règles qui n’ont pas été respectées par Dom Juan   : rapport commerciaux, lois de charité, respect des morts,   de Dieu. 

      Sganarelle veut dire que tous ces scandales ont été lavés   par le châtiment de Dom Juan = force symbolique de purification. 

     Récapitulation : Dom Juan a introduit dans la société le désordre, c’est pour cela qu’il a été puni = Fin morale 

 Transition : pourtant, le comportement des personnes ne s’accorde pas avec cette dimension morale. 

 II. Le comportement de deux personnages 

 A. Dom Juan : orgueil audacieux, refus du repentir, désir de s’en tenir à l’expérience de ses sens. 

 « Spectre…c’est « = matérialiste, rationaliste, refuse d’accepter le surnaturel, recherche explication : « Qui ?... Je crois reconnaître «. 

 « Je crois « : Dom Juan essai de vérifier si la voix qu’il entend n’appartient pas à la vie, à quelqu’un qu’il connaît. 

 « Je veux voir ce que c’est « Vérification, avoir son opinion ; en utilisant épée = symbole, ou il ne touche rien, ou il transperce quelqu’un. 

 Orgueil aristocratique, conscience de sa valeur = emploi de négations : Non, non (deux fois) + « Rien n’est capable… « + « Je veux «. Dom Juan apparaît dans une phase d’attaque : didascalie. 

 D’autre part, Dom Juan accepte la parole donnée, une fois : « Oui « = laconisme de cette phrase nominale. Dom Juan, lucide, ne recule pas. 

 Dom Juan va jusqu’au bout de ses convictions ; il incarne refus, rébellion : « Il ne sera pas dit…repentir « + réponse à la statue sur un ton calme et révolu : « La voilà « = Simplicité de la phrase nominale. 

 Vaincu par Dieu, puni, Dom Juan meurt. Mais il a forcé dieu à se manifester, il a exercé une contrainte sur lui = événement exceptionnel, qui prend forme d’une victoire. 

 B. Sganarelle : réaction d’un personnage de comédie 

 Deux personnages ici antinomiques, totalement opposés face un surnaturel : 

   Sganarelle croit tout, tout de suite, il ne se pose pas de questions    : « preuves « : prêt à croire n’importe quoi + « c’est un spectre    « : Sganarelle l’identifie de manière absurde : « Au marcher    «. Pour lui, aucun doute, évidence : Dieu se manifeste et Dom    Juan va être puni. 

      Peur, Lâcheté : « Ô ciel ! « exclamation, interrogation    incrédules face aux réactions de Dom Juan, qui montrent sa    peur. Le langage de Sganarelle exprime avant tout ses émotions,    alors que Dom Juan, lui, réfléchit, agit. 

      Il va tirer une leçon de l’histoire : Homme de la morale    traditionnelle, il achève la pièce 

     « Il n’y a que moi…malheureux « ? Sganarelle n’est pas sincère : il est soulagé comme tous les autres. Il était excédé souvent par Dom Juan, mais aussi fasciné, il l’aimait, n’était pas valet de n’importe quel personnage. 

 Mais Sganarelle produit une impression comique parce qu’il n’a pas été payé : il semble pleurer davantage son argent que son maitre. 

 Effet de dissonance entre le fait que Sganarelle représente la morale traditionnelle, qu’il est chargé de l’oraison funèbre de Dom Juan, et le fait qu’il n’est intéressé par ses gages, son argent = préoccupation matérielle au moment le plus solennel ! Effet scandaleux (Passage d’ailleurs censuré) 

 Transition : de ce contraste de registres provient l’originalité de ce dénouement 

 III. L’originalité de cette scène tragique et comique 

 A. Les éléments tragiques 

 Dénouement original pour le genre : une mort à la fin de la comédie, alors que c’est le dénouement de la tragédie. Le caractère de cette mort est en effet tragique : sur le plan esthétique et théâtrale, la mort se doit spectaculaire, grandiose. Le personnage de Dom Juan a ici des caractères de héros tragique. En effet, il sait qu’il va mourir. Par son refus, son obstination, il accepte la mort et devient un mythe. 

 B. Les éléments comiques 

 Mais la pièce demeure une comédie. Sganarelle a pour fonction de maintenir le dénouement dans ce cadre. 

   Comique de mot : « au marcher «, « mes gages « + comique de répétition. 

      Comique de caractère : Molière critiquant couardise et cupidité   Sganarelle : source de comique. 

      Comique de situation : Dernière phrase ; Sganarelle partagé   entre le désir d’être payé et ses sentiments. 

     Du point de vue du ton, Molière ne respecte pas les règles. Dénouement pas du tout conforme à l’esthétique classique. 

 C. Une pièce à machines 

 Dénouement spectaculaire, nécessité de « machines « = typique du baroque, goût de l’époque, grand spectacle. 

 Rapidité foudroyante de ce dénouement en constitue l’ambiguïté… Comment interpréter l’effet produit ? Impressionner le public, le frapper vivement, ou bien donner l’impression que ce châtiment est factice, illusion (Trucage et intervention de créatures surnaturelles, auxquelles les vrais libertins ne croient pas) ? 

 Conclusion : Intérêt dramatique pour une intervention surnaturelle, Dom Juan est puni de façon surnaturelle. Celui-ci est puni en tant que criminel qui a défié toutes les lois. Mais le protagoniste de Dom Juan qui meurt sur scène n’est plus seulement un libertin mais un personnage héroïque faisant toute l’originalité de ce dénouement donnant lieu à une ambiguïté, défaite de Dom Juan ou grandeur de Dom Juan.

 

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