Commentaire d’arrêt T.A Bastia 6 septembre 2016
Publié le 15/11/2023
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«
T.A Bastia 6 septembre 2016
Le maire de la commune de Sisco, le 16 aout 2016 a pris un arrêté interdisant à
quiconque de se rendre sur les plages de la commune vêtue d’une tenue qui ne serait
pas « correcte, respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité » et de se baigner
dans des vêtements « ayant une connotation contraire » à ces principes.
L’association
Ligue des Droits de l’Homme a introduit un référé sur le fondement des dispositions
de l’article L.521-1 du code de justice administrative devant le tribunal administratif de
Bastia.
C’est de ce référé dont il est question dans la décision commentée.
L’association Ligue des Droits de l’Homme demande la suspension de l’arrêté en
cause jusqu’à ce qu’il soit statué sur le fond de la légalité de l’arrêté.
Elle estime que
cette mesure de police restreint illégalement les libertés car selon elle, la mesure ne
serait ni nécessaire ni proportionnée au regard des exigences du maintien de l’ordre
public.
Le juge des référés du tribunal de Bastia n’a pas suivi cela et a fait droit à
l’argumentation de la commune, qui soutenait à l’inverse que les circonstances
locales justifiaient que soit pris un tel arrêté.
Pour préserver l’atteinte à l’ordre public
et la sécurité, les pouvoirs de police du maire l’autorisent-ils à interdire l’accès aux
plages et à la baignade à toute personne n’ayant pas une tenue respectueuse des
bonnes mœurs et de la laïcité ?
En matière d’accès à la plage et de pratique de la baignade, le maire peut édicter des
mesures de police dans le but de prévenir tout trouble à l’ordre public dès lors que le
risque de survenance de ce trouble est avéré et que la mesure est nécessaire,
adéquate et proportionnée.
Le juge administratif a admis que le maire puisse intervenir en matière de police de la
baignade (I), mais également la mesure de police en cause au regard des principes de
nécessité et de proportionnalité des mesures (II).
A.
L’intervention accordée au maire en matière de police de la baignade
A) La compétence affirmée du maire en matière de police de la baignade
- Le maire détient le pouvoir de police municipale (article L2212-1, la loi donne
compétence au maire en matière de police sur le territoire de sa commune,
incluant en l’espèce, le littoral.
(voir considérant 2 qui abordent la compétence
du maire sur le littoral).
- Le maire exerce la police des baignades et des activités nautiques au bord du
rivage de sa commune > partage de compétence, car au-delà d’une certaine
limite (300 mètres à partir de la limite des eaux), la police est exercée par le
préfet.
- Distinction Police administrative générale et Police administrative spéciale :
une même autorité peut avoir un pouvoir de police général et un pouvoir de
police spéciale.
- La police des baignades et des activités nautiques bénéficie d’un texte
spécifique (L.2213-23 du CGCT), qui prévoit des interventions adaptées aux
problèmes de sécurité que pose le littoral.
il s’agit ainsi d’une police
administrative spéciale.
B) La définition de l’ordre public dans le cadre de la police de la baignade
- Rappel de cours sur la définition de l’ordre public.
Les trois composants que sont la
sécurité de la baignade, le bon accès du rivage, l’hygiène > Considérants 2 et 4.
Le
juge estime qu’en ce qui concerne la police de la baignade et de l’accès aux plages,
l’ordre public est composé de la trilogie (sécurité, salubrité, tranquillité) et plus
spécifiquement : la sécurité de la baignade, le bon accès du rivage, l’hygiène et la
décence.
Le maire ne peut intervenir que s’il identifie un risque avéré d’atteinte à
l’un de ces éléments.
- Rappel de la décence : deux arrêts : « Beaugé » CE, 4 juillet 1924 , et CE, 30 mai
1930, Lebon : qui valident l’interdiction faite aux baigneurs de se déshabiller sur la
plage et de circuler en costume de bain, afin d'« assurer le maintien du bon ordre et
de la décence »- en sens contraire un jugement isolé : TA Montpellier, 18 déc.
2007 :
À propos d'un arrêté municipal de La Grande-Motte interdisant, en dehors des
plages et de la promenade de la mer, de se trouver sur la voie publique en étant
seulement vêtu d'une tenue de bain, le torse nu, du 1 er juin au 15 septembre.
Ces
arrêtés municipaux n’ont pas donné lieu à de nouveaux recours et les interdictions
perdurent dans de nombreuses communes du littoral.
- Le juge administratif reprend ici la tradition en matière de l’ordre public, et son
considérant de principe est similaire à l’ordonnance du Conseil d’Etat intervenant
au sujet d’un arrêté municipal similaire (CE 26 août 2016, Ligue des Droits de
l’Homme).
- Malgré la mention de la décence, le juge reste donc attaché à la définition d’un
ordre public matériel.
Mais l’ordre public n’est pas sans limites : Le risque de porter
atteinte à la dignité de l’être humain ou à l’égalité homme/femme ne semblent pas
pouvoir fonder la mesure de police en cause, même si certains contestent une telle
position du juge administratif, notamment au regard des jurisprudences Morsangsur-Orge 1995 et Dieudonné 2014.
II) La validation de la mesure de police régissant la....
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