Commentaire Composé Tartuffe Acte III Scène 3
Publié le 15/05/2020
Extrait du document
«
Introduction
Molière est attaqué de toutes parts lorsqu'il fait représenter pour la première fois Tartuffe, en 1664.
On l'accuse de s'en prendre àl'Eglise et aux dévots .
Il réplique que ce sont les hypocrites dont il fait la satire.
Ainsi, si le personnage principal divise les membres dela famille d'Orgon, il divise aussi les spectateurs.
C'est à la scène 2 de l'acte 3 qu'il fait son entrée en scène, au moment où Dorinevient lui annoncer la visite de sa maîtresse, Elmire.
Nous verrons dans une première partie comment ce dialogue met en évidence ladouble personnalité de Tartuffe, avant d'étudier dans une deuxième partie le rôle de Dorine.
I- La double personnalité de Tartuffe
L'entrée en scène de Tartuffe qui divise la famille d'Orgon, souligne la duplicité du personnage.
A .
Le dévot
Tout d'abord, Tartuffe semble agir en dévot.
Sa première réplique montre qu'il prie et se mortifie (« Laurent, serrez ma haire avec madiscipline »), c'est-à-dire qu'il s'inflige des souffrances en raison des péchés qu'il a commis.
De plus, il pratique la charité et fait profiter« les prisonniers » des largesses d' Orgon à son égard (« Des aumônes que j'ai partager les deniers »).
Enfin, il cultive la chasteté : ils'offusque ainsi de la tenue de Dorine et l'enjoint de s'habiller plus décemment (« Couvrez ce sein que je ne saurais voir »).
Il sembleainsi agir en tout conformément aux préceptes religieux.
B.
L'hypocrite
Pourtant, cette attitude apparaît comme hypocrite.
En effet, Tartuffe joue un rôle devant un public.
C 'est au moment où « il aperçoitDorine », qu'il se vante de ses pratiques religieuses.
La preuve en est qu'il lance ses ordres à Laurent en « parlant haut ».
Le véritabledestinataire est moins son valet que Dorine, selon le principe de la double destination théatrale.
Son hypocrisie se lit également dansses répliques.
En effet, il parle comme il réciterait un rôle appris par coeur.
Ses phrases sont construites avec recherche, comme lemontre l'antéposition du complément de nom (« Des aumônes que j'ai partager les deniers »).
Elles sont si générales, par l'emploi duprésent de vérité générale et du pluriel, qu'elles prennent la forme de maximes (« par de pareils objets les âmes sont blessées,/Et celafait venir de coupables pensées »).
La théatralité du geste (« tirant un mouchoir de sa poche ») complète le rôle qu'interprète Tartuffe.Ces formules toutes faites contrastent avec la familiarité de ses propos quand il répond aux attaques de Dorine (« Ou je vais sur lechamp vous quitter la partie »).
Aux beaux discours appris pour impressionner le public, succèdent les paroles sincères.
C .Le concupiscent
Au-delà du masque de dévot que revêt Tartuffe, on voit apparaître son vrai visage : celui d'un homme concupiscent.
Il estimmédiatement arrêté par le « sein » de Dorine et doit l'interrompre tant il est ému par cette vision (« Ah ! Mon Dieu, je vousprie,/Avant que de parler, prenez-moi ce mouchoir »).
De plus, l'hyperbole « Très volontiers » qui souligne le plaisir avec lequelTartuffe verra Elmire, l'interrogative (« Viendra-t-elle bientôt ? ») qui dit son impatience, et l'accélération du rythme du dialoguesuggèrent une vive attirance du prétendu dévot pour la femme de son protecteurAinsi Tartuffe est moins dévot que comédien, et si habile soit-il dans la maîtrise de son art, il laisse transparaître sa véritablepersonnalité.
Elle apparaît d'autant mieux que Dorine n'est pas prête à se laisser prendre au piège.
II-Le rôle de Dorine
A .
Le comique de caractère
Dorine est dotée d'une forte personnalité.
Mais si elle fait rire, elle souligne surtout par contraste les vices de Tartuffe.
La servanteparle avec franchise.
Alors que Tartuffe se réfugie derrière des formulations très générales « les âmes » elle s'adresse directement àlui « Vous êtes donc bien tendre à la tentation ».
A l'abstraction du discours de Tartuffe répond un important champ lexical du corpsdans les répliques de Dorine (« chair », « chaleur », « nu », « peau »).
Elle s'exprime sans fausse pudeur, avec un vocabulaire cru.
Onpeut supposer que le geste accompagne la parole et qu'il ose regarder « du haut jusques en bas » celui à qui elle parle.
L'hypocrisie deTartuffe devient plus voyante devant ce personnage honnête et franc.
B .Le registre satirique
De plus, Dorine se moque de Tartuffe.
Tout d'abord, elle s'adresse à deux reprises au public en aparté pour dénoncer ses vices.
Lapremière fois, elle emploie deux hyperboles (« Que d'affectation et de forfanterie! » pour suggérer le caractère excessif de laprétendue dévotion de Tartuffe et la rendre sujette à caution.
La seconde fois elle va plus loin : elle l'accuse de convoiter Elmire (« Mafoi, je suis toujours pour ce que j'en ai dit »).
Outre ces remarques en aparté, Dorine tourne son interlocuteur en dérision par leregistre satirique.
L'allitération en [t] « tendre à la tentation » et la diérèse sur le mot tentation insinuent par exemple qu'elle sait queTartuffe aime les femmes.
La suite de la déclaration de Dorine a un double sens « Et je vous verrais nu, du haut jusques en bas/ Quetoute votre peau ne me tenterait pas » : Il s'agit d'affirmer sa chasteté, infiniment plus solide que celle de Tartuffe ; il s'agit égalementde dénigrer Tartuffe qui paraît ainsi bien peu séduisantDorine a une double fonction dans cette scène : elle fait rire le spectateur par sa franchise et révèle l'hypocrisie de Tartuffe.
Conclusion
La première apparition de Tartuffe qui intervient tardivement, à la scène 2 de l'acte 3 après un long suspens, permet au spectateur,guidé par les moqueries de Dorine, de se faire sa propre idée du personnage.
Son masque de dévot ne résiste pas à l'épreuve de lascène..
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