Charles-Ferdinand RAMUZ. (Derborence, 1934)
Publié le 19/12/2021
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Charles-Ferdinand RAMUZ.
(Derborence, 1934)
[Charles Ferdinand Ramuz est un romancier suisse de langue française.
L'action
de Derborence se situe dans le Valais, pays alpin voué à l'élevage.
Dans l'extrait
proposé, une jeune femme regarde la montagne au-dessus de son village ; elle
pense à son mari, qu'elle a épousé quelques mois auparavant, et qui est berger
dans la montagne.]
En face d'elle, et juste au niveau de ses yeux, il y a les montagnes.
Il n'y en a
pas seulement une, ni deux, ni dix, mais des centaines ; elles sont rangées en
demi-cercle comme une guirlande de fleurs suspendue dans le bas du ciel.
C'est
plus haut que les forêts, plus haut que les pâturages, plus haut que les rochers ;
là flottent toutes ces neiges, toutes ces glaces coloriées, qui sont étrangement
détachées de ce qui les porte, qui sont devenues étrangères à leurs
soubassements que l'ombre a déjà noircis.
Et plus l'ombre augmente au-
dessous d'elle, plus elles deviennent légères, plus aussi leur clarté s'accroît, qui
est faite de tous les roses, de tous les rouges, de tous les tons de l'or ou de
l'argent.
Alors ça lui a fait doux autour du c œ ur.
En avril, quand on s'est marié,
les pêchers étaient en fleurs.
Ils recommencent a fleurir, c'est une promesse.
Elle a parcouru de l'oeil toute la chaîne, encore une fois : c'est comme quand le
pêcher fleurit, en effet, comme quand l'églantine s'ouvre, comme quand le
cognassier plus incertain, plus timide, plus tardif, montre le dernier ses
bouquets ; car les montagnes à ce moment ont commencé à pâlir, à passer ;
elles se fanent, elles deviennent grises ; mais qu'est-ce que ça fait? pense-t-
elle, parce que demain elles refleuriront.
Introduction
Le paysage de Derborence, dans le roman du même nom publié par Ramuz en 1934, est
formé de montagnes.
Un éboulement gigantesque détruira une partie des alpages, tuant
tous les bergers sauf Antoine que les villageois prendront pour un fantôme.
C'est Thérèse
sa jeune femme qui le sauvera de la folie, elle qui contemple les montagnes au
crépuscule dans cet extrait situé au second chapitre du roman.
Son regard glisse de la
description à une vision affective, d'une évocation de la nature grandiose à l'expression
d'une douceur intérieure.
D'où les axes de réflexion suivants :
I.
Un spectacle imposant au crépuscule
II.
L'interprétation du regard
III.
Une harmonieuse circularité
I.
Un spectacle imposant au crépuscule
A.
Des éléments spécifiques
1.
Le spectacle est celui de « centaines » de montagnes (l.
3) caractérisées par leur ordre
: « rangées » (l.
3), « détachées de ce qui les porte » (l.
7), qui leur confère un aspect
impressionnant.
- La neige qui les recouvre (l.6) est un élément attendu ainsi que « les glaces coloriées »
(l.
7).
2.
La verticalité : l'anaphore* de la locution adverbiale « plus
haut » (l.
5-6) fait monter le regard et multiplie les repères dans
l'espace.
- Cette verticalité va jusqu'à inverser les rapports ordinaires : la montagne est «
suspendue dans le bas du ciel » (l.4) mais « c'est plus haut que les forêts » (l.
5).
Nous
sommes donc à un horizon élevé qui opère une confusion entre ciel et terre..
»
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