Charles Baudelaire, Les Petits poèmes en prose, « Enivrez-vous ». Commentaire
Publié le 19/12/2021
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«
Charles Baudelaire, Les Petits poèmes en prose , « Enivrez-vous ».
Il faut être toujours ivre.
Tout est là : c'est l'unique question.
Pour ne pas sentir
l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous
enivrer sans trêve.
Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise.
Mais enivrez-vous.
Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la
solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue,
demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce
qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle
heure il est et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : « Il est
l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ;
enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise ».
• Poème en prose => texte court (densité de la parole poétique).
• Titre provocateur « Enivrez-vous » => sorte de slogan.
Incitation (à un acte peu
recommandable).
• Thème : aspiration de l’Homme à fuir sa condition mortelle, soumise au temps qui passe
=> l’ivresse est considérée comme un remède à ce mal => pour le poète l’ivresse devient
noblesse morale, alors qu’elle est réprouvée par les bonnes m œurs.
I- La fonction de l’ivresse aux yeux du poète
A- Angoisse du poète : le temps
• Angoisse, peur de l’homme face au temps qui passe (thème développé aussi par les
romantiques.
- Cf.
la majuscule mise pour le « Temps » => personnification.
- Cf.
les deux formules assez parallèles du poème : « Pour ne pas sentir l’horrible fardeau
du Temps » ; « Pour n’être pas les esclaves martyrisés du Temps » => « Pour ne pas…
Temps ».
But négatif > ivresse => afin d’éviter les ravages du temps.
Cf.
« horrible
fardeau » ; « esclaves martyrisés » => termes forts.
Sentiment d’être asservi au Temps,
persécuté par le temps qui passe.
•« fardeau […] qui brise vos épaules et vous penche vers la terre » > on imagine l’homme
vieilli, courbé par le poids des années => courbé par le temps qui passe.
• Angoisse du temps => cf.
le champ lexical de l’heure (et donc, du temps qui passe) :
« l’horloge » et « l’heure ».
NB : l’horloge est personnifiée > cf.
elle parle (« Il est heure
de s’enivrer »).
NB : cycle qui semble inarrêtable.
Cf.
« toujours » ; « sans cesse » ; « sans trêve » ; « il
faut… » ; « c’est l’heure de… »..
»
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