Chapitre premier (Pierre et Jean, pages 78-79): commentaire (Maupassant)
Publié le 26/01/2021
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Le narrateur démasque M. Roland en indiquant que ses vraies préoccupations sont uniquement financières. Pour mettre à nu les arrière-pensées du personnage, il adopte le point de vue omniscient1. Il précise ainsi que M. Roland « song[e] moins à la tristesse de cette perte qu'à l'espérance annoncée » (I. 8-9). Par ailleurs, il signale que le personnage ne s'enquiert des circonstances du décès que « pour arriver à la question intéressante » (l. 11-12). En plaçant malicieusement cet adjectif en fin de phrase, le narrateur invite le lecteur à s'amuser de l'hypocrisie et la cupidité de M. Roland. Le lecteur sourit encore quand le chef de famille s'exclame : « Moi, si je n'avais pas eu de descendant, je ne l'aurais certainement point oublié non plus, ce brave ami ! » (I. 23-25). Ce genre d'affirmation, évidemment mensongère, n'engage à rien.
«
Texte 1 Chapitre premier
(Pierre et Jean, pages 78-79)
I
5
10
15
::
Mme Roland, la première, dominant son émotion, balbutia:
- Mon Dieu, ce pauvre Léon.
..
notre pauvre ami ...
mon
Dieu ...
mon Dieu ...
mort ! ...
Des larmes apparurent dans ses yeux, ces larmes silen~
cieuses des femmes, gouttes de chagrin venues de l'âme qui
coulent sur les joues et semblent si douloureuses, étant si
claires.
Mais Roland songeait moins à la tristesse de cette perte
qu'à l'espérance annoncée.
Il n'osait cependant interroger
tout de suite sur les clauses de ce testament, et sur le chiffre
de la fortune ; et il demanda, pour arriver à la question inté-
ressante:
- De quoi est-il mort, ce pauvre Maréchal ?
M.
Lecanu l'ignorait parfaitement.
- Je sais seulement, disait-il, que, décédé sans héritiers
directs, il laisse toute sa fortune, une vingtaine de mille
francs de rentes en obligations trois pour cent, à votre
second fils, qu'il a vu naître, grandir, et qu'il juge digne de ce
legs.
À défaut d'acceptation de la part de M.
Jean, l'héritage
20 irait aux enfants abandonnés.
Le père Roland déjà ne pouvait plus dissimuler sa joie et
il s'écria:
- Sacristi ! Voilà une bonne pensée du cœur.
Moi, si je
n'avais pas eu de descendant, je ne l'aurais certainement
25 point oublié non plus, ce brave ami !
, Le notaire souriait :
- J'ai été bien aise, dit-il, de vous annoncer moi-même
la chose.
Ça fait toujours plaisir d'apporter aux gens une
bonne nouvelle.
94 LECTURES MÉTHODIQUES
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