Cesare Pavese Originaire du village de Stefano Belbo, Pavese suivit sa famille à Turin, où il fit ses études scolaires et universitaires.
Publié le 23/05/2020
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PAVESE Cesare. Écrivain italien. Né à Stefano Belbo (Cuneo) le 9 septembre 1908, mort à Turin le 26 août 1950. Il fit toutes ses études à Turin. Ses premières œuvres furent une thèse sur Walt Whitman (1930) et une traduction, tout de suite considérée comme exceptionnelle, du Moby Dick de Melville (1932). Pavese n’était pas inscrit au parti fasciste et n’aimait pas l’enseignement, aussi son activité de professeur fut-elle irrégulière. Il enseignait l’italien, le latin, la philosophie et, en 1936, obtint le titre de professeur d’anglais. Entre-temps, il donnait une série de traductions remarquables par leur rigoureuse fidélité au texte : Melville — Benito Cereno —, Dos Passos, Faulkner, Anderson, Gertrude Stein, De Foë, Dickens et Joyce. Ce fut pour lui l’occasion d’accumuler une originale expérience critique qui se manifesta, à partir de 1930, par sa collaboration à la revue Culture [La Cultura], où il donna des articles qui devaient être réunis en un volume, publié après sa mort, en 1951, sous le titre : La Littérature américaine et autres essais. Ce fut durant cette période que Pavese composa son premier recueil de poèmes, Travailler fatigue, qui parut en 1936, chez Solaria à Florence, exemple isolé de poésie narrative qui passa alors inaperçu par suite de l’arrestation de Pavese, envoyé en résidence forcée à Brancaleone, en Calabre. Ce recueil, augmenté de quelques poèmes, fut réédité en 1943 et la critique s’aperçut tardivement de la valeur de cette réaction à l’hermétisme qui dominait à cette époque la poésie italienne. Tes pays [ publié en 1941, mais écrit en 1939], bref roman à propos duquel on parla de « monologue intérieur » et de technique néo-réaliste d’inspiration américaine, révéla Pavese et fit scandale par la brutalité du thème et du langage. Ce n’est que plus tard que l’on se rendit compte que ce court roman avait été précédé par de nombreux travaux et d’abord par un long récit : La Prison [Il carcere, 1938-39]. Ce livre avait été lui-même précédé par des nouvelles esquissant en partie les œuvres futures, que Pavese garda dans ses tiroirs et qui ne parurent qu’en 1953 sous le titre de Nuit de fête [Notte di festa]. Composées entre 1936 et 1938, ces nouvelles sont déjà remarquables par leur « côté concret et spontané ». La crise psychologique et artistique de Pavese date donc de son séjour forcé en Calabre, entre 1935 et 1936. Cette époque marqua le début, il l’a dit lui-même, de nouvelles méditations sur son métier et vit commencer la rédaction de son Journal. De retour à Turin, il se donna tout entier au travail et participa, en particulier avec Leone Ginzburg, à la fondation et à la direction des éditions Einaudi. Il écrivit alors Le Bel Été [La bella estate, 1939], petit roman qui demeura inédit durant dix ans, La Plage [La spiaggia], « distraction », simple « recherche de style », comme le disait l’auteur, et les nouvelles de Vacances d’août [Feria d’agosto, écrit entre 1941-44, publié en 1946], mélange de narration et de méditation sur des thèmes de la mystique de l’enfance. Les désastres des vingt mois de guerre qui suivirent l’armistice du 8 septembre 1943 le firent se retirer avec la famille de sa sœur — il vécut toujours près d’elle — à Serralunga di Cera, dans le Montferrat, où il se livra à une solitaire méditation. Après la Libération, Pavese vécut quelque temps à Rome, puis à Milan et s’établit enfin à Turin, mais il ne cessa de travailler pour la maison Einaudi. Sa vie fut dès lors très stable; il ne fit plus que quelques voyages à Rome, en Toscane et dans le Piémont, où il aimait aller revoir son village natal. Une infatigable volonté lui faisait poursuivre son travail d’éditeur, ses études d’ethnologie et son œuvre littéraire. Il avait comme la hâte de s’exprimer tout entier à travers quelques thèmes longtemps médités : la campagne, dans son état primitif et sauvage, la banlieue, le Piémont des collines, le monde des paysans et des ouvriers, des bourgeois et des mondains où il se mouvait avec moins de sûreté, la tristesse des vies ratées et déçues et la cruauté de la mort. De 1945 à 1950, son travail créateur ne connut aucun répit. C’est en 1945 qu’il écrivit La Terre et la mort [La terra e la morte], poème qui fait partie de son recueil posthume : Viendra la mort et elle aura tes yeux; vinrent ensuite : Dialogues avec Leucô, Le Camarade [Il compagno], qui obtint, en 1947, le Prix Salento. Ce sont les années où Pavese s’intéresse au communisme, auquel il adhère sans vraie vocation politique. En 1949, il publie Avant que le coq chante , qui comprend La Maison dans la colline et l’ancien récit : La Prison, et Le Bel été, volume qui réunit le petit roman du même nom, écrit dix ans plus tôt, Le Diable sur les collines et Entre femmes seules, dans lequel vit le plus réel de ses personnages féminins, Clelia. A l’automne de 1949, il écrivit en deux mois La Lune et les feux de joie, « souvenir de l’enfance et du monde », son dernier livre et peut-être son chef-d’œuvre. Pavese était alors certain d’avoir mis fin au cycle historique de son temps, d’avoir écrit une « saga complète » et il est probable, en effet, si on les lit non comme une chronique, mais comme une expérience spirituelle, que les événements, les problèmes et les mœurs de son époque se trouvent dans la trame de ses récits, dans les brefs chapitres de mieux en mieux rythmés qui vont de La Prison à La Lune et les feux de joie. Son Journal, qui retrace tout le parcours de son idéale « maturité » — il a été publié en 1952 sous le titre : Le Métier de vivre — porte, à la date du 18 août 1950, cette ultime phrase : « Plus un mot. Un geste. Je n’écrirai plus. » Le sentiment qu’il avait dit tout ce qu’il avait à dire, une nouvelle déception amoureuse (avec une jeune actrice américaine à laquelle il avait dédié des poèmes en anglais et des scénarios de cinéma), l’insatisfaction devant le succès (il obtint en juin 1950 le Prix Strega) et « un calme et las renoncement » attisèrent son ancienne obsession du suicide. Le 26 août au soir, il se donna la mort dans une chambre d’hôtel en absorbant un barbiturique. La rigueur de son œuvre, l’absence totale de dilettantisme, la conscience critique qui accompagna l’évolution de son art et la sincérité de sa vie font de lui l’un des plus hauts et des plus significatifs interprètes de notre époque, de sa crise, de ses douloureuses recherches et, comme le disait Pavese, de ses tentatives ardues pour connaître le monde et aider à le construire.
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