C.E. 21 mars 1910, COMPAGNIE GÉNÉRALE FRANÇAISE DES TRAMWAYS, Rec. 216, concl. Blum
Publié le 20/09/2022
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«
CONTRATS ADMINISTRATIFS
MUTABILITÉ
C.E.
21 mars 1910, COMPAGNIE GÉNÉRALE FRANÇAISE
DES TRAMWAYS, Rec.
216, concl.
Blnm
{S.
1911.3.1, concl.
Blum, note_Hauriou;
D.
1912.3.49, cane!.
Blum;
R.
D.
P.
1910.270, note Jèze)
Sur la recevabilité : - Cons.
que le litige dont la Compagnie
générale française des tramways a saisi le mnseil de préfecture des
I
Bouches-du-Rhône portait sur 1:inierprétation du cahier des cha�ges
d'une concession accordée par l'Etat; qu'il appartenait dès lors à l'Etat de
défendre à l'instance et que c'est par suite· à tort que le mémoire
présenté en son nom devant le conseil de préfecture a été déclaré non
recevable par l'arrêté attaqué;
Au fond : - Cons.
que, dans l'instance engagée par elle devant le
.conseil de préfecture, la Compagnie générale fr�çaise des tramways a ,
soutenu que l'arrêté du 23 juin 1903, par lequel le préfet des Botiches
du-Rhône a fixé l'horaire du service d'été, aurait été pris en violation de
l'art.
li de la convention et de l'art.
14 du cahier des charges, et que,
faisant droit aux conclusions de la Compagnie, le conseil de
préfecture a annulé ledit arrêté préfectoral; que la COI�pagnie dans les
observations qu'elle a présentées devant le Conseil d'Etat a conclu au
rejet du recours du ministre des travaux publics par les motifs énoncés
dans sa réclamation primitive;
Cons.
que l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône a été pris dans la
limite des pouvoirs qui lui sont conférés par l'art.
33 du règlement
d'administration publique·du 6 août 1881, pris en exécution des lois du
ï 1 juin 1880 (art.
38) et du 15 juill.
1845 (art.
21), lesquels impliquent
pour l'administration le droit, non seulement d'approuver les horaires des
trains au point de vue de la sécurité et de la commodité de la circulation,
98
LES GRANDS ARRtTS ADMINISTRATIFS
mais encore de prescrire les modifications et les additions nécessaires
pour assurer, dans l'intérêt du public, la marche normale du service;
qu'ainsi la circonstance que le préfet aurait, comme le soutient la
Compagnie des tramways, imposé à cette dernière un service différent
de celui qui avait été prévu par les parties contractantes ne serait pas
de nature à entraîner à elle seule, dans l'espèce, l'annulation de l'arrêté
préfectoral du 23 juin 1903; que c'est par suite à tort que le conseil de
préfecture a, par l'arrêté attaqué, prononcé cette annulation; qu'il
appartiendrait seulement, à la Compagnie, si elle sy croyait fondée, de
présenter une demande d'indemnité en réparation du préjudice qu'elle
établirait lui avoir été causé par une aggravation ainsi apportée aux
charges de l'exploitation;...
(Annulation de l'arrêté du conseil de préfecture; rejet de la réclamation de la Compagnie).
OBSERVATIONS
Le préfet des Bouches-du-Rhône, fixant dans son département l'horaire du service d'été des tramways, avait imposé à la
Compagie générale française des tramways d'augmenter, pour
satisfaire aux besoins accrus de 1~ population, le nombre des
rames en service.
Les droits de l'Etat vis-à-vis des conce.ssionnaires de tramways étaient fixés par l'art.
33 du décret du
6 août 1881, en vertu duquel : « le préfet déteqnine ...
sur
proposition du concessionnaire...
le tableau de service des
trains ».
La thèse du ministre des travaux publics était que
l'expression « tableau de service » désignait non seulement
l'horaire des trains, mais leur nombre.
Le concessionnaire
soutenait, au contraire, qu'en insérant dans le cahier des
charges une clause, indiquant le minimum des trains dus par le
concessionnaire, l'Etat avait fait passer la détermination de leur
nombre dans le domaine contractuel et ne pouvait modifier ce
nombre que par avenant, « tableau de service » ne désignant,
selon cette argumentation, que l'horaire des trains.
L'argumentation de la Compagnie trouvait une base extrêmement forte dans l'arrêt du 23 janv.
1903, Compagnie des
chemins de fer économiques du Nord (Rec.
61; S.
1904.3.49,
note Hauriou) : « Considérant que si l'art.
33 du règlement
d'administration publique du 6 août 1881 confère au préfet le
droit de déterminer...
le tableau de service des trains, cette
disposition doit être conciliée avec l'art.
14 du cahier des
charges; ...
que le nombre de voyages fixé par cet art.
14
constitue donc un minimum contractuel qui ne peut être
modifié que par l'accord réciproque des parties.
»
Le coml!lissaire du gouvernement Léon Blum proposa au
Conseil d'Etat de revenir sur cette jurisprudence.
Il formula à
cette occasion une théorie générale des pouvoirs de la collectivité publique·à l'égard du concessionnaire: « Il est évident que
les besoins auxquels un service public de cette nature doit
21
1
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MARS
1910, Cie
DES TRAMWAYS
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satisfaire, et, par suite, les nécessités de son exploitation, n'ont
pas un caractère invariable...
L'État ne peut pas se désintéresser
du service p_ublic de transports une fois concédé.
II est concédé,
sans doute, mais· il n'en demeure pas moins un service public.
La concession représente une délégation, c'est-à-dire qu'elle
constitue un mode de gestion inçlirecte, elle n'équivaut pas à un
abandon, à un délaissement.
L'Etat interviendra donc nécessairement pour imposer, le cas échéant, au concessionnaire, une
prestation supérieure à celle qui était prévue strictement, pour
forcer l'un des termes de cette équation financière qu'est, en un
sens, toute....
»
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