Burkina Faso 1985-1986
Publié le 12/09/2020
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Burkina Faso 1985-1986
Tout comme en 1984, quelques jours après la célébration du deuxième anniversaire
de la "révolution démocratique populaire", le Conseil national de la révolution
(CNR), présidé par le capitaine Thomas Sankara, a décidé de dissoudre le
gouvernement.
Mais cette fois, l'équipe gouvernementale a été pratiquement
reconduite.
Cependant, deux nouvelles structures (le Conseil d'administration
ministériel et la Commission du peuple chargée du secteur ministériel) ont été
créées, renforçant l'influence des Comités de défense de la révolution (CDR)
auprès de chaque ministre.
Les CDR, dirigés par le capitaine Pierre Ouédraogo, très lié au chef de l'État,
sont désormais omniprésents dans la vie et l'administration du pays, et la
position des militaires s'est encore sensiblement renforcée au sein du régime.
En effet, depuis la mise à l'écart de la LIPAD-PAI (Ligue patriotique pour le
développement-Parti africain pour l'indépendance) de tendance
marxiste-léniniste, en août 1984, les forces civiles n'ont plus guère
d'influence dans la direction du pays et les syndicats ont souvent dû s'effacer
au profit des CDR créés dans les services.
La Confédération syndicale burkinabé
(CSB), centrale la plus active qui avait soutenu le régime, semble être en
sommeil, et son dirigeant, Soumane Touré, membre de la LIPAD-PAI, est détenu
depuis janvier 1985.
De nombreux responsables de syndicats contestataires
proches du PCRV (Parti clandestin marxiste-léniniste, pro-albanais) ont été
arrêtés puis relâchés à plusieurs reprises en 1985 et 1986.
Dans ce climat politique assez tendu, la guerre éclair qui a opposé le Burkina
Faso au Mali à la fin du mois de décembre 1985, à propos d'un litige frontalier
datant de l'indépendance, n'a pas suscité un élan national susceptible d'apaiser
ces divisions.
Du reste, profitant d'un meeting de "réconciliation avec les
frères maliens", le président Sankara, soucieux d'apaiser les tensions internes
au pays, a annoncé des mesures de clémence en faveur de hauts dirigeants des
régimes précédents, dont les ex-présidents Saye Zerbo et Jean-Baptiste
Ouédraogo.
En février 1986, deux membres de la LIPAD-PAI, l'ancien ministre
Adama Touré et son homonyme syndicaliste, emprisonnés en octobre 1984, ont été
libérés.
Enfin, alors que les suspensions et licenciements de fonctionnaires
"pour attitude contre-révolutionnaire" s'étaient multipliés de façon
inquiétante, les autorités ont officiellement réintégré 250 des 2 000
enseignants licenciés pour fait de grève en mars 1984.
Le CNR semble avoir péché en matière économique et sociale par un excès de
pragmatisme et de précipitation qui a nui à sa crédibilité.
Certaines mesures
comme la suppression des loyers ou la réforme de l'école ont été rapportées.
Le
pays connaît une situation financière difficile: début mai 1986, le budget,
sérieusement grevé par le service de la dette extérieure, n'était toujours pas
clairement arrêté.
L'effort populaire d'investissement s'est traduit par une
ponction de 5 à 12% sur les salaires, ce qui a accru le mécontentement de
couches urbaines acquises au régime à ses débuts.
La marge de manoeuvre du CNR,
qui entend toujours accorder la priorité à la paysannerie, s'est trouvée
d'autant plus réduite.
Par le biais de campagnes massives de vaccination, la
distribution de vivres dans les régions sahéliennes ou la participation à
l'aménagement de la vallée du Sourou, les CDR, qui ont tenu en avril 1986 leur
première conférence nationale, occupent le terrain, mais ils ne semblent plus.
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