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BONHEUR ET CONNAISSANCE

Publié le 21/05/2024

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« BONHEUR ET CONNAISSANCE / Si nous étions ignorants, serions-nous plus heureux ? Anatole France affirme « la vie enseigne qu’on n’est jamais heureux qu’au prix de quelque ignorance » Même s'il existe des conceptions différentes du bonheur, on peut statuer sur un seul concept selon lequel le bonheur vise un état de satisfaction durable, profond et global qui provient d'un jugement sur notre vie en général.

C’est donc un état de plénitude achevé, complet, qui permet de s'approcher de la perfection dans notre existence, mais aussi dans le regard que l'on porte sur elle. On peut commencer à se demander si un tel état est seulement accessible à l’être humain en général ,( ignorant ou pas ), car soumis au hasard des circonstances, aux souffrances multiples qu’il ne peut éviter ? Pour être heureux ne serait-il pas préférable d'être ignorant, c’est à dire dénué de connaissance et privé de vérité ? Mais cette façon de voir les choses n’est-elle pas plutôt liée à une image idéalisée du bonheur ? 1° Pour certains, le bonheur de l’homme serait impossible. En effet, si l’on considère le désir non pas de façon négative (comme une volonté de combler un manque), mais de façon positive, (comme une force en mouvement qu’il s’agit sans cesse de renouveler afin de vivre une vie intense), alors être heureux supposerait de rechercher en permanence la satisfaction de nouveaux nos désirs.

Il semblerait que cela soit un rêve peu réalisable, relevant d’un idéal peu compatible avec la réalité.

En effet, nos désirs sont illimités et ne sont effectivement pas réalisables, la nature nous impose des limites.

Selon Freud, l'être humain par sa constitution est limité dans ses possibilités d'accéder au bonheur car nos organes sensoriels ne nous permettent pas de ressentir une joie à la fois intense et durable, la joie n'étant de plus qu'un aspect limité de notre existence. En identifiant 3 sources de souffrance pour l’homme, le corps( « voué à la déchéance et la dissolution ») , le monde extérieur (« qui peut faire rage contre nous avec des forces surpuissantes, inexorables et destructrices » ) et les autres, Freud peut conclure que le bonheur est difficile à obtenir, même si bon nombre de nos désirs sont assouvis. « Rien d'étonnant à ce que, sous la pression de ces possibilités de souffrance, les hommes n’aient cessé de modérer leurs prétentions au bonheur ». Par ailleurs, l’homme véritable machine à désirer, est sans cesse déçu de ses satisfactions.il est déchiré entre une double menace : La souffrance ( créée par la manque) et l’ennui (une fois ses désirs satisfaits).

Pour Schopenhauer, « l e bonheur est impossible car la vie oscille comme un pendule, de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui ». On peut aller plus loin en affirmant que la nature humaine est malheureuse.

L’homme serait un néant, et son existence serait tragique.

Penser à la nature humaine est insupportable, car on se rend compte que nous allons tous mourir et que nos actions ne signifient rien dans l'ordre général du cosmos et du temps.

Dans le monde de Pascal, où « l'homme tire du fond de son âme l’ennui, la noirceur, la tristesse, le chagrin, le dépit , le désespoir »,le divertissement (travail, sport) permet d’occuper notre esprit et de le remplir .

Ce n’est donc pas un véritable bonheur.

C’est une apparence de bonheur ,une illusion ,un masque ,un écran qui nous évite de penser à notre malheur et à notre condition de mortel. 2° L’ignorant, celui qui est privé de connaissances, de vérité, soit par manque d’expérience, soit par non éducation, serait-il plus heureux? Pour être heureux , n’est il pas préférable d’être ignorant ? L'état d'innocence est un état de bonheur.

L'ignorance nous plonge dans l'agréable naïveté de l'enfance.

Elle est aussi un refuge, car les illusions sont consolatrices.

Ne pas penser à la mort par exemple nous libère de son scandale.

Le désir de lutter contre elle, comme le fait le docteur Frankenstein, mène à la folie et au désespoir.

Ne pas savoir peut-être alors un choix. Rousseau, dans « l'Émile », critique ceux qui veulent faire des enfants des « singes savants ».

Mieux vaut qu'ils s'éduquent eux-mêmes en se servant de la nature comme guide.

Au fond ,pour être vraiment heureux ,il faut savoir peu de choses mais les savoir bien .Or c'est souvent ce qu'on a appris en autodidacte, qui nous satisfait .

Pour Rousseau , à force de déployer de nouveaux désirs, l ’homme perd son bonheur originaire.

Contrairement à l’état de nature, l’homme social de Rousseau est malheureux car il invente de nouveaux désirs. Nous pouvons apprendre à nous libérer de l'empire de nos désirs afin de ne pas vivre un cycle d’insatisfactions, à condition toutefois d’être capables de distinguer les bons et les mauvais désirs.

C’est ce préconise d’ailleurs Épicure, pour qui le bonheur est « le Souverain bien.

Pour lui, ce sont les désirs naturels et nécessaires (comme manger et boire quand on a faim et soif) qui contribuent au bonheur, à la paix du corps mais aussi à la vie.

Rien ne manque à celui qui est heureux, nous dit Épicure, car le bonheur, défini comme plénitude du corps et de l’âme, est incompatible avec toute idée de manque.

En ce sens, L’ignorant semble être naturellement un épicurien, sachant instinctivement satisfaire ses désirs naturels et nécessaires , ne courant que très peu après les désirs naturels non nécessaires, et ignorant les désirs non naturels et non nécessaires Si l’on pense comme Socrate, que le bonheur ne consiste pas dans la satisfaction de tous nos désirs illimités mais réside plus dans la tempérance, alors l’ignorant aura facilement accès au bonheur.

En effet, n’ayant pas forcément de désirs insatiables, il saura adopter instinctivement, comme le sage, une attitude mesurée et modérée face au plaisir, menant une vie qui le maintiendra dans un état d'équilibre et de tranquillité.

Il atteindra ainsi plus aisément un état de plénitude, comparable au tonneau plein de Platon .

De plus, on peut difficilement imaginer l’ignorant en train de passer toute sa vie à courir après le bonheur sans jamais l’atteindre, comme dans la métaphore des tonneaux percés. Étant probablement moins sensible aux images véhiculées par la société de consommation, il ne ressentira probablement moins le manque et l’envie. Si à l’inverse, on suit l’exemple de Calliclès dans le Gorgias de Platon, selon lequel le bonheur consisterait à suivre le cours spontané de tous ses plaisirs, sans se fixer de limite et au mépris des règles et des conventions sociales ,on peut supposer que ,là aussi.... »

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