Bonheur
Publié le 16/02/2024
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«
LE BONHEUR
I QUI PEUT DIRE CE QU’EST LE BONHEUR ?
1 Il n’y a pas de définition a priori du bonheur
Chacun donne sa définition, sa conception, son sentiment, son expérience.
Il n’y a pas une
mais des définitions du bonheur.
Pour paraphraser Socrate dans le Ménon, lorsqu’il parle de
la vertu, nous pouvons dire qu’il y en a un « essaim » et qu’il est impossible de les ramener à
l’unité.
Le bonheur, c’est la famille, les amis, les passe-temps, les plaisirs… Il n’y a pas de
définition a priori du bonheur.
Elle est relative à chacun.
Chacun a ses moyens pour y parvenir.
Exemples fournis par les élèves.
Toutefois le bonheur est souvent défini comme un état durable de satisfaction.
On ne saurait
ainsi le confondre avec le plaisir qui est certes un état de satisfaction physique ou morale mais
un état provisoire.
Le plaisir ne dure pas, il passe.
Il peut même être de très courte durée.
(Termes voisins : jouissance, satisfaction).
Quant à la joie, elle consiste en un sentiment de
satisfaction ou d’exaltation, profond en ceci qu’il affecte la conscience tout entière.
(Termes
voisins : allégresse, félicité, satisfaction).
Ainsi la joie se caractérise par son intensité.
D’autre
part la joie peut être éprouvée alors même que l’on est malheureux ou dans une situation
précaire : elle est paradoxale, nous l’éprouvons quand le bonheur nous est impossible.
2 Le bonheur est plus un idéal qu’une réalité
Idéal : définitions philosophiques du mot : 1) qui n’existe que dans la pensée en tant qu’idée ;
2) qui constitue l’accomplissement parfait d’un type de réalité ; 3) modèle qui sert de but et
de norme à l’action.
Nous pouvons dire que nous aspirons tous au bonheur ; il s’agit d’une quête universelle.
Cependant « il y a loin de la coupe aux lèvres »… Il y a une distance entre la réalité quotidienne
et notre aspiration et bien souvent nous connaissons la frustration.
Ainsi le bonheur n’est
peut-être qu’un idéal impossible à incarner.
Nous le désirons ardemment mais nous sommes
toujours insatisfaits.
Nous faisons des projections, nous anticipons le futur en délaissant le
présent pour faire notre bonheur mais nous échouons.
Rien n’est conforme à nos attentes et
le bonheur reste toujours hors de portée.
Serions-nous par nature incapables d’être
heureux ? C’est ce que suggère Blaise Pascal dans plusieurs de ses Pensées.
Etude de deux textes de Pascal, l’un sur le temps, l’autre sur le divertissement
-
Temps et bonheur
« Nous ne nous tenons jamais au présent.
Nous rappelons le passé ; nous anticipons l’avenir
comme trop lent à venir, comme pour hâter son cours, ou nous rappelons le passé pour
l’arrêter comme trop prompt, si imprudents que nous errons en des temps qui ne sont point
nôtres, et ne pensons point au seul qui nous appartient, et si vains que nous songeons à ceux
qui ne sont rien, et échappons sans réflexion le seul qui subsiste.
C’est que le présent
d’ordinaire nous blesse.
Nous le cachons à notre vue parce qu’il nous afflige, et s’il nous est
agréable, nous regrettons de le voir échapper.
Nous tâchons de le soutenir par l’avenir, et
pensons à disposer les choses qui ne sont pas en notre puissance pour un temps où nous
n’avons aucune assurance d’arriver.
Que chacun examine ses pensées.
Il les trouvera toutes
occupées au passé ou à l’avenir.
Nous ne pensons presque point au présent, et si nous y
pensons ce n’est que pour en prendre la lumière pour disposer de l’avenir.
Le présent n’est
jamais notre fin.
Le passé et le présent sont nos moyens ; le seul avenir est notre fin.
Ainsi nous ne vivons jamais
mais nous espérons de vivre et, nous disposant toujours à être heureux, il est inévitable que
nous ne le soyons jamais.
»
Blaise Pascal
Pourquoi selon Pascal sommes-nous incapables d’être heureux ?
Le bonheur nous échappe sans cesse pour Pascal parce que nous ne savons pas nous en tenir
au présent ; nous ne parvenons pas à goûter l’instant.
Nous sommes toujours dans un temps
qui n’est pas le présent.
Nous nous projetons par l’imagination dans le futur où le bonheur ne
manquera pas d’advenir ou bien nous nous tournons vers le passé en prétextant que nous y
étions heureux et alors nous souffrons de nostalgie.
Cependant le seul temps qui existe c’est
le présent et c’est ici et maintenant que nous avons à faire notre bonheur.
Comme nous fuyons
en permanence le présent, nous sommes incapables d’être heureux.
La solution : Carpe diem c’est-à-dire « Cueille le jour présent sans te soucier du lendemain »
comme le prône Horace (poète épicurien).
-
Divertissement
« Divertissement.
Quand je m’y suis mis quelquefois à considérer les diverses agitations des
hommes et les périls et les peines où ils s’exposent, dans la cour, dans la guerre, d’où naissent
tant de querelles, de passions, d’entreprises hardies et souvent mauvaises, etc.., j’ai découvert
que tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer
en repos, dans une chambre.
Un homme qui a assez de bien pour vivre, s’il savait demeurer
chez soi avec plaisir, n’en sortirait pas pour aller sur la mer ou au siège d’une place.
On
n’achètera une charge à l’armée si cher, que parce qu’on trouverait insupportable de ne
bouger de la ville ; et on ne recherche les conversations et les divertissements des jeux que
parce qu’on ne peut demeurer chez soi avec plaisir.
Mais quand j’ai pensé de plus près, et qu’après avoir trouvé la cause de tous nos malheurs,
j’ai voulu en découvrir la raison, j’ai trouvé qu’il y en a une bien effective, qui consiste dans le
malheur naturel de notre condition faible et mortelle, et si misérable, que rien ne peut nous
consoler, lorsque nous y pensons de près.
Quelque condition qu’on se figure, si on assemble tous les biens qui peuvent nous appartenir,
la royauté est le plus beau poste du monde ; et cependant, qu’on s’en imagine [un]
accompagné de toutes les satisfactions qui peuvent le toucher, s’il est sans divertissement, et
qu’on le laisse considérer et faire réflexion sur ce qu’il est, cette félicité languissante ne le
soutiendra point, il tombera par nécessité dans les vues qui le menacent, des révoltes qui
peuvent arriver, et enfin de la mort et des maladies qui sont inévitables ; de sorte que, s’il est
sans ce qu’on appelle divertissement, le voilà malheureux, et [plus] malheureux que le
moindre de ses sujets, qui joue et qui se divertit.
De là vient que le jeu et la conversation des
femmes, la guerre, les grands emplois sont si recherchés.
Ce n’est pas qu’il y ait en effet du
bonheur ni qu’on s’imagine que la vraie béatitude soit d’avoir l’argent qu’on peut gagner au
jeu, ou dans le lièvre qu’on court : on n’en voudrait pas, s’il était offert.
Ce n’est pas cet usage
mol et paisible, et qui nous laisse penser à notre malheureuse condition, qu’on recherche, ni
les dangers de la guerre, ni la peine des emplois, mais c’est le tracas qui nous détourne d’y
penser et nous divertit.
Raison pourquoi on aime mieux la chasse que la prise.
De là vient que les hommes aiment tant le bruit et le remuement ; de là vient que la prison est
un supplice si horrible ; de là vient que le plaisir de la solitude est une chose incompréhensible.
Et c’est enfin le plus grand sujet de félicité de la condition des rois, de [ce] qu’on essaie sans
cesse à les divertir et à leur procurer toute sorte de plaisirs.
Le roi est environné de gens qui ne pensent qu’à divertir le roi, et l’empêcher de penser à lui.
Car il est malheureux, tout roi qu’il est, s’il y pense.
Voilà tout ce que les hommes ont pu inventer pour se rendre heureux.
Et ceux qui font sur
cela les philosophes, et qui croient que le monde est bien peu raisonnable de passer tout le
jour à courir après un lièvre qu’ils ne voudraient pas avoir acheté, ne connaissent guère notre
nature.
Ce lièvre ne nous garantirait pas de la vue de la mort et des misères, mais la chasse qui nous en détourne- nous en garantit.
Le conseil qu’on donnait à Pyrrhus, de prendre le repos qu’il allait chercher par tant de
fatigues, recevait bien des difficultés.
»
Blaise Pascal
Question 1 D’où vient le malheur des hommes ?
Les hommes ne peuvent pas rester en repos, ce qui provoque l’ensemble de leurs malheurs.
Ils
s’agitent sans répit alors que s’ils restaient chez eux, ils ne prendraient aucun risque.
Question 2 Pourquoi les hommes ne peuvent-ils pas rester en repos ? Qu’est-ce qui les
pousse à s’activer, à se divertir ?
L’origine du divertissement (sa raison) n’est rien d’autre que « notre condition faible et
mortelle ».
Nous sommes « misérables ».
En prendre conscience nous rend inconsolables.
Pour Pascal, se divertir ne consiste pas seulement à....
»
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