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Bergson (1859-1941): QU'EST-CE QUE LA MÉMOIRE?

Publié le 18/06/2020

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« Mon corps se meut la plupart du temps par habitude ; le passé s'est sédimenté en mécanismes moteurs qui rendent l'action plus efficace. C'est la mémoire du corps, celle de la virtuosité du musicien et du geste machinal. La mémoire proprement dite, ce n'est pas la mémoire habitude, mais c'est celle du souvenir pur ; nulle trace sur le corps de son action. Une leçon apprise se conserve sous les deux formes. Elle est à la fois mécanisme du corps - disposition physique acquise à répéter -et ensemble de souvenirs singuliers. ...»

« B�_r:gson _(��5_!1-1941) QU' E S T-CE Q UE LA MÉMOIR E? L a. mémoire fait que nous avons une histoire ; a.-voir une his­ toire, c'est vivre.

La mémoire est donc le fait fondamental du vivant ; car le vivant dure.

Sa conscience s'étend sur une infinité de plans, qui vont du plan du rêve au plmi de l'action; rêver, c'est se plonger dans le passé ; agir, c'est se poser sur le présent.

Dans le rêve, le moi coïncide avec sa mémoire ; dans l'action, il coïncide avec la conscience de son corps.

1.

Le souvenir pur et le rêve A.

L'inconscient ■ Les souvenirs' accumulés par ma durée se conservent.

Ils ne sont pas stockés quelque part, inertes, mais déterminent mes actes.

Un souvenir est la plupart du temps inconscient, mais il est toujours là, qui pousse pour entrer dans le champ de la conscience et agir.

Le sou­ venir inconscient est une action impuissante; c'est sous cette fo�e qu'il existe et se conserve.

Il ne pénètre la conscience qu'à propos. L'ensemble de mes souvenirs, c'est mon histoire ; c'est mon caractère. ■ Les souvenirs que nous perdons sont ceux dont nous n'avons pas besoin pour agir ; inutiles, ils sont refoulés dans la mémoire pure.

Ils n'en sont pas pour autant détruits: le passé est intégralement conservé, mais ne resurgit que pour et dans l'action.

Lorsque les exi­ gences de celle-ci se relâchent, la conscience peut se replonger dans le passé : tout est là.

Ainsi s'explique que des gens sur le point de mourir, à qui agir devient inutile, se souviennent de toute leur vie en un instant ; ainsi s'explique le rêve. B.

Le rêve et la rêverie ■ Nous ne cessons jamais, même dans le sommeil, d'avoir des impres­ sions de toutes sortes; pourtant, nous n'y prenons plus garde : l'attention est relâchée.

Ce n'est pas dire qu'elles sont comme inexistantes : elles fournissent une matière imprécise que nous rapprochons de souvenirs. Le souvenir aspire à être vu, la matière des sensations, à être identi­ fiée ; comme ils se rencontrent en un moi détendu et relâché, le lien est lâche et manque de précision ; nous interprétons avec fantaisie les sen­ sations du sommeil : c'est le rêve. 11 Ce qui distingue Je sommeil de la veille, c'est donc la distraction du moi.

C'est que le moi qui rêve se désintéresse de l'action ; veiller, c'est vouloir.

Le distrait vit dans le passé dans la mesure même où il se désin­ téresse de son présent, c'est-à-dire de l'effectif, de l'actif.. »

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