Belle Epoque
Publié le 06/12/2021
Extrait du document
«
L es premières années du 20e siècle ont été surnommées la " Belle Epoque ".
Avec
raison Toute considération sur la femme intellectuelle se situe dans le contexte général
que je viens d’esquisser.
Il convient d’ajouter que si les femmes ont pu autant participer à
l’élaboration et à la propagation des grandes questions intellectuelles de l’époque, c’est
surtout parce que les lieux des débats s’étaient déplacés.
De la société savante réservée aux
hommes, ou du petit cénacle réuni à la cour d’une reine humaniste, on passe à une série de
constellations de lieux mixtes où hommes et femmes travaillent ensemble à la
dissémination des idées, souvent sous la « direction » d’une femme 6 .
Que peut-on dire des
causes d’une transformation sociale qui semble, au premier abord, si favorable au
développement de la femme intellectuelle ?
4 D’abord, on le sait, le siècle est marqué par deux régences et par une polyphonie politique
dans laquelle de nouvelles options sont explorées, le pouvoir royal d’abord contesté et puis
renforcé 7 .
Mais il faut rappeler que l’avènement d’une nouvelle catégorie, celle constituée
de femmes intellectuelles, – qu’elles soient érudites, moralistes, théologiennes ou encore
poètes et romancières – n’a été possible qu’une fois le terrain préparé depuis plus d’un
siècle.
Tout un projet de société qui entendait confier aux femmes le rôle de civiliser les
mœurs est peu à peu mis en place à la fin du XVI e
siècle : selon les tenants de cette opinion,
ce sont les femmes qui amèneront la modération de la forme, l’urbanité du ton, le progrès
des lumières et des mœurs, la propagation des idées nouvelles dans les sciences et les arts 8 .
Pour faire advenir cette société mixte, les femmes devaient être jugées capable d’agir dans
le champ politique mais aussi avoir la liberté de peindre, composer, écrire.
Somme toute,
elles devaient devenir des sujets dans un champ culturel partagé.
On ne relit guère les
textes majeurs de La Querelle des Femmes aujourd’hui pour les soumettre à un nouveau
questionnement et on en étudie moins encore l’historiographie.
C’est ainsi que, le plus
souvent, on considère le projet discursif de La Querelle toujours comme binaire, – d’un
côté des tirades misogynes, de l’autre des apologies pour la supériorité des femmes – alors
qu’il était en fait ternaire : il y avait une troisième voix, celle qui exprimait – à travers des
textes de tous genres – qu’il serait avantageux de faire une place aux femmes dans les
domaines de la politique et des arts 9 .
La représentation positive de femmes intelligentes,
dans le discours masculin de la Renaissance, permit – il me semble – à un nombre
important d’entre elles d’intérioriser cette représentation favorable d’elles-mêmes, dans la
mesure où une partie de la société en avait le modèle.
Certaines en ont profité pour devenir
les régulatrices de la sociabilité intellectuelle, d’autres pour se réaliser en tant
qu’intellectuelles.
probablement, car ce sont des années d’insouciance et de confiance, d’inventions
et de réalisations diverses.
Les problèmes existent certes, mais l’optimisme
domine, la " fée électricité " accomplit des merveilles, la " petite reine " donne
l’occasion de faire les premiers tours de France à bicyclette, la musique peut
s’écouter chez soi, sur d’élégants gramophones .
Fallait-il que cet optimisme initial
soit sanctionné ensuite par des événements qui font du 20e siècle le plus violent
et le plus meurtrier de l’Histoire? Ces millions de morts, engendrés par les
machines infernales de deux guerres mondiales et de dizaines de conflits
régionaux, étaient-ils déjà inscrits dans cette gaieté imperturbable de la Belle
Epoque? Pourtant, au cours ce même siècle bouleversant, des centaines de
millions d’autres hommes et de femmes ont aussi retrouvé leur liberté et, comme
le stipule la Constitution française, le droit à disposer d'eux-mêmes, qu'ils ont
parfois arrachés avec violence des mains de leurs anciens maîtres.
Serait-ce le.
»
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