Beatniks

« 1 / 2 13 juillet 1966 Série B-39 Fiche No 1244 Beatniks 1.

Bien avant 1950, un certain nombre de jeunes écrivains américains manifestait un goût prononcé pour le jazz, la marijuana et l'exil en Europe.

L'un d'entre eux, Jack Kerouac, appliqua à ce mouvement dissident l'étiquette de ..

beat generation"· " Beat "• parce que la réponse que ses membres faisaient à ceux qui ne partageaient pas leurs idées (et donc à la société américaine) était invariablement: ..

Don't bug me.

man.

l'rn beat "• c'est-à-dire: " Fous-moi la paix, j'en ai marre ...

2.

Ce groupe, qui comprenait notamment Kerouac, Allen Ginsberg, William Bur­ roughs, Lawrence Ferlinghetti et Gregory Corso, allait révolutionner la vie littéraire américaine et devenir bon gré mal gré le porte-parole d'une génération de bohémiens déclassés.

En 1958, un journaliste de San Francisco ajouta au mot " beat ..

un suffixe yiddish péjoratif formant l'expression "beatnik"· Il ne faisait pas seulement allusion à ces écrivains, mais aussi aux membres extrêmement nombreux d'une sous-culture adolescente qui, abandonnant famille, école et drapeau, avait adopté un mode de vie mystico-nomade.

3.

Des cinq promoteurs du mouvement, deux sont des écrivains: Kerouac, dont les romans constituent une sorte d'autobiographie picaresque évoquant, dans un style libre et spontané, amis, amours et vagabondages; et Burroughs, dont cc Le Festin nu» exprime une expérience de la drogue de quinze années.

Ginsberg, Ferlinghetti et Corso, poètes plus peut-être par la parole que par la plume, ont lu leurs œuvres à travers toute l'Amérique, obtenant dès les années 50 une adhésion populaire sans précédent.

4.

Les " beats ..

ont peu hérité de la tradition littéraire américaine, sinon le paci­ fisme militant.

Leur poésie attaque de front la totalité des valeurs modernes améri­ caines.

Ses vers libres, où voisinent l'argot obscène et le vocabulaire politique, se déclament à l'occasion accompagnés de jazz.

Les préoccupations qu'ils expriment rappellent celles de certains surréalistes tels que Michaux ou Artaud: la drogue, le rêve, l'écriture automatique, les mysticismes orientaux (en particulier le bouddhisme zen), l'univers de la folie.

5.

Alors que l'Europe occidentale s'achemine vers la prospérité américaine, le beat­ nik y fait son apparition.

Il n'a pas encore ses poètes, mais un nombre croissant d'adolescents en révolte adopte l'uniforme bigarré (cheveux longs, blue-jeans, guitare) des précurseurs du nouveau monde.

Ces déracinés insoumis, ces "saints boiteux"· passés maîtres dans l'expédient artisanal garant de leur survie, sont liés par la soli­ darité spontanée des minorités traquées.

Leur territoire fait penser à celui des Arabes du désert, et chaque grande ville a son oasis beatnik.

6.

Le phénomène, tardif en Europe, a défrayé la critique.

Mais pour le regard exercé da Norman Mailer, les écrivains « beat ..

et la tribu hirsute qui suit confusément leurs traces seraient ..

les porteurs de ces valeurs presque perdues de liberté, de réalisation de soi et d'égalité qui les ont lancés d'abord contre les hypocrisies et les steppes incultes des classes moyennes "· f { 1 1 1 ' 2 / 2. »