Aux déconvenues suscitées par l'idéologie développementiste ont succédé de nouveaux credo
Publié le 09/09/2020
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Aux déconvenues suscitées par l’idéologie développementiste ont succédé de
nouveaux credo
Au lendemain des indépendances, la volonté de rattrapage des pays développés,
que les divers leaders du tiers monde avaient affirmée avec force à la
conférence de Bandung en 1955, bénéficie d’un soutien unanime.
Qu’il s’agisse
des pays proches du camp socialiste au nationalisme sourcilleux ou des pays
libéraux restés proches de leurs ex-métropoles, le même postulat optimiste
prévaut : l’indépendance politique devait libérer des dynamismes internes
inédits et puissants.
L’idéologie développementiste commune reposait sur deux
présupposés majeurs : la croissance accélérée des forces productives grâce à la
diversification des productions et à l’industrialisation, au recours aux modèles
techniques les plus productifs, à l’intégration dans une division internationale
du travail rééquilibrée d’une part et, d’autre part, le rôle majeur de l’État
dans la mise en œuvre et le contrôle du processus de croissance aussi bien au
niveau des ressources nationales que de la mobilisation des soutiens populaires.
Certes, la politique des blocs occidental et soviétique introduisait un clivage
majeur, mais celui-ci ne portait pas sur les présupposés ni, pour l’essentiel,
sur les fins de l’idéologie développementiste.
La démarcation portait sur la
question de l’égalité des groupes sociaux et des nations dans le double domaine
des efforts consentis pour la production des richesses et de leur
redistribution.
L’économie politique appliquée au développement du tiers monde a
alors fonctionné comme une tentative de rationalisation de la prophétie
originaire, libérale ou révolutionnaire, véritable science du salut anticipant
sur un nouvel ordre économique international.
L’échec de quatre décennies du développement
Le clivage fondateur entre les voies libérales ou socialistes sur la priorité à
accorder aux droits civils et politiques, d’un côté, ou aux droits économiques
et sociaux, de l’autre (le second volet étant censé découler mécaniquement du
premier et vice versa), s’efface devant ce constat désenchanté : les «
sous-développés » n’ont, dans leur très grande majorité, bénéficié ni de la
démocratie ni du développement économique.
Au cours des quatre dernières
decennies du XXe siècle, la part des 20 % les plus pauvres est passée de 2,3 % à
1,4 % du PIB mondial, les 20 % les plus riches de 70 % à 85 %, tandis que
l’écart des revenus entre ces deux groupes a doublé.
On a ensuite assisté à une double recomposition.
D’un côté, à la suite de
l’effondrement des pays du bloc socialiste, les politiques libérales ont déployé
sans entraves leurs logiques d’ajustement macroéconomique et substitué les
démarches pragmatiques du development management dans toutes les sphères de
l’organisation politique et sociale des pays assistés (capacity building, good
governance, promotion de la société civile, développement local, intégration
régionale, prévention des conflits, conditionnalité sociale, écologie...).
Les
différentes organisations internationales ont théorisé ces nouveaux credo autour
des concepts de développement humain durable, de développement écologiquement
rationnel, etc., qui avaient l’avantage de ne pas mettre en cause les
savoir-faire des développeurs et de proposer une nouvelle synthèse, vague et
évolutive, susceptible d’intégrer les dynamiques du changement social par le «
haut » et par le « bas » et de répondre aux attentes des acteurs les plus
divers.
Replis « communautaristes » et contre-idéologies
En contrepoint à ces approches technocratiques se sont reconstituées les bases
d’une nouvelle utopie post-tiers-mondiste et anti-développement glorifiant
l’autonomie des hommes ou l’irréductibilité culturelle.
L’arrière-plan commun à
ces diverses approches consiste à substituer à la tyrannie du marché et à sa
rationalité instrumentale une autre rationalité qui réintroduirait la créativité.
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