ARTICLE DE PRESSE: Renforcement de l'assise communiste en Russie
Publié le 10/12/2021
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17 décembre 1995 - A première vue, la poussée des communistes et apparentés dans la nouvelle Douma est impressionnante : ils devraient y occuper près de la moitié des sièges, contre moins d'un quart dans l'ancienne Chambre basse du Parlement. Pourtant, cette progression ne signifie pas que l'électorat russe ait basculé " à gauche " de façon aussi massive : les analyses préliminaires des résultats, dont près de 8 % manquaient encore, vendredi 22 décembre, ont montré au contraire une certaine stabilité de l'opposition, cachée par des changements d'étiquettes, et surtout une grande permanence des tendances régionales. La sur-représentation des communistes à la Douma s'explique d'abord par les particularités de la loi électorale les voix " perdues " du scrutin à la proportionnelle (celles des 39 partis n'ayant pas obtenu 5 % des voix) sont deux fois plus nombreuses cette année qu'en 1993 (quand cinq partis seulement n'ont pas passé la barre). Or, ces voix, reportées sur les grands partis, favorisent surtout celui qui arrive en tête, en l'occurrence le PC. Mais le succès communiste est aussi dû à celui de ses candidats présentés localement au scrutin majoritaire, ce qui traduit un réveil certain des vieux appareils régionaux, que le Kremlin semble avoir de plus en plus de mal à contrôler en profondeur. Stabilité à Moscou Première constatation : deux nouvelles années de transition n'ont fait qu'accentuer le fossé entre Moscou " la riche ", qui vote de façon stable pour le pouvoir, et les régions, qui votent de plus en plus contre lui. Le parti du premier ministre, Notre Maison la Russie (NDR), qui a obtenu 9,65 % des suffrages, ne domine que dans la capitale (19,3 %), là où les banques, les commerces, les étrangers et le boom de la construction ont créé un embryon de classe moyenne. Le Choix démocratique d'Egor Gaïdar, qui était au pouvoir en 1993 et ne franchit pas la barre éliminatoire des 5 % au niveau national, y fait son seul bon score (11,6 %). Mais les divers partis pro gouvernementaux arrivaient au même total dans la capitale il y a deux ans, de même que l'opposition démocratique. Même stabilité à Moscou du côté de l'opposition non " démocrate " : aujourd'hui, le PC (15 %), le KRO du général Lebed (5 %) et le parti de Jirinovski (LDPR, 2,5 %) ont eu autant de voix que le PC et le LDPR réunis (11 % et 13 % respectivement) en 1993. En revanche dans les régions, l'opposition s'est légèrement renforcée : si les îlots " démocrates " se sont bien maintenus, les provinces, traditionnellement communistes, sont passées sous une emprise plus forte des communistes. Mais ce serait, là aussi, parce que le parti de Guennadi Ziouganov a, en partie, récupéré la moitié des voix " protestataires " perdues par Vladimir Jirinovski. Au niveau national, ce dernier est tombé de 22 % en 1993 à 11 % aujourd'hui, alors que le PC a grimpé de 12 % à 22 %. Les réformateurs restent forts à Saint-Pétersbourg : le parti Iabloko de Grigori Iavlinski est en tête (16 %) devant le PC (13 %) et le NDR (12,7 %). Iabloko ou le NDR gagnent aussi ou font de bons scores dans d'autres villes du nord ou de l'Oural. En revanche, dans beaucoup de régions du centre et du sud, l'emprise du PC s'est affirmée dans la " ceinture rouge " en Russie occidentale (Tver, Briansk-Belgorod ou Koursk). Mais aussi chez les mineurs qui, en 1991, avaient pourtant été à la pointe du soutien à Boris Eltsine. Comme aux élections de 1993, le parti de M. Jirinovski fait ses meilleurs scores dans des régions " frontalières ", aux côtés du PC : à Kaliningrad, région de militaires renvoyés d'Europe de l'Est et de retraités, à Stavropol, submergé de réfugiés du Caucase, ou en Extrême-Orient, atteint par une phobie du " péril jaune ". Les appels du pouvoir à s'opposer au " péril communiste ", lancés en particulier à l'adresse des jeunes, n'ont eu aucun effet. C'est, au contraire, toujours les retraités qui seraient surtout responsables de l'augmentation de 10 % de la participation électorale. Comme le précise Alexandre Mineev de la revue Vach Vybor, spécialisée dans la vie des régions, beaucoup de petits apparatchiks communistes régionaux ont eu la possibilité de déclarer des participations de près de 100 % dans certaines zones rurales désertées par les jeunes, au profit naturellement du PC ou de leurs alliés agrariens. Ces fonctionnaires subalternes, maires ou directeurs de kolkhozes, sont les instruments dociles d'appareils locaux devenus plus autonomes après avoir repris des forces, politiques et financières, perdues au début de la tourmente démocratique. Car beaucoup de gouverneurs, nommés par Boris Eltsine, ont cherché à assurer leurs assises locales en se rapprochant de leurs " directeurs rouges " et autres notables communistes, au lieu d'imposer les réformes impopulaires du Kremlin. Treize de ces gouverneurs ont été autorisés à organiser, le 17 décembre, leur propre élection. Certains d'entre eux ont particulièrement veillé à ne pas faire campagne pour le NDR, afin de ne pas être soupçonnés d'être de simples " agents de Moscou ". Cette attitude a payé : dix sur treize ont été élus, deux sont en ballottage très favorable. " Contrôle absolu " Pour les gouverneurs élus, les représailles ne pourront plus s'exercer que sous forme de pressions économiques. La facilité avec laquelle ils ont gagné leurs scrutins locaux prouve que beaucoup de chefs régionaux nommés par M. Eltsine ont acquis " un pouvoir réel, fondé sur un contrôle absolu de leurs régions ", selon l'expert du centre Carnegie de Moscou, Nikolaï Petrov. En vertu d'un marché conclu avec les appareils locaux, ces derniers font voter " pour les gouverneurs en place au niveau local mais pour les communistes au niveau fédéral ", souligne Alexandre Mineev. Seuls deux ou trois des nouveaux gouverneurs élus sont réellement populaires, dont le jeune " démocrate " Boris Nemtsov qui a gagné à Nijni novgorod. A l'opposé, un homme comme Evgueni Nadzratenko, célèbre gouverneur de la région de Vladivostok, règne par la force brutale depuis deux ans. " Personne ne croit qu'il a obtenu démocratiquement ses 60 % de voix ", souligne Alexandre Sobianine, auteur d'une étude détaillant les fraudes lors des élections législatives de 1993. M. Sobianine déplore que les observateurs du Conseil de l'Europe ont " décidé, début décembre, de limiter leurs observations à quelques grandes villes qui ne posaient pas de problèmes ". C'est pourtant ces provinces reculées, où Boris Eltsine a dû déléguer ses pouvoirs aux vieilles structures, qui pourraient représenter pour lui la plus grande menace s'il décide de se représenter en juin 1996. A moins qu'il ne s'en remette totalement, cette fois-ci, aux membres de son entourage pour qui le " communisme de marché " est plus proche et compréhensible que la " démocratie à l'occidentale " et qui pourraient chercher à faire alliance avec les potentats locaux, sans souci d'étiquette politique. SOPHIE SHIHAB Le Monde du 25 décembre 1995
17 décembre 1995 - A première vue, la poussée des communistes et apparentés dans la nouvelle Douma est impressionnante : ils devraient y occuper près de la moitié des sièges, contre moins d'un quart dans l'ancienne Chambre basse du Parlement. Pourtant, cette progression ne signifie pas que l'électorat russe ait basculé " à gauche " de façon aussi massive : les analyses préliminaires des résultats, dont près de 8 % manquaient encore, vendredi 22 décembre, ont montré au contraire une certaine stabilité de l'opposition, cachée par des changements d'étiquettes, et surtout une grande permanence des tendances régionales. La sur-représentation des communistes à la Douma s'explique d'abord par les particularités de la loi électorale les voix " perdues " du scrutin à la proportionnelle (celles des 39 partis n'ayant pas obtenu 5 % des voix) sont deux fois plus nombreuses cette année qu'en 1993 (quand cinq partis seulement n'ont pas passé la barre). Or, ces voix, reportées sur les grands partis, favorisent surtout celui qui arrive en tête, en l'occurrence le PC. Mais le succès communiste est aussi dû à celui de ses candidats présentés localement au scrutin majoritaire, ce qui traduit un réveil certain des vieux appareils régionaux, que le Kremlin semble avoir de plus en plus de mal à contrôler en profondeur. Stabilité à Moscou Première constatation : deux nouvelles années de transition n'ont fait qu'accentuer le fossé entre Moscou " la riche ", qui vote de façon stable pour le pouvoir, et les régions, qui votent de plus en plus contre lui. Le parti du premier ministre, Notre Maison la Russie (NDR), qui a obtenu 9,65 % des suffrages, ne domine que dans la capitale (19,3 %), là où les banques, les commerces, les étrangers et le boom de la construction ont créé un embryon de classe moyenne. Le Choix démocratique d'Egor Gaïdar, qui était au pouvoir en 1993 et ne franchit pas la barre éliminatoire des 5 % au niveau national, y fait son seul bon score (11,6 %). Mais les divers partis pro gouvernementaux arrivaient au même total dans la capitale il y a deux ans, de même que l'opposition démocratique. Même stabilité à Moscou du côté de l'opposition non " démocrate " : aujourd'hui, le PC (15 %), le KRO du général Lebed (5 %) et le parti de Jirinovski (LDPR, 2,5 %) ont eu autant de voix que le PC et le LDPR réunis (11 % et 13 % respectivement) en 1993. En revanche dans les régions, l'opposition s'est légèrement renforcée : si les îlots " démocrates " se sont bien maintenus, les provinces, traditionnellement communistes, sont passées sous une emprise plus forte des communistes. Mais ce serait, là aussi, parce que le parti de Guennadi Ziouganov a, en partie, récupéré la moitié des voix " protestataires " perdues par Vladimir Jirinovski. Au niveau national, ce dernier est tombé de 22 % en 1993 à 11 % aujourd'hui, alors que le PC a grimpé de 12 % à 22 %. Les réformateurs restent forts à Saint-Pétersbourg : le parti Iabloko de Grigori Iavlinski est en tête (16 %) devant le PC (13 %) et le NDR (12,7 %). Iabloko ou le NDR gagnent aussi ou font de bons scores dans d'autres villes du nord ou de l'Oural. En revanche, dans beaucoup de régions du centre et du sud, l'emprise du PC s'est affirmée dans la " ceinture rouge " en Russie occidentale (Tver, Briansk-Belgorod ou Koursk). Mais aussi chez les mineurs qui, en 1991, avaient pourtant été à la pointe du soutien à Boris Eltsine. Comme aux élections de 1993, le parti de M. Jirinovski fait ses meilleurs scores dans des régions " frontalières ", aux côtés du PC : à Kaliningrad, région de militaires renvoyés d'Europe de l'Est et de retraités, à Stavropol, submergé de réfugiés du Caucase, ou en Extrême-Orient, atteint par une phobie du " péril jaune ". Les appels du pouvoir à s'opposer au " péril communiste ", lancés en particulier à l'adresse des jeunes, n'ont eu aucun effet. C'est, au contraire, toujours les retraités qui seraient surtout responsables de l'augmentation de 10 % de la participation électorale. Comme le précise Alexandre Mineev de la revue Vach Vybor, spécialisée dans la vie des régions, beaucoup de petits apparatchiks communistes régionaux ont eu la possibilité de déclarer des participations de près de 100 % dans certaines zones rurales désertées par les jeunes, au profit naturellement du PC ou de leurs alliés agrariens. Ces fonctionnaires subalternes, maires ou directeurs de kolkhozes, sont les instruments dociles d'appareils locaux devenus plus autonomes après avoir repris des forces, politiques et financières, perdues au début de la tourmente démocratique. Car beaucoup de gouverneurs, nommés par Boris Eltsine, ont cherché à assurer leurs assises locales en se rapprochant de leurs " directeurs rouges " et autres notables communistes, au lieu d'imposer les réformes impopulaires du Kremlin. Treize de ces gouverneurs ont été autorisés à organiser, le 17 décembre, leur propre élection. Certains d'entre eux ont particulièrement veillé à ne pas faire campagne pour le NDR, afin de ne pas être soupçonnés d'être de simples " agents de Moscou ". Cette attitude a payé : dix sur treize ont été élus, deux sont en ballottage très favorable. " Contrôle absolu " Pour les gouverneurs élus, les représailles ne pourront plus s'exercer que sous forme de pressions économiques. La facilité avec laquelle ils ont gagné leurs scrutins locaux prouve que beaucoup de chefs régionaux nommés par M. Eltsine ont acquis " un pouvoir réel, fondé sur un contrôle absolu de leurs régions ", selon l'expert du centre Carnegie de Moscou, Nikolaï Petrov. En vertu d'un marché conclu avec les appareils locaux, ces derniers font voter " pour les gouverneurs en place au niveau local mais pour les communistes au niveau fédéral ", souligne Alexandre Mineev. Seuls deux ou trois des nouveaux gouverneurs élus sont réellement populaires, dont le jeune " démocrate " Boris Nemtsov qui a gagné à Nijni novgorod. A l'opposé, un homme comme Evgueni Nadzratenko, célèbre gouverneur de la région de Vladivostok, règne par la force brutale depuis deux ans. " Personne ne croit qu'il a obtenu démocratiquement ses 60 % de voix ", souligne Alexandre Sobianine, auteur d'une étude détaillant les fraudes lors des élections législatives de 1993. M. Sobianine déplore que les observateurs du Conseil de l'Europe ont " décidé, début décembre, de limiter leurs observations à quelques grandes villes qui ne posaient pas de problèmes ". C'est pourtant ces provinces reculées, où Boris Eltsine a dû déléguer ses pouvoirs aux vieilles structures, qui pourraient représenter pour lui la plus grande menace s'il décide de se représenter en juin 1996. A moins qu'il ne s'en remette totalement, cette fois-ci, aux membres de son entourage pour qui le " communisme de marché " est plus proche et compréhensible que la " démocratie à l'occidentale " et qui pourraient chercher à faire alliance avec les potentats locaux, sans souci d'étiquette politique. SOPHIE SHIHAB Le Monde du 25 décembre 1995
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