ARTICLE DE PRESSE: Nouvel accord sur l'autonomie palestinienne
Publié le 10/12/2021
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27 août 1995 - Sept jours et sept nuits de discussions dans le petit port égyptien de Taba, sur la mer Rouge, auront été nécessaires, après des mois de discrètes négociations, à la conclusion du troisième accord entre Israël et l'OLP. Ce texte devrait être entériné par le gouvernement israélien, mercredi 27 septembre, et signé en grande pompe, le lendemain, à la Maison Blanche, en présence du président Bill Clinton et de nombreux invités arabes et européens. La Knesset devra ensuite le ratifier. L'autonomie qui avait été accordée, en mai 1994, aux Palestiniens de Gaza et de Jéricho et avait permis le retour de Yasser Arafat après vingt-sept ans d'exil, sera étendue dans les six mois à venir, avec près de deux ans de retard sur les engagements pris, à six grandes villes de Cisjordanie et, partiellement, à une septième, Hébron. Les Palestiniens contrôleront alors environ 30 % des " territoires occupés ", Gaza et Cisjordanie inclus. De nouveaux " redéploiements ", notamment hors des zones rurales de Cisjordanie où vivent environ 65 % des Palestiniens, auront lieu d'ici à la fin de la période " intérimaire ", en mai 1997. Jusqu'à cette date au moins, les " frontières " extérieures de ces enclaves, les ressources en eau et en électricité de la Cisjordanie, demeureront sous contrôle israélien. A l'issue du processus " intérimaire " le statut définitif des territoires sera négocié à partir de mai 1996 , près de 90 % des 2,4 millions de Palestiniens des territoires Jérusalem-Est, annexé par Israël, exclu seront placés sous administration autonome. " Nos cousins juifs " Cet accord, qui entrera dans l'histoire du Proche-Orient sous l'appellation de " compromis de Taba " ou encore " Oslo 2 ", en référence à la Déclaration de principes conclue, en septembre 1993, en Norvège, ouvre la voie aux premières élections " nationales " palestiniennes pour la création d'un " conseil " de l'autonomie. La consultation aura lieu, à la fin de mars 1996, en présence d'observateurs internationaux. Salué par ses concepteurs comme " une étape capitale sur la voie de la paix entre les deux peuples ", l'accord a aussitôt été dénoncé par les opposants laïcs et islamistes de Yasser Arafat, ainsi que par la droite et l'extrême droite israéliennes. Plusieurs ténors du Likoud ont annoncé que, s'ils revenaient au pouvoir lors des élections prévues en novembre 1996, " seuls seront honorés les intérêts d'Israël ". Les porte-parole des 140 000 colons juifs de Gaza et de Cisjordanie ont, pour leur part, mis en garde les autorités contre l'éventualité d'un " bain de sang ". Aucune des 127 colonies ne sera cependant démantelée pendant la période intérimaire, l'armée continuera d'assurer leur sécurité et ce jusqu'au coeur d'Hébron, où vivent 450 fanatiques juifs. Epuisés mais satisfaits, Israéliens et Palestiniens ont réussi à s'entendre trois heures avant la célébration du Nouvel An juif. Toute activité s'est arrêtée, dimanche soir, en Israël, et la vie ne reprendra son cours normal qu'à partir de mercredi matin. Yasser Arafat, qui a brandi avec fierté les 450 pages de l'accord devant les caméras, a présenté ses voeux, en hébreu, " à tout le peuple israélien et à tous nos cousins juifs ". Le chef de l'OLP s'est dit convaincu que, si l'accord était " mis en oeuvre avec sincérité et bonne foi ", il ouvrirait " la voie d'un avenir de paix et de prospérité " pour les peuples de la région. Il a aussi dit son " espoir " de voir s'ouvrir " une nouvelle ère dans laquelle le peuple palestinien sera souverain dans son pays et pourra ainsi jouer son rôle naturel avec toutes les autres nations de la région ". " Nous faisons l'histoire au sens propre du terme ", a répondu Shimon Pérès, le ministre israélien des affaires étrangères, qui a conduit les négociations de bout en bout. " Nous tentons d'amener deux peuples, nés dans le même berceau et qui se sont battus, à s'entendre sur un avenir nouveau. (...) Nous faisons un choix historique, un choix moral. Nous tendons la main au futur et à nos voisins. " Moins lyrique, le premier ministre Itzhak Rabin s'est déclaré " satisfait " du travail accompli " en vue de résoudre un conflit, dans le sens que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire [l'émergence], dans l'ancienne Palestine mandataire britannique, d'un Etat juif qui couvre l'essentiel du territoire (...) avec Jérusalem unifiée comme capitale et des frontières le long du fleuve et de la vallée du Jourdain ". M. Rabin a rappelé qu'il ne croyait pas au " concept d'Eretz Israël Hashlema " le Grand Israël sur toute la Palestine mandataire , " car cela nous mènerait à annexer, contre leur gré, plus de 2 millions de Palestiniens et ferait de notre pays un Etat bi-national ". Dans ses frontières internationalement reconnues celles d'avant la guerre de 1967 , Israël compte 5,5 millions d'habitants dont près de 900 000 " Arabes israéliens " qui sont des Palestiniens restés chez eux, en 1948. Interrogé, dimanche, lors d'une conférence de presse, sur le point de savoir si " l'entité palestinienne " qui émerge en Cisjordanie et à Gaza ne pourrait pas se transformer en Etat, M. Rabin a répondu : " Je ne m'occupe pas de savoir ce que sera la physionomie de cette entité. Nous verrons au moment des discussions sur le statut définitif [des territoires] quelle est la meilleure solution pour les trois entités de la région : l'israélienne, la jordanienne et la palestinienne. " Le matin même, au cours d'un entretien accordé au Yedioth Aharonot, le premier ministre s'était montré plus ouvert. A une question identique, il avait répondu : " Pour l'heure, et je souligne, pour l'heure, je suis opposé à la création d'un Etat palestinien. A l'avenir, nous chercherons toutes sortes de solutions. " De mémoire de journaliste, ce fut la première " entrouverture " à une idée qui, il y a peu, ne suscitait qu'un haussement d'épaules. PATRICE CLAUDE Le Monde du 26 septembre 1995
27 août 1995 - Sept jours et sept nuits de discussions dans le petit port égyptien de Taba, sur la mer Rouge, auront été nécessaires, après des mois de discrètes négociations, à la conclusion du troisième accord entre Israël et l'OLP. Ce texte devrait être entériné par le gouvernement israélien, mercredi 27 septembre, et signé en grande pompe, le lendemain, à la Maison Blanche, en présence du président Bill Clinton et de nombreux invités arabes et européens. La Knesset devra ensuite le ratifier. L'autonomie qui avait été accordée, en mai 1994, aux Palestiniens de Gaza et de Jéricho et avait permis le retour de Yasser Arafat après vingt-sept ans d'exil, sera étendue dans les six mois à venir, avec près de deux ans de retard sur les engagements pris, à six grandes villes de Cisjordanie et, partiellement, à une septième, Hébron. Les Palestiniens contrôleront alors environ 30 % des " territoires occupés ", Gaza et Cisjordanie inclus. De nouveaux " redéploiements ", notamment hors des zones rurales de Cisjordanie où vivent environ 65 % des Palestiniens, auront lieu d'ici à la fin de la période " intérimaire ", en mai 1997. Jusqu'à cette date au moins, les " frontières " extérieures de ces enclaves, les ressources en eau et en électricité de la Cisjordanie, demeureront sous contrôle israélien. A l'issue du processus " intérimaire " le statut définitif des territoires sera négocié à partir de mai 1996 , près de 90 % des 2,4 millions de Palestiniens des territoires Jérusalem-Est, annexé par Israël, exclu seront placés sous administration autonome. " Nos cousins juifs " Cet accord, qui entrera dans l'histoire du Proche-Orient sous l'appellation de " compromis de Taba " ou encore " Oslo 2 ", en référence à la Déclaration de principes conclue, en septembre 1993, en Norvège, ouvre la voie aux premières élections " nationales " palestiniennes pour la création d'un " conseil " de l'autonomie. La consultation aura lieu, à la fin de mars 1996, en présence d'observateurs internationaux. Salué par ses concepteurs comme " une étape capitale sur la voie de la paix entre les deux peuples ", l'accord a aussitôt été dénoncé par les opposants laïcs et islamistes de Yasser Arafat, ainsi que par la droite et l'extrême droite israéliennes. Plusieurs ténors du Likoud ont annoncé que, s'ils revenaient au pouvoir lors des élections prévues en novembre 1996, " seuls seront honorés les intérêts d'Israël ". Les porte-parole des 140 000 colons juifs de Gaza et de Cisjordanie ont, pour leur part, mis en garde les autorités contre l'éventualité d'un " bain de sang ". Aucune des 127 colonies ne sera cependant démantelée pendant la période intérimaire, l'armée continuera d'assurer leur sécurité et ce jusqu'au coeur d'Hébron, où vivent 450 fanatiques juifs. Epuisés mais satisfaits, Israéliens et Palestiniens ont réussi à s'entendre trois heures avant la célébration du Nouvel An juif. Toute activité s'est arrêtée, dimanche soir, en Israël, et la vie ne reprendra son cours normal qu'à partir de mercredi matin. Yasser Arafat, qui a brandi avec fierté les 450 pages de l'accord devant les caméras, a présenté ses voeux, en hébreu, " à tout le peuple israélien et à tous nos cousins juifs ". Le chef de l'OLP s'est dit convaincu que, si l'accord était " mis en oeuvre avec sincérité et bonne foi ", il ouvrirait " la voie d'un avenir de paix et de prospérité " pour les peuples de la région. Il a aussi dit son " espoir " de voir s'ouvrir " une nouvelle ère dans laquelle le peuple palestinien sera souverain dans son pays et pourra ainsi jouer son rôle naturel avec toutes les autres nations de la région ". " Nous faisons l'histoire au sens propre du terme ", a répondu Shimon Pérès, le ministre israélien des affaires étrangères, qui a conduit les négociations de bout en bout. " Nous tentons d'amener deux peuples, nés dans le même berceau et qui se sont battus, à s'entendre sur un avenir nouveau. (...) Nous faisons un choix historique, un choix moral. Nous tendons la main au futur et à nos voisins. " Moins lyrique, le premier ministre Itzhak Rabin s'est déclaré " satisfait " du travail accompli " en vue de résoudre un conflit, dans le sens que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire [l'émergence], dans l'ancienne Palestine mandataire britannique, d'un Etat juif qui couvre l'essentiel du territoire (...) avec Jérusalem unifiée comme capitale et des frontières le long du fleuve et de la vallée du Jourdain ". M. Rabin a rappelé qu'il ne croyait pas au " concept d'Eretz Israël Hashlema " le Grand Israël sur toute la Palestine mandataire , " car cela nous mènerait à annexer, contre leur gré, plus de 2 millions de Palestiniens et ferait de notre pays un Etat bi-national ". Dans ses frontières internationalement reconnues celles d'avant la guerre de 1967 , Israël compte 5,5 millions d'habitants dont près de 900 000 " Arabes israéliens " qui sont des Palestiniens restés chez eux, en 1948. Interrogé, dimanche, lors d'une conférence de presse, sur le point de savoir si " l'entité palestinienne " qui émerge en Cisjordanie et à Gaza ne pourrait pas se transformer en Etat, M. Rabin a répondu : " Je ne m'occupe pas de savoir ce que sera la physionomie de cette entité. Nous verrons au moment des discussions sur le statut définitif [des territoires] quelle est la meilleure solution pour les trois entités de la région : l'israélienne, la jordanienne et la palestinienne. " Le matin même, au cours d'un entretien accordé au Yedioth Aharonot, le premier ministre s'était montré plus ouvert. A une question identique, il avait répondu : " Pour l'heure, et je souligne, pour l'heure, je suis opposé à la création d'un Etat palestinien. A l'avenir, nous chercherons toutes sortes de solutions. " De mémoire de journaliste, ce fut la première " entrouverture " à une idée qui, il y a peu, ne suscitait qu'un haussement d'épaules. PATRICE CLAUDE Le Monde du 26 septembre 1995
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