Art et nature ?
Publié le 15/05/2020
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RAPPEL DE COURS: ART & NATURE
La première question est de savoir si l'art existe dans la nature ou siil est une pure création de l'esprit humain.
On admire parfois « l'art »des abeilles qui construisent la ruche.
Mais c'est par analogie avecles œuvres humaines, car l'abeille construit par instinct, alors quel'architecte a une représentation anticipée de son œuvre dans sonesprit (Marx).
Kant soutient que seul l'homme crée par liberté : «tout art est une disposition accompagnée de raison, tournée vers lacréation ».
La deuxième question est de savoir si l'art doit imiter la nature.C'est ce qu'affirme Aristote, dans sa Poétique, livre IV : « nousprenons plaisir à contempler les images les plus exactes des chosesdont la vue nous est pénible dans la réalité, comme les formesd'animaux les plus méprisés et des cadavres ».
L'imitation (mimésis engrec) d'une réalité, même repoussante ou effrayante, apporte unplaisir à l'esprit humain.
C'est la fonction de l'art figuratif, quis'efforce de donner l'illusion du réel (technique du trompe-l'œil, oucourant artistique contemporain de l'hyperréalisme).
Déjà dans l'antiquité, le peintre Zeuxis imitait si parfaitement lesraisins que les oiseaux, dit-on, venaient se casser le bec sur sapeinture.
Platon condamne cet art de l'illusion : si l'art produit debelles apparences trompeuses, il est moralement condamnable et lesartistes doivent être chassés de la cité, « car ces poètes ne créentque des fantômes et non des choses réelles ».
L'art ne doit pasreprésenter la réalité telle qu'elle est, mais l'idéaliser pour élever l'âmevers la contemplation des Idées ; l'art doit conduire à la vérité, non àl'illusion.
Il a un rôle d'éducation de l'âme, pour qu'elle s'élève desapparences sensibles aux Idées intellectuelles.
Le beau préfigure levrai.
Cette origine idéale de l'art est soutenue aussi par Plotin : « lesarts n'imitent pas directement les objets visibles, mais remontent auxraisons d'où est issu l'objet naturel », c'est-à-dire aux Idées que lesobjets sensibles imitent, comme les beautés sensibles imitent le beauidéal ; et il ajoute, à propos d'une statue : « il est clair que la pierre,en tant que l'art a fait entrer la beauté d'une forme, est belle nonparce qu'elle est pierre, mais grâce à la forme que l'art y a introduite».
Hegel insiste également sur l'art comme idéalisation de la nature.L'art saisit l'apparence fugitive et la transforme en œuvre immortelle.L'art n'est pas dans ce qui est représenté (l'objet, le contenu), maisdans la façon de représenter.
« L'œuvre d'art n'est pas lareprésentation d'une belle chose, mais la belle représentation d'unechose » (Kant).
Ce n'est pas l'art qui imite la nature, mais la nature qui imite l'art(Hegel, Oscar Wilde) : quand on admire le chant du rossignol, c'estqu'il nous semble exprimer des sentiments humains ; quand on admireun coucher de soleil, c'est qu'il évoque pour nous une photo ou untableau.
Toute œuvre de l'esprit, même l'invention du clou, estinfiniment supérieure à la plus habile imitation de la nature.
Lorsque nous regardons un paysage peint, nous sommes touchés, émus par la grâce singulière des couleurs, lesmouvements harmonieux des lignes, traits ou formes.
La beauté de l'oeuvre d'art tient ainsi à la manière (maniera,en italien, signifie style) dont elle est faite.
Pourtant, nous promenant dans la campagne, nous pouvons aussi ycontempler de beaux paysages.
Léonard de Vinci recommandait à ses élèves de « faire des tableaux comme desmiroirs » et de se « conformer à l'objet naturel ».Pourquoi le peintre doit-il se référer à la nature ? La « conformité » peut paraître problématique : la nature est-ellesupérieure à l'homme, et doit-elle guider son travail de création ? Elle est alors un modèle à imiter.
Ou bien, aucontraire, n'est-elle pour le peintre qu'une source d'inspiration ? Le plus important serait alors la représentation,l'expression singulière qu'il en donne.
Comment comprendre cette ambiguïté ?
La nature comme modèle
Penser la nature comme modèle impliquerait la subordination de l'activité artistique à son modèle.
Se « conformer à »peut s'entendre dans le sens d'une « mise en accord » ou « se régler sur ».
Accord doux et relatif, car le peintre nese règle sur la nature qu'en l'aimant.
Pourquoi l'aime-t-il ? Parce qu'elle est belle.
Aussi cherche-t-il à égaler sesproductions, à faire des « miroirs » où les hommes retrouverons l'image d'une nature dont il faut rendre visibles lesbeautés.Mais la nature est encore désirable comme modèle par l'étonnante diversité de couleurs, formes, figures, lignes,.
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