ANNABELLA.

« ANNABELLA.

Menue, avec une voix qui peut s'évanouir en un souffle, des mouvements doux, des ye ux effarouchés et on ne sait quoi de flexible dans sa personne.

Souvent cependant une volonté farouche l'anime et l'espoir la soulève.

Au coeur d'actions insensées, elle brave le sort.

Son visage pur accroche la lumière, la diffuse, et accorde ses reflets aux joies enfan tines, aux bonheurs fugitifs.

L e drame n'est pas son fait.

Elle excelle dans la résignation consentie, lourde de soupirs furtifs et de larmes ravalées.

Idéalement, elle se transfigure en petite ser - vante de MARIE, LÉGENDE HONGROISE, ou pare de grâces mélancoliques la petite bonne de bistrot vouée au romantisme du suicide à l'HÔTEL DU NORD et la petite aristocrate russe qu'on cherche à vendre au plus salace mar - chand de blé des NUITS MOSCOVITES.

Elle est toujours petite et cette fois dactylo, lorsque le prince charmant lui offre, au débouché d'un tunnel, l'éblouissement de la Riviera.

Le soutire extasié de PARIS - MÉDITERRANÉE répond alors à la ferveur qui emporte la Violine d'Abel Gance lorsqu'elle s'applique à chanter LA MARSEILLAISE.

Elle a tr onqué sa carrière en France, a vécu aux États - Unis, y a tourné des films et trouvé un époux.

Toutefois son image se superpose toujours à celles des adolescentes pour cartes postales qu'elle a interprétées avec délicatesse aux premiers temps du parlant.

Le souvenir s'efface plus vite d'Aïescha la Slaoui dans LA BANDERA, de la marquise Yorisaka dans LA BATAILLE, que des jeunes filles rêvées par René Clair.

Éternellement Annabella se mêlera à la farandole du MILLION ou, amoureuse déçue, regardera de sa fenêtre , mourir la dernière fusée du 14 JUILLET.

RAYMOND CHIRAT. »