analyse linéaire scène d'exposition de l'ïle des esclaves
Publié le 14/06/2023
Extrait du document
«
Analyse linéaire n°4 : fin de la scène 1 de L’Ile des esclaves, de
« Eh ! ne perdons point de temps » (Iphicrate) à la fin de la scène.
Problématique : Comment dès cette scène d’exposition, Marivaux
expose-t-il les enjeux de sa comédie utopique ?
1er mouvement : une information qui change la donne -> « suismoi donc ».
-« Iphicrate » : le choix de son nom révèle son statut social -> « iphi »
signifie « fortement » en Grec et « crate », comme dans « aristocrate » ou
« démocrate » signifie « le pouvoir » ; son nom insiste donc sur sa
position de dominant, et suggère un abus de pouvoir.
-Le nom en Grec contraste avec « Arlequin », qui vient de la comédie
italienne (de même que Trivelin), et fait un pont entre le cadre exotique et
archaïque (l’Athènes antique) et l’époque contemporaine.
-Dans cette partie du dialogue, Iphicrate presse son valet Arlequin de le
suivre : on le voit aux impératifs qu’il emploie (« suis-moi », repris avec la
particule « donc » qui montre son impatience « suis-moi donc »).
-Le comique de la scène repose sur la tension entre l’impatience
d’Iphicrate à quitter la scène et la nonchalance d’Arlequin qui reste
inamovible.
-Pourquoi Iphicrate veut-il partir ? Il en donne la raison dans ses deux
premières répliques : « car nous sommes dans l’île des esclaves » ; ce qui
est intéressant, c’est l’usage des pronoms personnels que fait Iphicrate :
on voit qu’il veut sauver sa peau (de maître) en utilisant le « je » : « si je
ne me sauve, je suis perdu », et aussi « je ne reverrai jamais Athènes »,
mais il entraîne son valet avec lui, en utilisant le « nous » : « ne perdons
point de temps », « ne négligeons rien pour nous tirer d’ici », le verbe
« tirer » veut dire « sortir » (mais ce n’est pas l’emploi familier).
-Iphicrate exprime sa peur en employant un lexique tragique : « je suis
perdu », « tuer tous les maîtres », « les jeter dans l’esclavage », « je suis
en danger de perdre la liberté, et peut-être la vie ».
-Il est obligé d’insister sur le caractère tragique de sa situation en
relançant Arlequin, grâce à la conjonction « Mais » et en utilisant une
question de rhétorique : « Cela ne te suffit-il pas pour me plaindre ? »,
sous-entendant que cela le devrait.
-En effet, Arlequin ne semble pas réagir outre mesure au fait de se
trouver sur l’île des esclaves : pour cause, il en est un ! Il feint de ne pas
connaître l’île et la « race » qui la peuple, mais c’est ironique, car dans sa
réplique suivante, il prétend avoir déjà entendu parler de l’île : « je l’ai
entendu dire aussi ».
Il se montre tolérant envers les pratiques des
habitants : « chaque pays a sa coutume », parce que cette coutume lui
convient : « on dit qu’ils ne font rien aux esclaves comme moi ».
Ici,
Arlequin se singularise de son maître en utilisant la première personne.
-Il banalise les dangers de la situation en employant des expressions
populaires, marqueur de sa classe sociale : « à la bonne heure », « encore
vit-on ».
-La didascalie indique qu’il porte sa bouteille à la bouche, geste qui
montre son peu d’empathie envers son maître et l’ironie de sa réplique :
« je vous plains de tout mon cœur, cela est juste ».
L’adjectif « juste »
qualifie à la fois le fait de plaindre Iphicrate et aussi la situation qui en
inversant les rôles entre esclaves et maîtres, rétablit la justice.
-Iphicrate se fait plus doux avec Arlequin, en l’appelant « mon cher ».
On voit dans ce premier mouvement comment la situation
commence à échapper à Iphicrate.
2ème mouvement : Arlequin se joue de son maître -> « que je ne
vous dérange pas ! »
-Arlequin, fidèle à son caractère et compte tenu de l’aubaine que la
situation représente pour lui exprime sa gaieté, comme le montrent les
didascalies : « siffle », « distrait, chante », « riant », « en badinant » (qui
veut dire « en plaisantant ») ; il montre ostensiblement (exprès) qu’il
prend la situation à la légère ; il le dit : « la drôle d’aventure », « je ne
saurais m’empêcher d’en rire ».
-Le corps d’Arlequin, qui devrait être une aide pour son maître (pour
conduire la chaloupe éventuelle), devient un obstacle ; Arlequin fait de la
résistance passive, en refusant d’obéir aux impératifs d’Iphicrate : « j’ai
les jambes si engourdies », et en adoptant un comportement déplacé, le
rire, qui est ici une manifestation physique de l’insoumission : « ta gaieté
ne vient pas à propos ».
-Iphicrate est de plus en plus décontenancé : l’aparté révèle ses remords
d’avoir informé Arlequin, la peur est mauvaise conseillère (« j’ai mal fait
de lui dire où nous sommes »).
Il n’a pas anticipé sur la réaction de son
valet, persuadé qu’il est que ce dernier va lui rester fidèle, parce qu’il en a
besoin ; autrement dit, Iphicrate n’a même pas songé qu’Arlequin pourrait
s’émanciper : il ne le considère pas comme un individu à part entière,
juste son aide fidèle.
-Iphicrate essaie la méthode de la ruse, en marchandant avec Arlequin :
« faisons seulement une demi-lieue sur la côte pour chercher notre
chaloupe », mais celui-ci n’est pas dupe : il apostrophe son maître en le
traitant de « badin », c’est-à-dire de plaisantin, et s’exclame qu’il a
compris la ruse : « comme vous tournez cela ! ».
Il voit clair dans la
rhétorique d’Iphicrate : le maître veut lui faire croire que leurs intérêts
convergent, qu’il doit « rembarquer » avec lui....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Analyse linéaire Marivaux scene d'exposition - L’île des esclaves ,Marivaux scène d’exposition
- Analyse linéaire Juste la fin du Monde, Scène d'exposition
- analyse linéaire: EL1 - MOLIERE, LE MALADE IMAGINAIRE : ACTE 1, SCÈNE 2
- fiche analyse linéaire les fausses confidences Marivaux - scène 2 de l'acte I
- Le Jeu de l’Amour et du hasard- extrait de la scène 8 de l’acte III– récapitulatif de cours pour une analyse linéaire à l’oral