Analyse Linéaire : Jean de la Bruyère, Les caractères, « De la cour », 62, 1688.
Publié le 29/05/2021
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Objet d’étude : La littérature d’idées du XVIe siècle au XVIIIe siècle
Parcours associé : Imagination et pensée au XVIIe siècle
EXPLICATION LINEAIRE : Jean de la Bruyère, Les caractères , « De la cour », 62, 1688.
INTRODUCTION
Au XVIIe siècle les moralistes adoptent diverses stratégies pour donner une image des travers d’humain et
instruire les hommes : certains optent pour l’argumentation directe comme La Rochefoucauld dans maxime,
d’autres prennent des voies détournées pour instruire mais aussi plaire comme jean de la fontaine avec ses
fables.
Dans la seconde moitié du siècle le portrait devient un genre littéraire à la mode.
Le moraliste La
Bruyère, dans Les caractères et mœurs de ce siècle publié en 1696 dresse une galerie de portraits qui lui
permet de donner une image variée de l’Homme, de critiquer les comportements humains et d’amener son
lecteur à un jugement personnel.
Dans la remarque 62 du chapitre «de la cour» étudié il dénonce le règne des
apparences et la course aux honneurs.
On se pose alors une question : Comment le regard porté par la
Bruyère sur la Cour, à travers ce portrait du courtisan illustre-t-il la démarche du moraliste
classique ? Ce devoir tente de répondre à cette question en commençant par voir le portrait acerbe du
courtisan dans une vive argumentation et finir en s’attardant sur la vision pessimiste de la nature humaine.
LECTURE
N’espérez plus de candeur, de franchise, d’équité, de bons offices, de services, de bienveillance, de
générosité, de fermeté dans un homme qui s’est depuis quelque temps livré à la cour, et qui secrètement veut
sa fortune.
Le reconnaissez-vous à son visage, à ses entretiens ? Il ne nomme plus chaque chose par son
nom; il n’y a plus pour lui de fripons, de fourbes, de sots et d’impertinents: celui dont il lui échapperait de
dire ce qu’il pense, est celui-là même qui, venant à le savoir, l’empêcherait de cheminer; pensant mal de tout
le monde, il n’en dit de personne; ne voulant du bien qu’à lui seul, il veut persuader qu’il en veut à tous, afin
que tous lui en fassent, ou que nul du moins lui soit contraire.
Non content de n’être pas sincère, il ne souffre
pas que personne le soit ; la vérité blesse son oreille: il est froid et indifférent sur les observations que l’on
fait de la cour et sur les courtisans; et parce qu’il les a entendues, il s’en croit complice et responsable.
Tyran
de la société et martyr de son ambition, il a une triste circonspection dans sa conduite et dans ses discours,
une raillerie innocente, mais une conversation interrompue et des distractions fréquentes.
Il a une profusion,
le dirai-je ? des torrents de louanges pour ce qu’a fait ou ce qu’a dit un homme placé et qui est en faveur, et
pour tout autre une sécheresse de pulmonique; il a des formules de compliments différents pour l’entrée et
pour la sortie à l’égard de ceux qu’il visite ou dont il est visité; et il n’y a personne de ceux qui se payent de.
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