Analyse linéaire de "ma boheme"
Publié le 08/12/2024
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Objet d’étude : La poésie du XIXe siècle au XXIe siècle
Parcours : émancipations créatrices
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David Friedrich
Le Voyageur contemplant une mer de nuages - Caspar
Ma bohème
Je m’en allais, les poings dans mes poches crevées ;
Mon paletot soudain devenait idéal ;
J’allais sous le ciel, Muse, et j’étais ton féal ;
Oh ! là là ! que d’amours splendides j’ai rêvées !
Mon unique culotte avait un large trou.
Petit-Poucet rêveur, j’égrenais dans ma course
Des rimes.
Mon auberge était à la Grande-Ourse.
Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou
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Et je les écoutais, assis au bord des routes,
Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes
De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;
Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,
Comme des lyres, je tirais les élastiques
De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur !
Rimbaud, Poésies
Introduction
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En août 1870, Arthur Rimbaud a 16 ans.
Épris de liberté, il fugue et rédige,
durant son vagabondage, 22 poèmes qui deviendront Les Cahiers de Douai.
Paul Verlaine le surnomme : « L’Homme aux semelles de vent » en raison de
son amour pour le voyage, pour la vie de bohémien.
« Ma bohème » est un
poème célébrant l’errance, la liberté mais aussi le monde, la nature.
Rimbaud joue avec les règles du sonnet traditionnel et propose un texte
novateur, où, le vagabond qu’il est, évoque le bonheur procuré par la nature
mais aussi chante son amour pour la poésie.
Problématique
Ainsi, nous allons nous demander en quoi ce sonnet original célèbre le
monde.
Mouvements
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Pour cela, nous verrons, dans un premier mouvement, le vagabondage du
poète du vers 1 à 6 et dans un deuxième mouvement, nous considérerons la
nature synonyme de liberté du vers 7 à 14.
Titre
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Le titre du poème, « Ma Bohème », résume le thème et l'esprit du poème.
Le mot "Bohème" renvoie à un mode de vie non conventionnel et libre,
caractérisé par un esprit d'aventure, de vagabondage et de rébellion contre
les normes sociales indiquées.
Les Bohémiens vivaient en marge de la
société, souvent en quête de liberté, de créativité et d'émancipation.
Ainsi,
en intitulant son poème "Ma Bohème", Rimbaud exprime son aspiration à
être un poète errant, cherchant l'inspiration dans les paysages, les
rencontres et les aventures, plutôt que de se conformer aux attentes
sociales et en quête d'émancipation créatrice.
Le poème est un hymne à la
liberté et à l'idéal bohème, célébrant la beauté de l'errance et de la
communion avec la nature.
I/ Le vagabondage du poète (v 1 à 6)
Le vagabond est un personnage qui, en raison de sa liberté, enthousiasme
les artistes de la fin du XIXème siècle.
Lorsque Rimbaud fugue, il goûte au
bonheur de l’errance.
En effet, la répétition du verbe de mouvement : «
aller » au vers 1 : « Je m’en allais » et au vers 3 : « J’allais » esquisse le
portrait d’un poète voyageur.
C’est parce qu’il est libre que le poète s’amuse
avec les règles de la poésie traditionnelle.
En effet, le premier vers, qui est
un alexandrin, présente une césure irrégulière.
(Dans un alexandrin
classique, la césure est après la 6ème syllabe) Ici, nous pouvons observer
qu’elle se fait après la quatrième syllabe : « Je m’en allais, // les poings
dans mes poches crevées ».
Ce premier vers, en outre, met en évidence la
dimension autobiographique de ce sonnet.
Deux marques de la première
personne du singulier sont visibles : le pronom personnel : « je » ouvre
le poème et le déterminant possessif « mes » : « mes poches » indiquent
que Rimbaud relate l’expérience qui est la sienne.
la pauvreté qu’a connue
l’auteur transparaît grâce à l’ adjectif : « crevées » (v 1) et au substantif «
paletot » (v 2).
Si le lecteur comprend que ce poème évoque le
vagabondage de Rimbaud, il ignore l’itinéraire de l’auteur.
Effectivement, le
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CC de lieu « sous le ciel » (v 3) est extrêmement vague.
Il se trouve dans
la nature mais son emplacement demeure imprécis.
La liberté physique est,
alors, totale pour le poète.
Ce sentiment est tellement intense qu’il se met
au service de la muse qu’il interpelle via une apostrophe : « Muse ! » Il
semble entretenir une forme d’intimité avec elle comme le suggère le
tutoiement et le substantif « féal ».
Ce vagabondage paraît, à mesure que
les vers se succèdent, offrir une liberté langagière à Rimbaud.
L’interjection
: « Oh ! là ! là » du vers 4, plutôt orale, est inhabituelle et détone dans ce
sonnet.
Toutefois, elle traduit son enthousiasme, sa joie de vivre, son envie
de rencontrer l’amour : « amours splendides » (v 4) Il faut comprendre que
l’errance au sein de la nature ouvre le champ de tous les possibles.
Ce n’est
sans doute pas un hasard si l’adjectif : « crevées » (v 1) rime avec le
participe passé « rêvées ».
(Le vagabondage permet le rêve) Le vers 5 fait
écho aux vers 1 et 2 puisque Rimbaud montre, à nouveau, sa pauvreté.
Les
deux adjectifs : « unique » et « large » révèlent, une fois de plus, le
dénuement du poète.
Néanmoins, la nature lui offre la liberté et le vers 6
s’ouvre sur une comparaison plutôt originale, mise en exergue par un
tiret : « – Petit-Poucet rêveur ».
Rimbaud devient, à....
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